CRINMAIL 123 : Les CRINlympics

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17 août 2012, issue 123 voir en ligne | inscrivez-vous | contribuez

CRINMAIL 123:
CRINlympics

 

Dans cette édition :

Les CRINlympics

Après deux semaines chargées en natation, cyclisme, course, lutte, saut et autre, les jeux olympiques de l'été 2012 à Londres ont finalement pris fin dans un long concert musical. Plus de 10 000 athlètes provenant de 205 pays se sont affrontés pour les médailles si convoitées d'or, d'argent et de bronze. Ils ont partagé leurs diverses cultures, idéologies et classements en matière de droits de l'homme sans mentionner les drapeaux colorés et les hymnes nationales à moitié murmurées. Maintenant que nous avons le temps de prendre une courte pause avant les jeux paralympiques, il est temps que les épreuves des droits de l'enfant commencent.

Bienvenue aux CRINlympics.

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es règles des jeux

Comme commentateur officiel, CRIN jugera les performances des états par rapport à leur respect pour les droits de l'enfant. Bien que le CRINlympics n'attribue pas de médaille, les bonnes conduites seront certifiées par le tampon d'approbation de CRIN, tandis que les mauvais comportements seront mis sous les durs projecteurs de CRIN. Le dossier des droits de l'enfant de chaque État sera mesuré par rapport aux 10 critères de référence suivants dans les domaines du droit international, les rapports des Nations unies, les mécanismes de protection nationaux, et des campagnes de CRIN :

  • les signataires du protocole facultatif à la Convention des droits de l'enfant mettant en place un mécanisme de plaintes ;
  •  la ratification des deux autres protocoles facultatifs relatifs au droits l'enfant dans les conflits armés et à la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ;
  • la création et la nomination d'un défenseur des droits de l'enfant ; 
  • les rapports de l'État soumis au Comité des droits de l'enfant ; 
  • l'interdiction des châtiments corporels des enfants dans tous les milieux ; 
  • l'abolition des sentences inhumaines à l'encontre des enfants ; 
  • abaissement ou proposition d'abaisser l'âge minimum de responsabilité pénale à moins de 18 ans ; 
  • la liste de la honte sur les enfants et les conflits armés du Secrétaire général des Nations unies ; 
  • l'indice de liberté de la presse de Reporters sans frontières ; 
  • nouvelle loi, projet de loi ou lois nationales existantes qui touchent aux droits de l'enfant. 

 

Des records battus

Des records ont été battus dès le début des jeux olympiques, avec l'équipe féminine de la Corée du Sud de tir à l'arc arrivée en tête du tableau des médailles de tous les temps avec 30 apparitions sur le podium depuis 1972.
Même si ces archers ont touché la cible, l'État est encore loin du but quand il s'agit de châtiments corporels à l'encontre des enfants, qui ne sont interdits ni à la maison ni à l'école ni dans les établissements pénitentiaires et les établissements de soins alternatifs. Le ministère de la justice a également proposé d'abaisser l'âge minimum de responsabilité pénale d'un âge déjà très bas, 12 ans, à un âge encore plus bas, 10 ans.

L'Australie a battu le record olympique de 100 m en haies féminin, mais le pays continu par contre de violer le droit international quand il traite les enfants non accompagnés qui arrivent sur ses côtes comme des adultes et les détient illégalement pendant de longues périodes - jusqu'à 948 jours selon le dernier rapport.

Félicitations au Kenya pour avoir battu des records mondiaux dans des disciplines plus convoitées, cette fois dans la course masculine des 800 m. Félicitations aussi pour avoir interdit les châtiments corporels à l'encontre des enfants dans tous les milieux, y compris à la maison, et pour le grand pas fait en matière de droit de la femme en criminalisant les mutilations génitales féminines - Go Kenya ! Cependant, le Kenya n'obtient pas la médaille d'or parce que, bien que la prison à vie soit interdite pour les enfants, ces derniers peuvent encore être détenus « au plaisir du Président », comme alternative à la peine de mort.

