L’assistance juridique aux enfants

Les enfants confrontés au système juridique auront souvent besoin de l’assistance d’un avocat. Selon le contexte, un enfant peut être éligible à un conseil juridique gratuit ou à être représenté sans frais. Les besoins juridiques spécifiques à l’enfant décideront de l’avocat, la branche du gouvernement, l’institution ou l’organisme qui fournira cette assistance juridique. La procédure permettant à un enfant d’obtenir une assistance juridique gratuite est détaillée ci-dessous. En se basant sur le concept d’une justice adaptée aux enfants, qui appelle tous les systèmes judiciaires à s’adapter aux droits et situations particulières des enfants, cette section approfondit quelques-unes des situations les plus fréquentes où les enfants peuvent avoir besoin d’une assistance juridique et inclut les recours devant les mécanismes de droits de l'homme internationaux et régionaux.

L'importance de l'assistance juridique en tant que droit humain est aussi discutée et une sélection de décisions de justice interprétant ce droit est présentée.

Enfants en conflit avec la loi

Un enfant soupçonné ou accusé d’être en conflit avec la loi peut avoir droit à une aide juridique, une assistance juridique gratuite ou subventionnée, souvent financée ou fournie par le gouvernement. Le Convention relative aux droits de l’enfant, qui stipule que tout enfant accusé d’avoir commis un délit a le droit de bénéficier d’une assistance juridique ou de toute autre assistance appropriée, oblige les gouvernements à fournir cette aide. Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (article 14) et les Principes de bases relatifs au rôle du barreau (Principe 3, 6) soulignent que l’assistance juridique doit être proposée gratuitement, si besoin est, à toute personne faisant face à des procédures pénales. De plus, l’ensemble des règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs («Règles de Beijing», règles 7, 13, 15) spécifie que les enfants ont non seulement le droit d’obtenir des conseils, mais aussi de demander une aide juridique gratuite lorsque celle-ci est disponible. Les Principes et lignes directrices des Nations Unies sur l’accès à l’assistance juridique dans le système de justice pénale (Principes 3, 10, 11; Ligne directrice  10) précisent le droit de l’enfant à obtenir une aide juridique et détaillent les mesures spécifiques à prendre pour garantir que ceux-ci aient un véritable accès à une aide juridique.

Les enfants ayant déjà été arrêtés ou détenus ont d’autant plus le droit d’obtenir une aide juridique. Dans ces circonstances, la Convention relative aux droits de l’enfant (article 37) spécifie que les enfants ont le droit d’obtenir une assistance juridique immédiate, et les règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (règle 93) que tout enfant n’ayant pas encore été traduit en justice peut demander une aide juridique lorsque celle-ci est disponible.

En pratique, cependant, la disponibilité et la qualité de l’aide juridique pour les enfants, qu’ils soientdétenus ou pas, varient de façon dramatique entre les différentes juridictions et en leur sein même.

Les enfants victimes

Les enfants victimes devraient se voir octroyer et, dans certaines circonstances, ont droit à une assistance juridique gratuite. Au niveau mondial, les Lignes directrices des Nations Unies en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels (Lignes directrices 19, 21, 22, 24), la Déclaration des Nations Unies des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d’abus de pouvoir (Article 6), et les Principes et lignes directrices des Nations Unies sur l’accès à l’assistance juridique dans le système de justice pénale (Principes 4, 11; Ligne directrice 7) dictent que les enfants victimes devraient avoir accès au soutien et à l’assistance adéquats, notamment à une assistance juridique, dès leur premier contact avec le processus de justice pénale. Conformément à ces instruments, les enfants victimes de crimes étant invités à prendre part ou à témoigner dans une affaire criminelle reçoivent généralement une forme quelconque de conseils ou de représentation légale pour garantir que leur participation soit significative.

Selon la nature du crime présumé, les enfants victimes peuvent avoir un droit spécifique à l’assistance juridique. Par exemple, les enfants victimes d’abus ou de négligence ont généralement droit à un avocat commis d’office ou s’en voient désigner un dans les procédures en matière de protection de l'enfance. Cet avocat, tout comme l’aide juridique, est généralement financé ou attribué par le gouvernement. Lors d’un procès devant le juge aux affaires familiales, en principe, le tribunal nomme un avocat qui représente l’intérêt supérieur de l’enfant, les souhaits de l’enfant, ou les deux. Les enfants victimes d’autres crimes peuvent également avoir droit à une quelconque forme d’assistance légale, mais celle-ci peut être subordonnée à sa participation au procès du ou des contrevenant(s).

