Lignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels

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I. Objectifs

1. Les présentes Lignes directrices en matière de justice pour les enfants victimes et témoins d’actes criminels présentent les bonnes pratiques établies à partir du consensus du savoir actuel ainsi que des normes, règles et principes internationaux et régionaux.

2. Les Lignes directrices devraient être appliquées en conformité avec lalégislation et les procédures judiciaire s nationales pertinentes, et prendre en considération les conditions juridiques, sociales, économiques, culturelles et géographiques. Cependant, les États devraient toujours chercher à surmonter les difficultés pratiques dans l’application des Lignes directrices.

3. Les Lignes directrices fournissent le cadre pratique permettant d’atteindre les objectifs suivants : a) Aider au réexamen des lois, procédures et pratiques nationales et internes de manière que celles-ci garantissent le respect total des droits des enfants victimes et témoins d’actes criminels et contribuent à l’application de la Convention relative aux droits de l’enfant par ceux qui y sont parties ; b) Aider les gouvernements, les organisations internationales, les organismes publics, les organisations non gouvernementales et communautaires ainsi que les autres parties intéressées à élaborer et appliquer des lois, politiques, programmes et pratiques qui traitent des principales questions concernant les enfants victimes et témoins d’actes criminels ;

c) Guider les professionnels et, le cas échéant, les bénévoles qui travaillentavec des enfants victimes et témoins d’actes criminels dans leur pratique quotidienne du processus de justice pour adultes et mineurs aux niveaux national, régional et international, conformément à la Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d’abus de pouvoir ;

d) Aider et soutenir ceux qui s’occupent d’enfants pour qu’ils traitent les enfants victimes et témoins d’actes criminels avec sensibilité.

4. Lors de l’application des Lignes directrices, chaque pays devrait s’assurerqu’une formation, une sélection et des proc édures appropriées sont mises en place pour protéger les enfants victimes et témoins d’actes criminels et répondre à leurs besoins spécifiques lorsque la nature dela victimisation affecte diversement différentes catégories d’enfants, par exemple l’agression sexuelle des enfants, en particulier des filles.

5. Les Lignes directrices couvrent un domaine dans lequel les connaissances et lapratique se développent et s’ améliorent. Elles ne prétendent ni être exhaustives, ni écarter d’autres contributions sur ce sujet,à condition qu’elles soient conformes aux objectifs et principes qui les sous-tendent.

6. Les Lignes directrices pourraient également s’appliquer aux processus dessystèmes de justice informelle et coutumiè re comme la justice réparatrice ainsi qu’à des domaines du droit autres que le droit pénal, notamment la garde, le divorce, l’adoption, la protection des enfants, la santé mentale, la nationalité, l’immigration et les réfugiés.

II. Considérations spéciales

7. Les Lignes directrices ont été développées :a) Sachant que des millions d’enfant s à travers le monde subissent un préjudice du fait de la criminalité et de l’abus de pouvoir, que leurs droits n’ont pas été adéquatement reconnus, et qu’ils risquent de connaître des épreuves supplémentaires lorsqu’ils aident le processus de justice ; b) Reconnaissant que les enfants sont vulnérables et requièrent une protection particulière adaptée à leur âge, leur degré de maturité et leurs besoins individuels particuliers ;

c) Reconnaissant que les filles sont particulièrement vulnérables et risquentd’être l’objet de discrimination à toutes les étapes du système de justice ;

d) Réaffirmant que tout doit êtrefait pour éviter la victimisation des enfants, notamment en appliquant les Principes directeurs applicables à la prévention du crime ;

