Bulletin de CRIN n°173

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18 Novembre 2016 subscribe | subscribe | submit information
  • Bulletin n° 173

    Dans ce numéro

    À la une : Une frontière arbitraire : les âges minimums

    Actualités
    - Justice : France, États-Unis, Koweït, Israël
    - Violences : Sierra Leone, RDC, Suisse
    - Conflits armés : Irak, Syrie, Nigéria

    Accès à la justice au Rwanda

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    À la une

    Une frontière arbitraire : les âges minimums

    CRIN cherche à encourager l’émergence d’un nouveau débat sur  la détermination des âges minimums. Notre document de réflexion esquisse des principes généraux et des critères pour s’assurer d’un respect des droits de l’enfant cohérent et adapté dans la détermination de ces âges.

    Nous pensons qu’il y a deux justifications possibles pour fixer au cours de l’enfance des âges minimums dans des buts spécifiques (travailler, se marier etc.). En premier lieu, afin de  fournir une protection contre des abus significatifs à des enfants qui en ont un besoin établi. En second lieu, pour disposer d’une référence pour établir la capacité présumée, car sans un âge minimum, il revient toujours à l’enfant concerné de prouver sa capacité. Dans certains cas, un système pour déterminer la capacité peut être adapté, mais le fait de fixer un âge minimum garantit en plus qu’à partir de cet âge, l’enfant acquiert bien un droit absolu.

    Les âges minimums devraient, sans exception, être en adéquation avec tous les droits de la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant (CDE). Cela signifie que dans les domaines où la protection des enfants est en jeu (par exemple, dans le système judiciaire), tous les enfants de moins de 18 ans devraient bénéficier d’une protection spéciale. Lorsque des âges minimums sont nécessaires pour prévenir des abus de pouvoir (par exemple, s’agissant de majorité sexuelle), leur mise en œuvre ne devrait jamais aller à l’encontre des droits de l’enfant. Les âges minimums devraient être évités dans les domaines où les restrictions d’âge ne servent aucun but et risquent de restreindre le développement des enfants, leurs libertés ou même leur protection (par exemple, la liberté de choisir ou non une religion, l’accès aux mécanismes de plaintes). Enfin, lorsqu’il y a une tension entre la protection de l’enfant et son autonomie (par exemple, dans le cas du consentement à un traitement médical), la capacité de l’enfant devrait être le facteur décisif et ne devrait pas être appréciée de manière générale, mais en considérant le problème en cause. Cette appréciation devrait toujours prendre en compte les normes sociales et culturelles d’un contexte donné, et les déséquilibres de pouvoir en jeu dans la question du consentement.

    Il faut noter que les décisions politiques sont parfois prises pour « les enfants » en tant que groupe plutôt que pour les enfants en tant qu’individus. De telles décisions doivent répondre aux besoins de ceux qui sont les plus résilients - et qui peuvent constituer la majorité - comme de ceux qui sont plus vulnérables. De plus, les obstacles à la protection et à l’autonomisation peuvent être liés à la tradition et à la pratique plutôt qu’uniquement liés à des âges minimums définis dans la loi interne (par exemple, les mariages  coutumiers et informels). Ces obstacles nécessitent donc un travail spécifique sur les normes sociales.

    Critères

    L’objet du document de réflexion est d’esquisser des principes généraux, non de couvrir une liste exhaustive de sujets. À partir de là, nous avons élaboré des critères qui peuvent être utilisés comme point de départ pour développer une position sur d’autres sujets qui pourraient nécessiter un âge minimum.   

    Un âge minimum est-il nécessaire ? Réfléchir à :

    • But poursuivi (l’âge minimum a-t-il pour objectif de protéger les enfants ou bien de leur garantir une reconnaissance en tant que détenteurs de droits ?)
    • Quels autres moyens existent pour remplir le même objectif sans recourir à ces seuils ?
    • Quel est le niveau de risque associé à l’activité en question ?
    • S’il s’agit d’un objectif de protection, à quel point un âge légal est-il efficace pour obtenir cette protection ?
    • Si on ne met pas en place un âge légal, quel est le potentiel d’abus de pouvoir par les parents ou d’autres personnes ? (Par exemple, ne pas avoir d’âge minimum pour la fin de l’éducation obligatoire pourrait conduire à ce que les parents choisissent de ne pas envoyer leur enfant à l’école et de l’employer à la place pour aider à diverses tâches).
    • L’évaluation de capacité est-elle une option ? Si oui, comment et par qui doit-elle être faite ? (par exemple, il ne serait pas adapté que ce soit la personne qui vend les tickets de cinéma qui détermine la capacité).
    • Quelles seraient les conséquences négatives de ne pas fixer d’âge minimum ?