L'Argentine a saisi notre attention à Wimbledon au cours d'une interminable demi-finale qui a duré 4 heures et 26 minutes, en faisant le match de tennis le plus long dans l'histoire olympique. Aussi interminable était l'attente des condamnations prononcées contre d'anciens hauts responsable de l’appareil sécuritaire en juillet pour avoir volé des dizaines de bébés de prisonniers politiques de gauche pendant la « guerre sale » du pays. Près de 500 bébés auraient été volé au cours de cette période.

 

La voile navigue, mais s'écrase

Lorsque le temps est venu pour la cérémonie de victoire, les gagnantes espagnoles de la médaille d'or de voile ont eu la vie facile ; elle n'avait pas à s'inquiéter de se rappeler des paroles de leur hymne nationale sans parole ! Mais le gouvernement, d'autre part, semble avoir oublié le problème de la pauvreté des enfants en entassant les mesures d'austérité. En effet, l'Unicef a souligné que l'Espagne a le taux le plus élevé de pauvreté des enfants de tous les 17 pays de la zone euro.

Pendant ce temps, le Mexique a surpris le monde dans le football masculin, en battant le Brésil 2 à 1. Mais l'arbitre de CRIN affirme qu'une seule médaille d'or est plus que l'État ne mérite pour son incapacité à inclure la société civile dans la rédaction d'un projet de loi sur la protection des enfants, qui a d'ailleurs été critiqué parce que ces dispositions ne reflètent pas tous les droits énoncés dans la Convention et ne définissent pas les obligations spécifiques de l'État. Mais une chose est sûre, si la guerre contre la drogue continue, la mort des enfants continuera aussi, avec plus de 1000 jeunes vies déjà revendiquées en l'espace de six ans.

Dans un registre plus positif, l'Allemagne a remporté 11 médailles d'or venant ainsi en sixième position sur le tableau des médailles. L'Allemagne reçoit aussi une approbation en or certifiée par CRIN après la décision de la cour du district de Cologne interdisant la circoncision masculine rituelle qui, elle, provoque des lésions corporelles inutiles. La cour crée ainsi un précédent important pour les droits de l'enfant pour d'autres pays à suivre.

 

Déception sur et en dehors de la piste

Le Tadjikistan doit sûrement être déçu de n'avoir reçu qu'une médaille de bronze, mais pas autant que CRIN n’est déçu de la forte tendance du pays à réprimer la liberté de religion après avoir interdit aux enfants de prier dans les mosquées ou d'adhérer à des associations religieuses. Pendant ce temps, l'Ouzbékistan voisin est peut-être arrivé en première position dans la compétition masculine de lutte des 120 kg, mais son bilan concernant le travail des enfants est loin d'une performance de première classe dans le respect des droits de l'enfant.

Avec seulement une médaille d'argent remportée, l'Égypte doit être déçue par sa position dans le classement des médailles. CRIN est également déçu par le récent projet de loi qui vise à baisser l’âge minimum de mariage pour les filles de 18 à seulement 14 ans, ainsi que la proposition visant à annuler l'interdiction faite en 2008 des mutilations génitales féminines. En plus, les O.N.G. devront faire face à des restrictions sévères sur leur travail si le projet de loi sur les O.N.G. est approuvé. La loi interdirait aux organisations d'obtenir des financements étrangers et de travailler sur les questions considérées comme une menace à la souveraineté de l'État.

Aucune médaille n'est attribuée à Israël pour sa piètre performance dans et en dehors des jeux. Bien que le pays ne figure pas sur la liste de la honte des enfants et les conflits armés du Secrétaire général, le rapport souligne que 20 enfants palestiniens ont été tués en 2011 pendant la situation de conflit qui prévaut, tandis que 448 ont été blessés.
Pendant ce temps, le système juridique actuel en Israël est loin de respecter les droits des enfants. Pire encore, il consacre une discrimination raciale systématique, abaissant encore plus l'âge minimum pour les peines privatives de liberté, de 14 ans pour les enfants israéliens à l’âge honteux de 12 ans pour les enfants palestiniens dans les tribunaux militaires.

 

Cri pour le changement

L'Iran a gagné six de ses 12 médailles en lutte, pendant que l'ONU et les institutions de droits de l'homme à travers le monde continu leur lutte avec les législateurs du pays afin d'imposer un moratoire sur la peine de mort ; au moins trois mineurs ont ét exécutés en 2011. L'emprisonnement à vie et les sentences de châtiments corporels pour les mineurs sont également légaux dans le pays.