e) Sachant que les enfants victimes et témoins risquent de connaître d’autres épreuves s’ils sont considérés à tort comme des délinquants alors qu’en réalité ils sont victimes et témoins ; f) Rappelant que la Convention relative aux droits de l’enfant énonce des exigences et des principes pour assurer la reconnaissance effective des droits des enfants et que la Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d’abus de pouvoir énonce des principes visant à donner aux victimes le droit à l’information, à la participation, à la protection, à la réparation et à l’assistance ; g) Rappelant les initiatives internationales et régionales, qui mettent en application les principes contenus dans la Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d’abus de pouvoir, comme le Manuel sur la justice pour les victimes et le Guide pour les responsables politiques, tous deux publiés par l’Office des Nations Unies pour le contrôle des drogues et la prévention du crime en 1999 ; h) Reconnaissant la contribution du Bureau international des droits des enfants aux travaux préparatoires à l’élaboration de lignes directrices en matière de justice pour les enfants victimes et témoins d’actes criminels ;

i) Considérant qu’une meilleure réponse aux enfants victimes et témoinsd’actes criminels peut mieux disposer le s enfants et leurs familles à divulguer des cas de victimisation et à participer au processus de justice ; j) Rappelant que la justice pour les enfants victimes et témoins d’actes criminels doit être garantie tout en préservant les droits des accusés ou des condamnés ; k) Ayant à l’esprit la diversité des systèmes et traditions juridiques, et notant que la criminalité est de plus en plus transnationale et qu’il est nécessaire d’assurer aux enfants victimes et témoins d’actes criminels une protection équivalente dans tous les pays.

III. Principes

8. Comme énoncé dans des instruments internationaux, en particulier laConvention relative aux droits de l’enfant dont les travaux du Comité des droits de l’enfant sont la traduction, et afin de garantir la justice pour les enfants victimes et témoins d’actes criminels, les professionnels et autres personnes responsables du bien-être de ces enfants doivent respecter les principes transversaux suivants :

a) Dignité. Tout enfant est un être humain unique et précieux et, à ce titre, sa dignité individuelle, ses besoins particuliers, ses intérêts et sa vie privée doivent être respectés et protégés ;

b) Non-discrimination. Tous les enfants ont le droit d’être traités de manière égale et équitable, indépendamment de leur race, de leur appartenance ethnique, de leur couleur, de leur sexe, deleur langue, de leur religion, de leurs opinions politiques ou autres, de leur origine nationale, ethnique ou sociale, de leur fortune, de leurs handicaps, de leur naissance ou de toute autre situation ou de ceux de leurs parents ou représentants légaux ;

c) Intérêt supérieur de l’enfant. Bien que les droits des accusés et des condamnés doivent être préservés, tout enfant a droit à ce que son intérêt supérieur soit pris en considération à titre prioritaire,ce qui comprend le droit à la protection et à la possibilité d’un développement harmonieux ;

i) Protection. Tout enfant a le droit à la vie, à la survie et à être protégé contre toute forme d’épreuve, de sévices ou de négligence, y compris les sévices et négligences physiques, psychologiques, mentaux ou émotionnels ;

ii) Développement harmonieux. Tout enfant a le droit d’avoir la possibilité d’un développement harmonieux et le droit à un niveau de vie suffisant pour sa croissance physique, mentale, spirituelle, morale et sociale. Lorsqu’un enfant a été traumatisé, tout devrait être mis en œuvre pour lui permettre de se développer sainement ;

d) Droit à la participation. Tout enfant a le droit, sous réserve du droit procédural national, d’exprimer, librement et dans ses propres mots, ses points de vue, opinions et convictions, et de contribuer en particulier aux décisions qui affectent sa vie, notamment celles prises lors du processus judiciaire. Il a également le droit à ce que ces vues soient prises en considération en fonction de ses aptitudes, de son âge, de sa maturité intellectuelle et de l’évolution de ses capacités.

