REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE : Les Droits de l'enfant dans les rapports des procédures spéciales des Nations Unies

Summary: Cette section résume les questions des droits de l'enfant soulevées par les mandataires des procédures Spéciales des Nations Unies. Une introduction aux droits de l'enfant et les procédures spéciales des droits des Nations Unies est disponible ici:

http://www.crin.org/resources/infoDetail.asp?ID=18043&flag=report

 

Rapports:

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Représentant du Secrétaire général pour les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays

Walter Kälin
(A/HRC/16/43/Add.4 )

Visite en République centrafricaine : du 9 au 17 juillet 2010

Rapport publié le 18 janvier 2011

 

Niveau de vie : [Statut de déplacement interne d'Ouham et Nana-Gribizi ] : Le Représentant rappelle également que le droit international humanitaire oblige les autorités à faire de leur mieux pour que les personnes civiles concernées soient accueillies dans des conditions satisfaisantes de logement, d’hygiène, de salubrité, de sécurité et d’alimentation et que les membres d’une même famille ne soient pas séparés.6 Or, les personnes déplacées à l’intérieur du pays en arrivant à Kabo n’avaient bénéficié d’aucune aide humanitaire de la part des autorités et dépendaient totalement de l’aide fournie par les institutions internationales et les organisations non gouvernementales. (Paragraphe 23).

La violence sexuelle : [Statut de déplacement interne de Bamingui-Bangoran ] : Le Représentant a également rencontré un groupe des 200 personnes de l’ethnie Haoussa déplacées depuis mars 2010. Des rebelles de la CPJP auraient attaqué, pillé et brûlé leur village d’origine (connu sous le nom de village Haussa) parce qu’ils reprochaient aux villageois de fournir des informations au Gouvernement. Au cours de l’attaque, les rebelles auraient tué une femme et un homme. Ils auraient systématiquement violé toutes les femmes du village qui n’avaient pas pu s’échapper, y compris une fillette de 12 ans. Les femmes n’ont pas reçu de soins médicaux parce qu’elles avaient honte et peur de se rendre à l’hôpital. La communauté souffre maintenant de graves problèmes sociaux à cause du viol en masse qui a été perpétré contre les femmes de cette communauté. (Paragraphe 33).

Les meurtres et crimes de guerre : [Statut de déplacement interne de haut-Mboumou et Mboumou] : Dans le sud-ouest du pays (préfectures de Haut-Mboumou et de Mboumou), les attaques menées contre la population civile par l’Armée de résistance du Seigneur, implantée dans la région depuis 2009, ont terrorisé la population. D’après l’organisation non gouvernementale Human Rights Watch, cette Armée a tué au moins 255 personnes et enlevé 697 autres, notamment des enfants, entre février 2009 et août 2010, en République centrafricaine mais aussi dans le district voisin de Bas-Huele, dans le nord de la République démocratique du Congo. (Paragraphe 37).

L’aide humanitaire et l’accès humanitaire : Bien que la présence humanitaire ait été renforcée, le Représentant constate que la crise humanitaire persiste en République centrafricaine, notamment dans les zones touchées par le conflit et/ou la sécheresse. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires estime que la situation humanitaire s’est détériorée dans le pays par rapport aux deux années précédentes. La République centrafricaine se classe maintenant au 179ème rang, sur 182, des pays de l'Indice de développement humain. Le taux de mortalité et la malnutrition aiguë chez les enfants âgés de moins de cinq ans sont parmi les plus élevés au monde. La situation humanitaire est désastreuse dans la plupart des communautés déplacées du fait qu’elles vivent souvent dans la brousse ou dans les zones reculées et se retrouvent privées d’accès aux services de base. Au cours de sa visite, le Représentant a rencontré des enfants déplacés qui n’étaient pas scolarisés depuis plusieurs années, mais aussi des mères ayant accouché sans bénéficier d’une assistance médicale ou traditionnelle parce que celle-ci n’est pas accessible. (Paragraphe 63).