Les enfants témoins

Dans de nombreuses juridictions lors de procédures judiciaires, des enfants sont appelés à parler de choses qu’ils ont vues ou vécues. Communément, on appelle cela témoigner : communiquer des faits qui permettront au tribunal de prendre une décision. Un enfant témoin lors d’une procédure judiciaire peut, dans une certaine mesure, recevoir l’assistance juridique de l’avocat qui a invité l’enfant à témoigner. Dans la majorité des cas, il s’agira du procureur, un avocat employé par le gouvernement pour poursuivre une affaire pénale en justice. Toutefois, les enfants peuvent également être cités comme témoins par un avocat pour défendre l’accusé au pénal, ou par celui d’une personne quelconque au civil.

Toutefois, il ne faut pas oublier que ces avocats ne représentent pas directement l’enfant témoin, et n’auront pas forcément son intérêt supérieur à cœur. Dans certaines juridictions, là où un enfant a été appelé à témoigner, une assistance juridique indépendante peut être proposée par des programmes publics d’aide aux victimes ou des organisations de défense des droits des victimes.

Les gouvernements sont notamment appelés par les Lignes directrices des Nations Unies en matièrede justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels (Lignes directrices 19, 21, 22, 24, 25) et par les Principes et lignes directrices des Nations Unies sur l’accès à l’assistance juridique dans le système de justice pénale (Principes 5, 11; Ligne directrice 8) à proposer l’aide de spécialistes et, si nécessaire, de nommer des représentants chargés de protéger les intérêts de l’enfant témoin.

Les enfants plaignants

Il peut être plus difficile pour les enfants dont les droits ont été violés d’obtenir une assistance juridique gratuite leur permettant de porter plainte officiellement devant la justice que si, comme mentionné ci-dessus, les procédures judiciaires avaient été entamées par une tierce personne. Les obstacles sont nombreux sur la voie d’accès à la justice. Dans certains systèmes judiciaires, avant delancer des poursuites, les enfants doivent obtenir le consentement et l’assistance d’un parent ou tuteur. Dans d’autres, ils ne pourront peut-être même pas initier de procédures.

Néanmoins, les enfants ont le droit d’entreprendre des poursuites judiciaires lorsque leurs droits ont été violés. Ils ont également le droit de recevoir une assistance juridique pour déterminer les possibilités qui s’offrent à eux et de suivre la voie qu’ils choisissent. En ce sens, il est établi dans les Lignes directrices des Nations Unies en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels (Lignes directrices 20, 35, 36, 37) que les enfants victimes doivent être informés des différentes façons qu’ils ont d’obtenir, des auteurs du crime ou du gouvernement, une compensation, que ce soit dans le cadre des procédures pénales ou en-dehors de celles-ci. Les Lignes directrices spécifient par ailleurs que ces procédures doivent être accessibles et adaptées aux enfants, et que des réparations doivent leur être versées dans la mesure du possible.

La Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d'abus de pouvoir (Articles 4, 5, 6, 8, 9) réaffirme que toute victime à droit d’accéder à la justice, de demander une réparation rapide, et doit être informée de ses droits, avoir l’occasion de faire part de son opinion et de ses préoccupations, enfin, elle doit pouvoir recevoir une assistance tout au long de la procédure judiciaire.

Les principes et lignes directrices des Nations Unies sur l’accès à l’assistance juridique dans le système de justice pénale (Ligne directrice 7) exigent que les gouvernements veillent à ce que les victimes reçoivent une assistance juridique sur tous les aspects de leur participation au processus de justice pénale, notamment la possibilité d’engager une action au civil ou de demander réparation dans des instances distinctes.

Il existe tant de manières pour les enfants d’obtenir des réparations des auteurs des violations de leurs droits qu’il est important de mettre la lumière sur les différentes façons qu’ils ont d’attirer l’attention sur ces violations avant même d’avoir recours au tribunal. Comme il a été synthétisé ci-dessous, les enfants ont de nombreuses options pour consulter cette information. Ces moyens ne sont pas exclusifs : les enfants ont intérêt à explorer toutes leurs options avant de décider d’entamer une action en justice de façon officielle.

Des ombudsmans, médiateurs locaux ou nationaux - des personnes qui ont été nommées par lesgouvernements pour s’occuper des plaintes reçues par le grand public en ce qui concerne les injustices et les droits de l’homme – peuvent être en mesure d’offrir aux enfants une sorte d’assistance juridique gratuite. Les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad, principe 57) encouragent les gouvernements à recruter des médiateurs pour enfants, qui pourront généralement donner des conseils juridiques de base et, dans certains cas, recevoir des plaintes directement des enfants. Les enfants pourront également recevoir des conseils anonymes et confidentiels en appelant une ligne téléphonique d’assistance aux enfants, un service aux enfants conçu pour fournir une assistance directe aux enfants et les mettre en relationavec d’autres organismes et services utiles.