IV. Définitions

9. Les définitions suivantes s’appliquentdans l’ensemble de s présentes Lignes directrices : a) Le terme « enfants victimes et témoins » désigne les enfants et adolescents âgés de moins de 18 ans qui sont victimes ou témoins d’actes criminels, indépendamment de leur rôle dans l’infraction ou dans la poursuite du délinquant ou des groupes de délinquants présumés ; b) Le terme « professionnels » désigne les personnes qui, dans le cadre de leur travail, sont en contact avec des enfants victimes et témoins d’actes criminels ou sont chargés de répondre aux besoins des enfants dans le système de justice, et auxquels les présentes Lignes directrices s’appliquent. Il s’agit, sans que la liste soit exhaustive, des personnes suivantes : défenseurs des enfants et des victimes et personnes de soutien ; praticiens des services de protection des enfants ; personnel des organismes responsables du bien-être de l’enfant ; procureurs et, le cas échéant, avocats de la défense ; personnel diplomatique et consulaire ; personnel des programmes contre la violence familiale ; juges ; personnel des tribunaux ; agents des services de détection et de répression ; professionnels de la santé physique et mentale ; et travailleurs sociaux ;

c) Le terme « processus de justice » désigne la détection des actescriminels, le dépôt de la plainte, l’enquête, les poursuites et les procédures de jugement et d’après-jugement, que l’affaire soit traitée dans un système de justice pénale national, international ou régional, ou dans un système de justice pour adultes ou pour mineurs, ou encore dans un système de justice informelle ou coutumière ;

d) Le terme « adapté à l’enfant » désigne une approche éq uilibrée du droit à la protection et tenant compte des besoins et points de vue individuels de l’enfant.

V. Droit d’être traité avec dignité et compassion

10. Les enfants victimes et témoins devraient être traités avec sensibilité et bienveillance tout au long du processus de justice, en prenant en compte leur situation individuelle, leurs besoins immédiats, leur âge, sexe ou handicaps ainsi que leur degré de maturité et en respectant totalement leur intégrité physique, mentale et morale.

11. Tout enfant devrait être traité comme un individu ayant des besoins, dessouhaits et des sentiments qui lui sont propres.

12. L’ingérence dans la vie privée de l’enfant devrait être limitée au strictminimum, étant entendu que des normes élevées doivent être maintenues pour la collecte de preuves, afin d’assurer une issue juste et équitable du processus de justice.

13. Afin d’éviter à l’enfant des épreuves supplémentaires, les entrevues, examenset autres formes d’enquête devraient être conduits par des professionnels formés à cet effet et menés avec sensibilité, respect et de manière approfondie.

14. Toutes les interactions décrites dansles présentes Lignes directrices devraient être menées d’une manière adaptée à l’enfant et dans un environnement approprié tenant compte de ses besoins particuliers, en fonction de ses aptitudes, de son âge, de sa maturité intellectuelle et de l’évolution de ses capacités. Elles devraient également se dérouler dans un langage que l’enfant utilise et comprend.

VI. Droit d’être protégécontre la discrimination

15. Les enfants victimes et témoins devraient avoir accès à un processus de justice qui les protège contre toute discrimination fondée sur leur race, leur couleur, leur sexe, leur langue, leur religion, leurs opinions politiques ou autres ou leurs origines nationales, ethniques ou sociales, leur fortune, leurs handicaps, leur naissance ou autre situation ou sur ceux de leurs parents ou représentants légaux.

16. Le processus de justice et les services de soutien disponibles pour les enfantsvictimes et témoins et leurs familles devrai ent être adaptés à l’âge, aux souhaits, à la faculté de compréhension, au sexe, à l’orientation sexuelle, au milieu ethnique, culturel, religieux, linguistique et social, à la caste, à la situation socioéconomique et au statut d’immigrant ou de réfugié de l’enfant, ainsi qu’à ses besoins particuliers, y compris ceux qui touchent sa santé, ses aptitudes et ses capacités. Les professionnels devraient être sensibilisés à ces différences et formés pour s’y adapter.

17. Dans certains cas, il sera nécessaire d’instituer une protection et des services spécialisés pour tenir compte du sexe de l’enfant et de la spécificité de certaines infractions commises contre lui, telles que les agressions sexuelles.