La participation des enfants dans le conflit armé : Avec le soutien de l’ONU, l’APRD a réussi à démobiliser la majorité des enfants enrôlés dans ses rangs. L’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR), un autre mouvement politico-militaire, a elle aussi démobilisé 180 enfants. (Paragraphe 73).

Tout en se félicitant de ces progrès, le Représentant s’inquiète de savoir qu’il y a encore des enfants enrôlés dans les rangs de certains groupes armés. Il rappelle sa recommandation qui préconise de respecter le droit international humanitaire et de procéder sans délai au désarmement et à la réhabilitation des enfants-soldats en coopérant étroitement avec les organisations internationales spécialisées dans ce domaine (A/HRC/8/6/Add.1, par. 86 b). (Paragraphe 74).

On estime qu’un tiers des effectifs des milices d’autodéfense, qui existent principalement dans le nord et le nord-ouest du pays, sont constitués d’enfants. C’est d’autant plus préoccupant que certaines de ces milices reçoivent l’appui du Gouvernement ou coopèrent avec les FACA.20 Le Représentant a été informé que le Ministre délégué chargé de la défense nationale, en janvier 2010, a demandé à la gendarmerie d’enquêter sur l’enrôlement des enfants dans les milices d’autodéfense soutenues par le Gouvernement. Au moment de la rédaction du présent rapport, on ne connaît pas le résultat de ces investigations. (Paragraphe 75).

Dans le sud-est, l’Armée de résistance du Seigneur continue d’enlever ou de recruter de force des enfants qu’elle utilise comme combattants, espions, esclaves sexuels et porteurs. (Paragraphe 76).

En 2009, la CPJP tout comme l’UFDR recrutaient aussi des enfants qu’elles envoyaient sur la ligne de front à Vakaga. 200 à 300 enfants demeurent dans les rangs de l’APRD, des FDPC et du Mouvement des libérateurs centrafricains pour la justice (MLCJ). Certaines bandes de bandits organisées compte aussi des enfants dans leurs rangs . (Paragraphe 77).

Le Représentant se félicite de la signature par la République centrafricaine et par cinq autres pays de la région de la Déclaration de N’Djamena, le 9 juin 2010, contre le recrutement et l’utilisation des enfants par les forces et groupes armés. Le Représentant espère que le Gouvernement se fondera sur cet important engagement politique pour enfin ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, ainsi que le Représentant l’a déjà recommandé en 2007 (A/HRC/8/6/Add.1, par. 8 g). (Paragraphe 78).

Tout en se félicitant d’une certaine réduction des cas de violation grave des droits de l’homme par les forces de sécurité de l’État, le Représentant a pris note d’allégations inquiétantes faisant état de nouvelles violations commises par l’État dans la préfecture de Bamingui-Bangoran. Certains groupes armés commettent également des graves violations du droit international humanitaire, notamment des exécutions sommaires ou des attaques contre les populations civiles, et continuent d’enrôler des enfants dans leurs rangs. Ces actes pourraient constituer des crimes de guerre ou, dans le cas des atrocités commises par l’Armée de résistance du Seigneur, des crimes contre l’humanité. (Paragraphe 81).

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Rapport du Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires sommaires ou arbitraires

Philip Alston

(A/HRC/11/2/Add.3 )