    Si oui :

    • Est-ce en adéquation avec tous les autres droits de la Convention ?
    • Quel est l’âge qui serait le plus à même remplir l’objectif ?
    • Un seuil fixé à cet âge respecte-t-il l’intérêt supérieur de l’enfant ?
    • L’âge minimum est-il conforme aux autres lois et politiques (ou encore, ces lois et politiques sont-elles mauvaises) ?
    • Comment un âge minimum peut-il avoir un impact sur le processus décisionnel ?
    • Ce seuil constitue-t-il une discrimination contre les enfants sur la base de leur âge ?
    • Ce seuil aura-t-il plus de conséquences pour un groupe d’enfants que pour les autres ?

    Rejoindre la discussion

    Nous reconnaissons que les questions portant sur la capacité sont complexes, et que les débats évoluent au fil du temps. Nous souhaitons continuer à examiner les positions que ce document présente. Un bon nombre d’individus et d’organisations ont déjà commenté ce document. Pour rejoindre la discussion, envoyez un message à [email protected].

    Vous pouvez nous faire part :

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      • Des campagnes

    Actualités

    Justice

    Le plus...

    En France, une cour d’appel a déclaré que « la question du discernement de l’enfant n’est pas à prendre en compte lorsque sa parole est recueillie dans le cadre d’une procédure pénale où il apparaît comme victime d’un délit ». L’affaire concernait une enseignante soupçonnée de violences contre des enfants d’une école maternelle. Elle avait été relaxée en première instance, et le tribunal correctionnel avait écarté la parole des enfants au motif que ces derniers ne seraient pas dotés de discernement. Lors de l’appel, le Défenseur des droits avait présenté ses observations, considérant que la parole de l’enfant, « quels que soient son âge et sa capacité de discernement, si elle ne doit pas être sacralisée à tort, constitue un élément de l’enquête et/ou de l’instruction judiciaire qui ne saurait, par principe, être écartée comme non probante. » La Cour d’appel a donc suivi ces observations. Lire la décision du Défenseur des droit. Lire l'arrêt de la Cour d'appel de Limoges.

    Aux États-Unis, une juge de district de l’état d’Oregon a estimé recevable la plainte de 21 enfants et adolescents contre l’État américain, les agences fédérales et l’industrie fossile, qu’ils poursuivent pour ne pas avoir pris au sérieux le changement climatique. Selon les plaignants, l’État a violé leurs droits constitutionnels à la vie et à la liberté en continuant de miser sur les industries fossiles. Ils se disent directement affectés par le changement climatique que ce soit par rapport à leur nutrition, leur sécurité ou leur santé. La juge a autorisé l’ouverture du procès, qui se tiendra en 2017. Il s’agit d’une démarche sans précédent dans l’histoire du système judiciaire américain. Lire l’article.

    Et le moins…

    Le Koweït va baisser l’âge de la responsabilité pénale à partir de l’année prochaine. En pratique, cela signifie que les enfants de 16 à 18 ans pourront être jugé devant un tribunal non spécialisé, et pourront encourir de lourdes peines de prison, ou la peine de mort. À l’heure actuelle, des peines spéciales - qui n’incluent pas la peine de mort - s’appliquent aux personnes de moins de 18 ans. Le responsable de la justice des mineurs au ministère de la Justice a mis en garde les adolescents et leurs parents, notamment à propos de leur usage d’internet : « tout le monde, et particulièrement les étudiants et leurs parents devraient se montrer extrêmement prudents sur la signification de ces changements dans l’application de la loi ». Il a ensuite dressé une liste des risques liés à internet, qui comprenait le terrorisme, la prostitution, le crime organisé, mais aussi les troubles à l’ordre public, l’absentéisme, les manifestations, les grèves et les sit-ins. Lire l’article (en anglais).