18. L’âge ne devrait pas constituer un obstacle au droit d’un enfant de participer pleinement au processus de justice. Tout enfant devrait, sous réserve d’un examen, être traité comme étant apteà témoigner et son témoignage ne devrait pas être présumé irrecevable ou non fiable du seul fait de son âge, dès lors que son âge et sa maturité lui permettent de témoigner de manière intelligible et crédible, avec ou sans l’assistance d’aides à la communication ou autre assistance.

VII. Droit d’être informé

19. Dès le premier contact avec le processus de justice et tout au long de celui-ci, les enfants victimes et témoins, leurs parents ou tuteurs et représentants légaux devraient, dans la mesure où cela est possible et opportun, être dûment et rapidement informés, notamment : a) De l’existence de services sanitaires, psychologiques, sociaux et autres services pertinents ainsi que des moyens leur permettant de bénéficier de ces services et, parallèlement de conseils ou d’une représentation juridiques ou autres, d’une indemnisation ou d’une aide financière d’urgence, le cas échéant ; b) Des façons de procéder du système de justice pénale pour adultes et mineurs, notamment du rôle des enfants victimes et témoins, de l’importance, du moment et des modalités du témoignage, de même que des façons dont « l’interrogatoire » sera mené, pendant l’enquête et le procès ;

c) Des mécanismes de soutien à l’enfant existants lorsque celui-ci déposeune plainte et participe à l’enquête et à la procédure judiciaire ;

d) Des lieux et moments précis des audiences et d’autre événementpertinent ; e) De l’existence de mesures de protection ; f) Des mécanismes existants de réexamen des décisions concernant les enfants victimes et témoins ; g) Des droits pertinents concernant les enfants victimes et témoins en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant et de la Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d’abus de pouvoir.

20. En outre, les enfants victimes, leurs parents ou tuteurs et représentants légaux devraient, dans la mesure où cela est possible et opportun, être dûment et rapidement informés : a) De l’évolution et de l’aboutissement de l’affaire les concernant, y compris l’appréhension, l’arrestation, la détention de l’accusé et tout changement pouvant intervenir à cet égard, ainsi que de la décision du procureur, des développements pertinents, après le procès et de l’issue de l’affaire ; b) Des possibilités d’obtenir réparation du délinquant ou de l’État, par le biais du processus de justice, d’actions alternatives au civil ou par d’autres moyens.

VIII. Droit d’être entendu etd’exprimer ses opinions et ses préoccupations

21. Les professionnels devraient tout faire pour permettre aux enfants victimes ettémoins d’exprimer leurs opinions et leurs préoccupations concernant leur participation au processus de justice, y compris : a) En s’assurant que les enfants victimes et, le cas échéant, témoins soient consultés sur les questions mentionnées au paragraphe 19 ci-dessus ; b) En s’assurant que les enfants victimes et témoins puissent, librement et à leur manière, exprimer leurs opinions et leurs préoccupations quant à leur participation au processus de justice et faire part de leurs préoccupations concernant leur sécurité par rapport à l’accusé, de leur préférence sur la façon de témoigner ainsi que de leurs sentiments concernant l’issue du processus ;

c) En prenant dûment en considération les opinions et les préoccupations del’enfant et, s’il ne leur est pas possible d’y répondre, en expliquer les raisons à l’enfant.

IX. Droit à une assistance efficace

22. Les enfants victimes et témoins et, le cas échéant, les membres de leursfamilles devraient avoir accès à une assist ance fournie par des professionnels ayant reçu une formation adéquate, telle que décrite aux paragraphes 40 à 42 ci-dessous, et pouvant comprendre des services d’assistance financière et juridique, des conseils, des services de santé, d’aide sociale et éducative, de réadaptation physique et psychologique ainsi que d’autres services nécessaires à la réinsertion de l’enfant.

Cette assistance devrait répondre aux besoins de l’enfant et lui permettre de participer efficacement à toutes les étapes du processus de justice.