Visite en République centrafricaine : du 31 janvier au 7 fevrier 2008

Rapport publié : du 18 avril au 27 mai 2009

Exécutions par les rebelles : L’APRD était responsable d’un petit nombre d’exécutions extrajudiciaires liées au conflit à proprement parler et aux efforts qu’elle a déployés pour gouverner les zones sous son contrôle. Pour ce qui touche au conflit, ces exécutions extrajudiciaires étaient des incidents isolés. Les observateurs des droits de l’homme ont informé le Rapporteur spécial d’un petit nombre de cas dans lesquels l’APRD avait tué des civils accusés de soutenir le Gouvernement. Par exemple, dans la nuit du 30 mai 2007, l’APRD a assassiné le sous-préfet de Ngaoundaye parce qu’il avait, selon certaines allégations, soutenu les forces de défense centrafricaines. De même, le Rapporteur spécial a été informé d’un cas dans lequel trois jeunes hommes de Bélé ont été tués par l’APRD, le 2 septembre 2007, parce qu’ils refusaient de se joindre aux rebelles. Il a également été fait mention de meurtres perpétrés par l’APRD à titre de vengeance personnelle. Dans un cas, un de ses commandants a exécuté un volontaire d’une organisation locale pour des raisons de rivalité personnelle. (Paragraphe 20).

Exécutions pour sorcellerie : En République centrafricaine, la croyance selon laquelle certaines personnes possèdent le don de «sorcellerie» et utilisent leurs pouvoirs pour nuire à autrui est très répandue. En fait, nombre de ceux qui sont accusés de ce «crime» appartiennent simplement à des groupes vulnérables, comme les femmes et les enfants, les personnes âgées ou les handicapés mentaux, et sont les victimes de la rancune personnelle de l’accusateur. Dans de nombreux cas, ils sont tués en toute impunité, que ce soit par des particuliers, les forces de sécurité gouvernementales ou des groupes de rebelles. Ils peuvent être également punis ou bannis dans les faits et exclus de la société. (Paragraphe 49).

En vertu du Code pénal, une personne condamnée pour «sorcellerie» (ou charlatanisme) encourt la peine capitale, une peine d’emprisonnement ou une amende13. La peine de mort pour ce «délit» constituerait une violation du droit international, qui ne permet son application que pour l’assassinat, mais il n’a pas été signalé de cas récent dans lequel la peine capitale avait été appliquée. Toutefois, il est courant que les personnes accusées soient arrêtées, jugées, condamnées et incarcérées sur la base de faux éléments de preuve. Ce problème doit être pris au sérieux: la criminalisation de la «sorcellerie» par l’État renforce la stigmatisation sociale des personnes visées. De fait, l’interdiction de la «sorcellerie» incite les miliciens, les soldats et les rebelles à considérer comme légitime le meurtre de personnes soupçonnées de la pratiquer. Qui plus est, il s’agit d’un «crime» qui se prête de façon idéale à la persécution et à la maltraitance des femmes et des enfants en particulier. La suppression du crime de sorcellerie dans le Code pénal constituerait un message clair et immédiat. De plus, il existe un défi au niveau de l’éducation de la population pour assurer que les personnes qui craignent les sorciers agissent dans le cadre de la loi et sur la base d’un code pénal qui respecte pleinement les droits de l’homme, lorsqu’elles veulent prendre des mesures contre ceux qu’elles soupçonnent de malveillance. Dans de telles circonstances, il est totalement inacceptable d’invoquer la «sorcellerie», chef d’accusation flou, subjectif et se prêtant à toutes les manipulations, pour justifier des actes de violence arbitraire commis par des particuliers, ou commandités ou tolérés par le Gouvernement. L’exécution pour «sorcellerie» devrait donner lieu à des poursuites comme toute autre forme de meurtre de même que les autres actes violents commis à l’encontre des personnes visées. (Paragraphe 51).

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Rapport soumis par le Représentant du Secrétaire général pour les droits de l’homme des personnes déplacées dans leur propre pays

Walter Kälin
(A/HRC/8/6/Add.1)

Visite en République centrafricaine : du 24 février au 3 mars 2007

Rapport publié : 17 mars 2008

Les obligations internationales apparentés : La République centrafricaine est partie aux onventions internationales relatives aux droits de l’homme suivantes: le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le premier Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, le Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels, la Convention internationale pour l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, la Convention sur l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et la Convention relative aux droits de l’enfant. Elle est en outre partie au Statut de Rome portant création de la Cour pénale internationale. (Paragraphe 12).