Montrant sa capacité à soulever de lourdes charges, le Kazakhstan a remporté quatre médailles d'or dans la compétition d'haltérophilie. Mais l'État porte aussi de lourdes charges quand il s'agit de la justice pour mineurs, les comités de l'ONU ayant mis en évidence le manque de juges spécialisés et de tribunaux pour mineurs dans tout le pays, ainsi que la prévalence de mauvais traitements subis par les mineurs lors de l'interrogatoire et de la détention. Le Tonga porte lui aussi de lourdes charges puisqu'il n'a pas encore soumis de rapports au Comité des droits de l'enfant, en dépit de la ratification de la Convention en 1995.

Avec toutes ces médailles remportées dans les épreuves sur piste, la Jamaïque continue de s'affirmer comme une nation de coureurs plus rapides que la foudre ; le pays peut également être en tête parmi ses voisins des Caraïbes quand il s'agit de la lutte contre les châtiments corporels des enfants. En outre, les membres de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) ont récemment pris un engagement d'abolir les châtiments corporels dans les écoles. Mais, avec aucun état des Caraïbes à avoir encore une interdiction totale des châtiments corporels dans tous les milieux, lequel va atteindre la ligne d'arrivée en premier ? Jusqu'à présent, Curaçao, un territoire des Caraïbes au sein du royaume des Pays-Bas, est à la tête.

Nous aimerions également voir une course des Caraïbes visant à interdire l'emprisonnement à vie des enfants. Au moins neuf états de la région prévoient la réclusion à perpétuité, tandis qu'au moins sept ont mis en place des peines à perpétuité pour les enfants en lieu et place de la peine de mort. Pour plus de détails, lisez le rapport de CRIN sur les peines de prison à vie pour les enfants dans les états du Commonwealth (en anglais).

 

Se souvenir de ceux qui ont perdu

L’hymne national de l'État le plus jeune au monde, « Sud Soudan Hourra ! » n'a pas été entendu lors des jeux olympiques ; le pays ne dispose pas d'un comité national olympique et n'est donc pas enregistré aux jeux olympiques. Mais CRIN lance un Hourra pour acclamer le pays qui, en dépit d'être le plus jeune au monde, est deven le troisième pays africain à interdire les châtiments corporels des enfants dans tous les milieux. L'étape suivante consiste à ratifier la convention et ses trois protocoles facultatifs.

Certains pays n’ont gagné aucune médaille, bien que nous sympathisons avec certains, nous sommes indifférents à l'égard d'autres états comme les états du Pacifique de Kiribati et de Tuvalu, parce qu’ils n'ont pas établi de défenseur des droits de l'enfant, n'ont pas aboli l'emprisonnement à vie et les peines de châtiment corporel pour mineurs et n’ont ratifié aucun des protocoles facultatifs à la Convention.

La Syrie n'a pas été comblée de médailles non plus mais, par contre, a été bombardée de condamnations pour son offensive continue contre les civils. Le pays figure pour la première fois sur la liste de la honte sur les enfants et les conflits armés du Secrétaire général pour avoir tué, mutilé, arrêtés , détenus de façon arbitraire et torturés des enfants. Plus de 2000 enfants auraient été tués depuis mars 2011. Sans surprise, le pays est également sur le point de devenir l'un des trois états les plus répressifs en matière de liberté de presse, selo Reporters sans frontières.

Les résultats du Panama déçoivent tout aussi sur le tableau des médailles que dans le domaine de la justice pour mineurs. Il est l'un des deux pays à avoir récemmen baissé l'âge minimum de responsabilité pénale, avec la Géorgie, de 14 à 12 ans. Aucun des deux pays n'est signataire du protocole facultatif établissant un mécanisme de plaintes pour les enfants. Il en est de même pour les Philippines qui ont un projet de loi qui propose de baisser l'âge minimum de responsabilité pénale de 15 à 12 ans. La proposition marque un recul par rapport à 2006, date à laquelle l'âge minimum a été levé de neuf à 15 ans.

 

Un changement positif ?