23. Les professionnels qui aident les enfants victimes et témoins devraient toutfaire pour coordonner leur travail afin de limiter le nombre d’interventions à l’égard de l’enfant.

24. Les enfants victimes et témoins devraient, dès le dépôt du rapport initial et pour tout le temps nécessaire, recevoir l’aide de personnes de soutien comme les spécialistes des questions relatives aux enfants victimes et/ou témoins.

25. Les professionnels devraient développer et applique r des mesures facilitant le témoignage des enfants, pour améliorer la communication et la compréhension, autant avant le procès qu’aux différentes étapes de ce dernier, ce qui nécessite entre autres :

a) Que les spécialistes des questionsrelatives aux enfants victimes et témoins répondent aux besoins particuliers de l’enfant ; b) Que les personnes de soutien, y compris les spécialistes et les membres appropriés de la famille de l’enfant, accompagnent celui-ci pendant son témoignage ; c) Que des gardiens ad litem soient nommés, le cas échéant, pour protéger les intérêts juridiques de l’enfant.

X. Droit à la vie privée

26. La protection de la vie privée des enfants victimes et témoins devrait être une question prioritaire.

27. Les informations relatives à la participation de l’enfant au processus de justicedevrait être protégées. Pour cela, il faut respecter la confidentialité et limiter la divulgation d’informations qui pourraient mener à l’identification d’un enfant victime ou témoin participant au processus de justice.

28. Des mesures devraient être prises pour éviter aux enfants d’être trop mis en contact avec le public, par exemple en excluant le public et les médias de la salle d’audience pendant que l’enfant témoigne, lorsque le droit national l’autorise.

XI. Droit d’être protégé contre des épreuves pendant le processus de justice

29. Les professionnels devraient prendredes mesures pour éviter des épreuves aux enfants victimes et témoins lors de la détection, de l’enquête et des poursuites, afin que leur intérêt supérieur et leur dignité soient respectés.

30. Les professionnels devraient faire preuve de sensibilité dans leurs rapports avec les enfants victimes et témoins, afin de : a) Fournir un soutien aux enfants victimes et témoins, y compris en les accompagnant dans tout le processus de justice lorsque cela est dans leur intérêt supérieur ; b) Donner aux enfants victimes et témoins un maximum de certitude, en leur indiquant clairement ce qu’ils peuvent attendre du processus. La participation de l’enfant aux audiences et au procès devrait être planifiée à l’avance et tout devrait être fait pour assurer la continuité dans les relations entre les enfants et les professionnels qui sont en contact avec eux pendant tout le processus ;

c) S’assurer que les procès se tiennent dès que cela est matériellement possible, à moins que des délais ne soient dans l’intérêt supérieur de l’enfant. Les enquêtes sur les infractions dans lesquelles des enfants sont victimes et témoins devraient être accélérées et il devrait y avoir des procédures, des lois et des règles procédurales permettant d’accélérer les affaires impliquant des enfants victimes et témoins ;

d) Procéder d’une manière adaptée aux enfants, par exemple, en utilisant des salles d’entrevue prévues pour eux, en fournissant, en un même lieu, des services interdisciplinaires pour enfants victimes, en modifiant l’environnement des cours de justice pour tenir compte des enfants témoins, en ménageant des pauses pendant le témoignage de l’enfant, en tenant les audiences à des heures raisonnables pour l’enfant eu égard à son âge et à son degré de maturité, en utilisant un système de notification approprié pour que l’enfant n’ait à se présenter devant le tribunal que lorsque cela est nécessaire et en prenant d’autres mesures appropriées pour faciliter le témoignage de l’enfant.