    Un tribunal israélien a condamné un palestinien âgé de 14 ans accusé d’avoir participé à une opération au couteau contre des colons israéliens, à 12 ans de prison ainsi qu’à des amendes s’élevant à l’équivalent de 43 000 euros. Selon l’avocat de l’enfant « l’occupation a délibérément maintenu le jeune Ahmad Manasrah en prison [...] jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge légal pour une condamnation, [...] qui est de 14 ans… ». Dans les tribunaux israéliens, dans les affaires de « sécurité », les mineurs palestiniens ne peuvent obtenir de réduction de peine malgré leur âge. Ahmad est l’un des 400 enfants détenus dans les prisons israéliennes. Defence for Children International Palestine explique que ces mineurs sont souvent soumis à la torture et aux mauvais traitements, à l’isolement, aux coups par le personnel militaire, et qu’ils encourent le risque d’être agressé sexuellement et abusé. De plus, ils sont interrogés hors de la présence d’un parent ou d’un avocat. Lire l’article.

    Violences

    Amnesty dénonce l’interdiction pour les filles enceintes au Sierra Leone d’aller à l’école et de passer des examens, en place depuis avril 2015. Le taux de grossesse chez les adolescentes a augmenté pendant l’épidémie d’Ebola, durant laquelle les violences sexuelles se sont multipliées. « Au lieu d'humilier et d'exclure les adolescentes, les autorités sierra-léonaises devraient faire le nécessaire pour améliorer l'information sur la santé en matière de sexualité et de procréation dans les écoles », a déclaré Alioune Tine, directeur régional d'Amnesty International pour l'Afrique centrale et l'Afrique de l'Ouest. Lire l’article.

    En République Démocratique du Congo, au Sud-Kivu, les parents d’enfants albinos craignent de voir leurs enfants persécutés. Certains d’entre eux ont quitté leur village dans l'espoir de trouver refuge en ville, sans y trouver plus de protection. Selon certaines traditions, les os des personnes atteintes d’albinisme possèderaient des propriétés magiques. Face à l’inaction des autorités, le président d’une association pour les albinos au Sud-Kivu lance un appel, tout en espérant que son action en justice aboutira. Lire l’article.

    En Suisse, sept demandeurs d'asile mineurs ont tenté de se suicider dans un foyer d’accueil. Michela Bovolenta, secrétaire centrale au Syndicat des services publics a dénoncé la pénurie d’éducateurs et l'encadrement insuffisant pour ces jeunes en situation de traumatisme. Lire l’article.

    Conflits armés

    À Mossoul, en Irak, près de 600 000 enfants sont piégés, selon l’ONG Save the Children. Début novembre, environ 9 700 enfants avaient déjà été déplacés dans la région et une prison souterraine avait été découverte contenant 961 hommes et adolescents détenus dans des cages de 1 mètre par 50 centimètres, et présentant presque tous des traces de torture. Au moins 132 cas d'enfants utilisés comme soldats par le groupe Etat islamique (EI) ont été confirmés mais le directeur régional du Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF) estime que ce chiffre est en réalité nettement plus important. Des enfants de 12 ans ont aussi été utilisés par l’EI comme kamikazes.

    Fin octobre, 22 enfants ont été tués dans des bombardements sur une école en Syrie. De plus, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), l’offensive lancée par les groupes rebelles le 28 octobre aurait causé la mort de 29 enfants. Début novembre, une garderie a été bombardée, où au moins six enfants ont perdu la vie et 17 personnes ont été blessées, pour la plupart des mineurs. Mi-novembre, trois hôpitaux situés dans des zones rebelles du nord pays ont été bombardés.  En 24 heures, neuf enfants sont morts dans les quartiers rebelles d’Alep. La porte-parole du Haut Commissariat de l'ONU pour les droits de l'homme (OHCHR) a déclaré que toutes les parties impliquées dans la bataille d'Alep se livrent potentiellement à des crimes de guerre en menant des attaques aveugles contre des quartiers peuplés de civils. Les frappes contre les hôpitaux et les écoles sont désormais courantes.