En dépit d'avoir fait ses débuts olympiques à Munich en 1972, il a fallu à l'Arabie Saoudite 40 ans de plus pour permettre aux athlètes féminines de participer aux jeux. Le pays a fini par gagner une médaille pour les performances de son équipe équestre, mais il serait bon de voir les réformes en matière de droits de la femme progresser à un rythme plus rapide.

L'Afrique du Sud peut être félicité pour avoir remporté six médailles aux jeux, mais le pays recevrait un concert d'éloges s'il interdisait les châtiments corporels des enfants à la maison. Nous espérons que l'examen de la loi pour les enfants en cours actuellement introduise cette interdiction.

Il est sans importance que les Comores aient échoué a remporté des médailles aux jeux, car le pays a avancé de 25 places au classement de l'an dernier de la liberté de la presse ! Malgré cela, l'État n'a pas encore ratifié le protocole facultatif concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés n interdits les châtiments corporels des enfants dans tous les milieux.

 

Les grands joueurs

Comme on s'y attendait, les géants de sport que sont la Chine et la Russie ont été parmi les plus grands gagnants de médailles, terminant en deuxième et quatrième position respectivement dans le tableau des médailles. Pendant la deuxième semaine des jeux olympiques, les équipes des deux pays ont sécurisé leur titre des deux premiers dans la compétition de natation synchronisée. Mais la synchronisation ne se termine pas dans la piscine, les deux états sont également synchronisés dans leur tolérance pour la poursuite des atrocités en Syrie, ainsi que la suppression des droits de leurs propres citoyens à la liberté d'expression.

Reporters sans frontières classent la Russie en 142e position de liberté de la presse, l'État ayant remplacé la règle de droit par la règle de l'impunité pour ceux qui assassinent ou attaquent des journalistes. La Chine, quant à elle, occupe la 164e position étant le pays où la plupart de ses journalistes, blogueur et cyberdissidents sont en prison.

La Russie est également coupable d'avoir passé une série de lois répressives l'année dernière, y compris celle qui qualifie les O.N.G. financées à l'étranger comme des «agents étrangers » leur imposant des restrictions plus sévères si elles souhaitent opérer, une loi anti protestation qui augmente les amendes contre les participants aux protestations, et un projet de loi qui vise à interdire la propagation de la « propagande homosexuelle » pour les enfants. Comme on pouvait s'y attendre, la Russie a refusé d'autoriser la mise en place d'une maison de fierté olympique dans les jeux d'hiver de 2014 à Sotchi pour les athlètes ouvertement homosexuels, décrivant la présence d'une telle structure comme « extrémistes ».

L'Ukraine, la Moldavie et la Lituanie suivent le pas homophobe de la Russie.

Les États-Unis sont repartis avec des sacs pleins de médailles, dont 46 médailles en or, mais les États-Unis gardent toujours une pagaïe dans leur poche arrière pour les enfants qui se comportent mal à l'école. Ils ont occupé les première et deuxième positions au triple saut chez les hommes, mais ils feraient mieux de tripler la vitesse à laquelle les châtiments corporels des enfants sont interdits. Alors que certains états ont déjà interdit le châtiment corporel dans les écoles et dans les établissements pénitentiaires, au niveau fédéral, il est encore légal à la maison, à l'école, dans le système pénal et les établissements de soins alternatifs.

Et enfin, la Grande-Bretagne, pays hôte des jeux de 2012, a remporté 65 médailles, dont 11 en or en cyclisme et à l'aviron, arrivant en troisième position sur le tableau des médailles. Il y eu, cependant, une situation embarrassante (mais comique !) ou les drapeaux des deux Corée ont été confondus au début des jeux, mais les organisateurs ont assuré qu'il ne serait pas soumis à la « détention au bon plaisir de Sa Majesté ». Par contre, plus de 300 mineurs délinquants ont été soumis à la détention «au bon plaisir de Sa Majesté » ou autres peines de longue durée en 2011.

CRIN tient à souligner que le CRINlympics a été fait dans l'esprit des jeux olympiques de l'été 2012. Nous ne cherchons pas être exacts dans notre analyse sportive, mais profitons de cette occasion pour mettre en évidence certains aspects de notre travail.

 

Rendez-vous au prochain CRINlympics en 2016 !

 

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