31. Les professionnels devraient aussi appliquer des mesures :

a) Pour limiter le nombre d’entrevues : il faudrait mettre en œuvre des procédures spéciales pour recueillir des éléments de preuve auprès des enfants victimes et témoins afin de réduire lenombre d’entrevues, de déclarations, d’audiences et, en particulier, les contacts inutiles avec le processus de justice, par exemple en recourant à des enregistrements vidéo ; b) Pour faire en sorte que les enfants victimes et témoins ne soient pas soumis, si cela est compatible avec le système juridique et conforme aux droits de la défense, à un contre-interrogatoire menépar l’auteur présumé de l’infraction : lorsque cela est nécessaire, on devrait procéder aux entrevues et interrogatoires des enfants victimes et témoins sans que l’auteur présumé de l’infraction puisse les voir, et des salles d’attente et d’entrevue séparées devraient être aménagées à cet effet ;

c) Pour faire en sorte que les enfants victimes et témoins soient interrogésd’une façon qui leur soit adaptée et perm ettre qu’une supervision soit exercée par les juges, pour faciliter le témoignage etréduire les possibilités d’intimidation, par exemple en utilisant des aides au témoignage ou en désignant des psychologues spécialisés.

XII. Droit à la sécurité

32. Lorsque la sécurité d’un enfant victime ou témoin risque d’être menacée, des mesures appropriées devraient être prises pour que les autorités compétentes soient informées d’un tel risque et pour en protéger l’enfant avant, pendant et après le processus de justice.

33. Il faudrait que les professionnels qui entrent en contact avec les enfants soienttenus d’informer les autorités compétentes s’ils soupçonnent qu’un préjudice a été causé, est causé ou pourrait être causé à un enfant victime ou témoin.

34. Les professionnels devraient êtreformés pour reconnaître et prévenir les intimidations, menaces et préjudices dont les enfants victimes et témoins peuvent être l’objet. Lorsque c’est le cas, des mesures appropriées devraient être mises en place pour garantir la sécurité de l’enfant. De telles mesures de protection pourraient inclure les éléments suivants : a) Éviter, pendant tout le processus de justice, un contact direct entre les enfants victimes et témoins et les auteurs présumés des infractions ; b) Utiliser des ordonnances restrictives du tribunal et les faire inscrire dans un registre ;

c) Ordonner la détention préventive des accusés et imposer des conditionsinterdisant tout contact pour la mise en liberté conditionnelle ;

d) Placer l’accusé en résidence surveillée ;e) Faire protéger les enfants victimes et témoins par la police ou par tout autre organisme compétent, lorsque c’est possible et s’il y a lieu, et ne pas divulguer l’endroit où ils se trouvent.

XIII. Droit à réparation

35. Les enfants victimes devraient, lorsque c’est possible, obtenir réparation pourpermettre le rétablissement de la situ ation antérieure, la réinsertion et la réadaptation. Les procédures pour obtenir réparation et en exiger l’application devraient être adaptées aux enfants et leur être facilement accessibles.

36. Pour autant que les procédures soient adaptées aux enfants et respectent lesprésentes Lignes directrices, il faudrait encourager des poursuites jumelées au pénal et en réparation ainsi que des poursuites dans le cadre de la justice informelle ou communautaire comme la justice réparatrice.

37. Les mesures de réparation peuventcomprendre : une compensation ordonnée par le tribunal pénal au délinquant, une aide des programmes d’indemnisation des victimes administrés par l’État et le paiement de dommages et intérêts ordonnés par un tribunal civil. Lorsque cela est possible, la question des coûts de la réinsertion sociale et éducative, des traitements médicaux, des soins de santé mentale et des services juridiques devrait également être abordée. Des procédures devraient être instituées pour permettre l’exécution des ordonnances de réparation et le paiement des réparations, sous peine d’amendes.

XIV. Droit de bénéficier demesures préventives spéciales

38. Outre les mesures préventives qui devraient être mises en place pour tous lesenfants, des stratégies spéciales sont requises pour les enfants victimes et témoins qui sont particulièrement exposés à une nouvelle victimisation ou de nouvelles infractions.