    Au Nigéria, 21 des 219 lycéennes de Chibok enlevées par Boko Haram il y a plus de deux ans ont été libérées et ont pu retrouver leurs familles. On en sait très peu cependant sur le sort des autres lycéennes. D’autres enfants, piégés par le conflit, subissent de la part du gouvernement nigérian de terribles violations de leurs droits. Selon Amnesty International, des enfants sont détenus dans des conditions atroces avec des adultes dans des cellules surpeuplées du centre de la caserne de Giwa, et continuent d'y mourir. À cause de Boko Haram, environ 2,4 millions de personnes sont déplacées, pour la plupart des enfants. Beaucoup vivent dans des camps, dans des conditions sordides, et leur vie est menacée par la malnutrition sévère, la déshydratation et le manque de soins médicaux. Selon l’ONG Save the Children, jusqu'à 200 enfants âgés de moins de 5 ans risquent de mourir de faim chaque jour dans le nord-est du Nigéria, épicentre des violences de Boko Haram. Par ailleurs, L’Unicef a fait libérer 876 enfants détenus par l’armée nigériane, qui arrête fréquemment des civils dans les zones contrôlées par Boko Haram. « Nous craignons qu’il y ait des enfants qui soient détenus pour la simple raison qu’ils étaient auparavant détenus par Boko Haram », a déclaré Manuel Fontaine, directeur régional pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale. Lire l’article.

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    Accès des enfants à la justice

    Rwanda

    Chaque mois, nous vous présentons un rapport sur l’accès des enfants à la justice dans un pays du monde. Le projet vise à établir le statut de la Convention relative aux droits de l'enfant (CDE) dans les législations nationales, le statut des enfants impliqués dans des procédures judiciaires, les moyens juridiques qui permettent de contester des violations des droits de l'enfant et les considérations pratiques à prendre en compte en utilisant ces moyens.

    La CDE prime sur le droit national rwandais. Plusieurs lois ont été passées ou amendées pour se mettre en conformité avec les dispositions de la CDE. Une personne qui n’a pas encore atteint l’âge de 21 ans ne peut pas saisir les tribunaux ni engager d’action en justice en son nom. La seule exception intervient dans les cas où l’enfant est émancipé : il se voit alors octroyer la même capacité juridique qu’un adulte. Dans les autres cas, la loi prévoit que l’enfant soit représenté pendant les procédures judiciaires. Cependant, le nombre d’avocats est insuffisant pour répondre à la demande de représentation juridique, causant ainsi des retards dans les procès concernant les enfants. Il existe un fossé inquiétant dans la législation rwandaise concernant l’emploi des enfants. Bien que l’âge minimum soit fixé à 18 ans pour un temps plein et à 16 ans pour les formations en apprentissage, neuf pour cent des enfants rwandais âgés de 5 à 17 ans sont directement concernés par le travail infantile. Puisque l’âge de la majorité est fixé à 21 ans, un enfant qui souhaite saisir les tribunaux pour des violations concernant le droit du travail, ne sera en mesure de le faire que s’il trouve un représentant pour agir en son nom.

    Télécharger le rapport complet en français et en anglais.

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    Publications

    France : Dans son rapport annuel consacré aux droits de l'enfant, intitulé Droit fondamental à l’éducation : une école pour tous, un droit pour chacun, le Défenseur de droits souligne la difficulté pour les enfants vulnérables d'accéder à l'éducation.

    Consultations

    ONU : Appel à contribution sur le changement climatique et les droits de l’enfant
    Date limite : 31 décembre 2016
    Questionnaire

    France : Le collectif AEDE - Agir ensemble pour les droits de l'enfant lance une consultation sur les droits de l'enfant afin de donner la parole aux enfants et aux jeunes.
    Date limite : 20 novembre 2016
    Participer

    Formation

    Certificat interuniversitaire en droits de l'enfant
    La formation aura lieu de février à juin 2017, à Louvain-la-Neuve, Belgique, le vendredi et le samedi de 9 à 18h. 
    Inscription

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    Le mot de trop

    « Voici ce qui va se passer. Je suis pro-life (anti-avortement) et les juges seront pro-life  »
    Le futur Président des États-Unis Donald Trump.

    Le futur Vice-président Mike Pence, en 1997, avait quant à lui moqué les femmes qui « veulent tout avoir, une carrière, des enfants et un garage avec deux voitures ».

    Et pendant ce temps, en Pologne, à défaut d'avoir pu voter une loi interdisant totalement l'IVG, le Parlement a opté pour un système incitant les femmes à ne pas avorter en cas de handicap irréversible ou de pathologie incurable (un des rares cas dans lesquels l'IVG est permis), en leur attribuant la somme de 925 euros si elles gardent l'enfant.

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    Informations

    Advocacy

    CRIN

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    Plus d'informations sur le projet Accès des enfants à la justice à cette adresse.

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