Dans certaines juridictions, les ONG spécialisées en droit, les cliniques juridiques universitaires, ou des barreaux d’avocats– des groupes représentant ou régulant les avocats – pourront être en mesurede fournir, aux enfants victimes de violations, des conseils ou une représentation juridiques gratuits ou financés. Le type de travaux entrepris par ces organisations est très variable : certains proposent des services juridiques globaux s’adressant directement aux membres individuels d’une communauté, d’autres acceptent uniquement les affaires qui vont dans le sens de buts ou d’objectifsstratégiques. Bon nombre de ces organisations comptent sur des avocats volontaires pour fournir leur assistance juridique. Dans certains cas, les avocats seront d’accord pour travailler directement avec les enfants pour entreprendre des poursuites judiciaires. Ce genre d’accords sera décrit dans la section ci-dessous en ce qui concerne les organisations de défense des droits de l’enfant.

En cas de violations de leurs droits pouvant relever d’un acte criminel, les enfants pourront également bénéficier d’une assistance juridique ou de conseils légaux fournis par les autorités chargées de l’application de la loi. Si l’auteur de la violation est finalement traduit en justice, l’enfant pourra recevoir une forme adéquate de compensation. Toutefois, les enfants qui portent plainte directement à la police ne pourront pas forcément contrôler le résultat de l’enquête ou de la procédure de justice, et il est peu probable qu’ils bénéficient d’un avocat commis d’office, chargé de représenter leur point de vue et leurs intérêts. Comme ci-dessus, il est conseillé aux enfants victimes de crime de contacter une organisation de défense des droits des victimes. Elles sont nombreuses à proposer des services de défense et une assistance lors de la demande de compensation en réparation des souffrances engendrées.

Documentation sur l'assistance juridique aux enfants

  • L’association internationale du barreau (IBA) est une organisation parapluie qui représente plus de 55 000 avocats et 206 barreaux et autres associations juridiques sur tous les contients. L’IBA a une expérience considérable dans l'assistance à la communauté juridique mondiale.

  • International Legal Aid Group (ILAG) est un réseau mondial regroupant des spécialistes de l’assistance juridique qui vise à garantir l’élaboration de politiques solides en matière d’assistance, et à encourager les discussions au sujet des développements internationaux en la matière. Le site internet de l’ILAG présente des informations, des documents de recherche, des bulletins d’information, et un éventail de rapports nationaux sur l’état de l’assistance juridique.
  • Le réseau Legal Aid Reformers' Network (LARN) présente un forum d’échange d’informations et de documentation autour du thème de l’assistance juridique et de la défense des droits. Le LARN fournit de la documentation sur les normes internationales en matière d’assistance juridique et sur les systèmes nationaux d’assistance juridique, dont une vue d’ensemble de l’assistance juridique dans certaines juridictions et le texte des lois pertinentes.
  • Le guide Global Legal Aid Guide fournit des détails sur les systèmes d’assistance juridique dans le monde, y compris le type d’affaires et de candidats éligibles à recevoir une assistance juridique, le coût des services (s’il y a lieu), et la démarche à suivre pour faire sa demande d’assistance.

  • European Network of Ombudspersons for Children (ENOC, Réseau européen des médiateurs pour enfants) met en relation des bureaux indépendants pour les enfants de 29 pays européens. Il accueille également un Réseau mondial des médiateurs pour enfants. Le site internet de l’ENOC fournit des liens vers ces bureaux, ainsi que des informations à leur sujet. Le réseau dans son ensemble vise à partager des informations, des approches et stratégies, et encourage le développement de médiateurs pour enfants efficaces et indépendants.
  • Le Forum africain sur les politiques de l’enfance (African Child Policy Forum) a publié un rapport qui décrit les expériences et pratiques des Centres de protection juridique pour enfants. Ce rapport vise à promouvoir et à faire respecter les droits de l’enfant, entre autres, en offrant des conseils juridiques et de l’information aux enfants sur leurs droits, des services de conseils et de renvoi vers les services appropriés pour les enfants victimes, et enfin, une représentation légale pour une affaire particulière qui fera avancerles objectifs globaux d’un centre.
  • Child Helpline International : L’assistance téléphonique aux enfants, Child Helpline International (CHI), est un réseau international d’assistance téléphonique aux enfants qui œuvre à la protection des droits de l’enfant. La mission du CHI est de représenter et soutenir les lignes téléphoniques d’assistance dans le monde entier. L’organisation maintient une liste publique des coordonnées complètes de chacun de ses membres.