39. Les professionnels devraient développeret mettre en application des stratégies et des interventions globales spécialement conçues pour les cas d’enfants qui risquent d’être de nouveau victimes. Ces stratégies et interventions devraient prendre en compte la nature de la victimisation, y compris lorsqu’il s’agit de sévices dans la famille ou en institution,d’exploitation sexue lle et de trafic d’enfants. Ces stratégies peuvent comprendre celles dont l’État, les quartiers ou les citoyens prennent l’initiative.

XV. Mise en application

40. Une formation, une éducation et une information adéquates devraient êtredonnées aux professionnels qui s’occupent d’ enfants victimes et témoins pour qu’ils améliorent de façon durable leurs méthodes, leur approche et leurs attitudes spécifiques afin que les enfants soient protégés et traités efficacement et avec sensibilité.

41. Les professionnels devraient être formés de manière à protéger efficacementles enfants victimes et témoins et à répondre à leurs besoins, y compris dans des unités et services spécialisés.

42. La formation devrait porter sur :a) Les normes, règles et principes pertinents relatifs aux droits de la personne, y compris les droits de l’enfant ; b) Les principes et devoirs éthiques de leur fonction ;

c) Les signes et les symptômes de la commission d’actes criminels contredes enfants ;

d) Les compétences et techniques d’évaluation de crise, particulièrementpour les renvois de cas, l’accent étant mis sur le besoin de confidentialité ;

e) L’impact, les conséquences, y compris les séquelles physiques et psychologiques, et les traumatismes que des actes criminels ont sur les enfants ; f) Les mesures et techniques spéciales pour aider les enfants victimes et témoins dans le processus de justice ; g) Les questions linguistiques, religieuses, sociales et propres à l’un et l’autre sexe, en tenant compte des différentes cultures et de l’âge ; h) Les compétences requises pour la communication adulte-enfant ;

i) Les techniques d’entrevue et d’évaluation qui soient le moinstraumatisantes possible pour l’enfant, tout en optimisant la qualité de l’information fournie par ce dernier ; j) Les compétences nécessaires pourtravailler de manière sensible, compréhensive, constructive et rassurante avec les enfants victimes et témoins ; k) Les méthodes permettant de protéger, de présenter des preuves et d’interroger les enfants témoins ;

l) Le rôle des professionnels et les méthodes à utiliser lorsqu’ils travaillent avec des enfants victimes et témoins.

43. Les professionnels devraient tout faire pour adopter une approcheinterdisciplinaire et coopérative pour aider les enfants, en se familiarisant avec la large gamme des services disponibles tels que : soutien et conseil aux victimes, défense des droits des victimes, assistance économique, services éducatifs, sanitaires, juridiques et sociaux. Cette approche peut inclure l’utilisation de protocoles pour les différentes étapes du processus de justice, de manière à encourager la coopération entre les entités qui offrent des services aux enfants victimes et témoins. Elle peut aussi inclure d’autres formes de travail multidisciplinaire entre les personnels intervenant dans le même lieu : policiers, procureur, psychologues et personnel des services médicaux et sociaux.

44. Il faudrait améliorer la coopération internationale entre les États et tous les secteurs de la société, aussi bien au niveau national qu’international, y compris par une entraide en vue de faciliter la collecte et l’échange d’informations ainsi que la détection, les enquêtes et la poursuite des actes criminels transnationaux impliquant des enfants victimes et témoins.

45. Les professionnels devraient envisager de se baser sur les présentes Lignes directrices pour élaborer des lois et des politiques, des règles et protocoles écrits visant à aider les enfants victimes et témoins participant au processus de justice.

46. Les professionnels devraient pouvoir, avec d’autres organismes participant au processus de justice, revoir et évaluer périodiquement leur rôle dans le but d’assurer la protection des droits de l’enfant et l’application efficace des présentes Lignes directrices.

36e séance plénière 22 juillet 2005

Français
Portée: 
Date : 
Mardi, Novembre 25, 2014 - 18:15

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