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RAMALLAH, 5 June 2007 (IRIN) - L’association de défense des droits humains Amnesty International a déclaré lundi que les restrictions imposées par Israël sur la circulation des populations de Cisjordanie entravaient fortement l’accès des Palestiniens aux services de santé, provoquant de nombreux décès. Israël soumet les 2,5 millions de Palestiniens qui vivent en Cisjordanie à des contrôles par le biais d’un réseau de plus de 500 postes de contrôle et barrages routiers, et d’une barrière de séparation de 700 kilomètres de long, qui englobe 10 pour cent du territoire cisjordanien du côté israélien. Amnesty a communiqué une liste de Palestiniens décédés, selon l’association, en raison des contretemps occasionnés aux postes de contrôle ou qui ont été abattus par des soldats postés aux barrières ; l’association a appelé Israël à démolir les barrières dressées en Cisjordanie même, et à lever les restrictions imposées aux postes de contrôle. Selon Shlomo Dror, le porte-parole des autorités israéliennes, ces mesures sont essentielles pour protéger les civils israéliens. « Elles permettent de réduire les actes de terrorisme à l’encontre des civils israéliens. Nous savons qu’elles ne sont pas pratiques pour les Palestiniens. Mais ma vie compte plus que la qualité de vie des Palestiniens. S’ils décident de nous attaquer, ils doivent savoir qu’il y a des conséquences », a déclaré M. Dror. Le rapport d’Amnesty, intitulé "Enduring Occupation: Palestinians under siege in the West Bank" [Une occupation persistante : les Palestiniens de Cisjordanie en état de siège], marque 40 ans d’occupation militaire ; Amnesty y révèle que les postes de contrôle et la barrière de séparation serviraient en fait à protéger les colonies israéliennes de Cisjordanie, qui abritent 450 000 colons, et sont illégales au regard de la loi internationale. « Les Palestiniens qui vivent en Cisjordanie sont arrêtés à tous les coins de rue. Il ne s’agit pas seulement d’une gêne – cela peut être aussi une question de vie ou de mort », explique Malcolm Smart, directeur du programme d’Amnesty International au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. « Il est inadmissible qu’on oblige des femmes en train d’accoucher, des enfants malades ou des victimes d’accidents en route vers l’hôpital à faire de longs détours et à subir des retards qui peuvent leur coûter la vie », a-t-il estimé. « Une situation humanitaire inutile » Liz Sime, directrice pays de CARE International, a expliqué à IRIN que la barrière de séparation et les barrages routiers internes provoquaient une situation humanitaire inutile en Cisjordanie. « Les Palestiniens ne peuvent pas circuler et c’est précisément l’une des raisons principales qui nous ont poussés à mettre en place un programme humanitaire d’une telle ampleur dans la région. Ils ne peuvent pas apporter leurs marchandises au marché et ne peuvent pas non plus aller chez le médecin, même si celui-ci se trouve seulement 10 kilomètres plus loin », s’est indigné Mme Sime. Le personnel de CARE se rend auprès des communautés isolées à bord de cliniques mobiles et tente d’aider les paysans à faire passer leurs marchandises aux postes de contrôle. Le budget humanitaire de l’organisation est passé de quatre millions de dollars en 1999 à 27 millions par an aujourd’hui, pour gérer les conséquences des restrictions de circulation. Parmi les plus touchés, on trouve les quelque 50 000 Palestiniens dont les maisons et les villages se trouvent du côté ouest (ou israélien) de la barrière israélienne de Cisjordanie. En juillet 2004, la Cour de justice internationale a d’ailleurs statué que le tracé de la barrière était illégal au regard de la loi humanitaire internationale et des droits humains. Dans certains villages, tels que celui d’Azzun Atma, les Palestiniens entrent et sortent par un portail tenu par des soldats et fermé entre 22 heures et six heures du matin. En février, Adel Omar, 21 ans, est mort avant même d’avoir été traité par des médecins, à Qalqilya, une ville de Cisjordanie : bloqué pendant une heure à la barrière, il avait été dans l’incapacité de se rendre à l’hôpital. Les soldats avaient refusé de descendre de leur tour parce qu’il était 22 heures passées, selon l’organisation israélienne de défense des droits humains Btselem. Après l’incident, l’armée israélienne a déclaré qu’elle posterait des soldats au portail 24 heures sur 24. Les femmes enceintes quittent le village plusieurs jours avant la date prévue de leur accouchement pour éviter qu’on les empêche de se rendre à l’hôpital si elles commencent le travail en pleine nuit, ont expliqué à IRIN plusieurs villageois. Des ambulances retardées La Société du Croissant-Rouge palestinien a déclaré en avril que 33 de ses ambulances avaient été retardées à des postes de contrôle et qu’elles n’avaient pas été autorisées à passer à 14 de ces occasions. Le contretemps le plus long, qui a eu lieu près de Jérusalem, était de presque six heures. « Les autorités israéliennes et palestiniennes ont le droit de fouiller les ambulances. Le problème est de savoir si le retard occasionné est excessif ou non. Il y a eu des améliorations, mais il y reste encore beaucoup à faire », a estimé Bernard Burrell, un porte-parole du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Jérusalem. Le CICR tente de mettre en place des voies réservées aux véhicules humanitaires aux postes de contrôle se trouvant sur des routes étroites afin que les ambulances puissent couper la file au lieu d’être « coincées pendant une heure derrière les voitures en attente », a-t-il ajouté. Pour M. Dror, cependant, « les Palestiniens se servent des ambulances pour faire passer des terroristes qui viennent dans le but de commettre des actes terroristes ». La pauvreté gagne du terrain Selon Mme Sime, les postes de contrôle ont divisé la Cisjordanie en trois zones, le nord de la Cisjordanie et la vallée du Jourdain étant aussi particulièrement touchés par les restrictions. Depuis six ans, il est notamment interdit aux hommes âgés de 16 à 35 ans de quitter Nablus, la plus grande ville cisjordanienne. « Ils ne peuvent plus travailler en Israël et ils ne peuvent pas se rendre à Ramallah pour travailler sur des chantiers de construction parce qu’il ne leur est pas possible d’obtenir de permis de circulation », a déploré Mme Sime. En conséquence, les communautés palestiniennes sont de plus en plus touchées par la pauvreté – et l’insécurité alimentaire. En mars, le Programme alimentaire mondial et l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture ont rapporté que 60 pour cent des résidents de la Cisjordanie avaient réduit leurs dépenses alimentaires. Les familles diminuent les portions ; elles se contentent d’un repas par jour, achètent des produits alimentaires de moins bonne qualité et consomment moins de fruits, de légumes et de viande fraîche, selon le rapport. Informations supplémentaires:
pdf: http://www.irinnews.org/Report.aspx?ReportId=72570