Malgré une situation préoccupante en matière de droits de l’homme, la République centrafricaine n’a pas encore ratifié un certain nombre d’instruments fondamentaux dont le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elle a signé, mais non encore ratifié, la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant et n’est pas encore partie au Protocole de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits de la femme en Afrique. En outre, elle a signé mais pas encore ratifié le Pacte sur la sécurité, la stabilité et le développement dans la région des Grands Lacs et les Protocoles qui y sont relatifs. En particulier, le Protocole sur la protection et l’assistance à apporter aux personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays prévoit un cadre conceptuel important pour la protection des droits de l’homme des personnes déplacées internes. (Paragraphe 14).

Dans ce contexte, le Représentant recommande aux autorités gouvernementales d’être particulièrement attentifs aux besoins des enfants en situation de déplacement et, à cet égard, de ratifier dans les meilleurs délais le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés. (Paragraphe 85(g))

L'enlèvement : En outre, l’activité des coupeurs de route et des bandits oblige également de nombreuses personnes à quitter leur foyer en quête de protection. Ces groupes s’attaquent aux marchands et aux voyageurs pour leur soutirer de l’argent ou autres biens, kidnappent des enfants, en particulier des bergers peuls, contre rançon. La prolifération des armes légères et des incursions faites par des éléments incontrôlés venus du Tchad voisin et du Soudan participent également du sentiment général d’insécurité prévalant dans le nord du pays. (Paragraphe 20).

Les organisations opérant au niveau national : Un certain nombre d’autres organisations sont présentes en République centrafricaine, notamment l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le Bureau de la coordination des affaires humanitaires et l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Lors des réunions avec les membres des différentes organisations de la famille des Nations Unies, le Représentant a noté une grande volonté et un bon esprit de coopération, et en particulier leur souci d’accroître la présence des différentes institutions sur le terrain en ce qu’elle permettrait d’accroître la protection des individus et de répondre de manière plus adéquate à leurs besoins. (Paragraphe 34).

Le manque d 'assistance : Lors de son séjour à l’intérieur du pays, le Représentant a rencontré des groupes de déplacées qui disaient n’avoir jamais reçu la visite d’aucun acteur humanitaire. C’est le cas notamment à Otta, une localité de la région de Paoua, où environ 1 500 personnes ayant fui la violence vivent dans la forêt depuis mars 2006. Hommes, femmes et enfants vivent dans des conditions désastreuses. Elles ont déclaré au Représentant n’avoir reçu aucune assistance depuis leur déplacement. (Paragraphe 37).

Les jeunes hommes pris pour cibles : Selon les informations recueillies par le Représentant du Secrétaire général, les déplacements de population continuent dans le nord de la République centrafricaine, tant à l’ouest dans les préfectures de l’Ouham et Ouham-Pendé qu’à l’est, dans la Vakaga. Au cours de ses visites sur le terrain, il a noté avec regret que de nombreux villages avaient été récemment incendiés. Dans le village de Dimba 1, par exemple, 28 maisons ont été incendiées au début de l’année par les forces de sécurité obligeant les villageois à se réfugier dans la brousse. Les forces de sécurité, et en particulier la Garde présidentielle, sont le plus souvent désignées comme responsables de ces incendies. Selon des informations provenant d’un membre des forces de sécurité, les rebelles organisent des attaques contre l’armée en se cachant dans les villages. Afin de les chasser mais aussi, a-t-il admis, par vengeance, les membres des forces de sécurité mettaient le feu aux villages concernés. Selon des témoignages de villageois, les forces de sécurité, et notamment la Garde présidentielle, patrouillent régulièrement sur les grands axes en tirant souvent en l’air terrorisant ainsi les populations. Elles se font parfois attaquer par les rebelles et, en représailles, elles attaquent les villages, pillent les villageois et mettent le feu détruisant toutes leurs possessions notamment leurs réserves alimentaires. Les villageois ont également très souvent mentionné le fait qu’ils étaient perçus comme rebelles ou collaborateurs par les membres des forces de sécurité ce qui expliquerait aussi le harcèlement dont ils font l’objet. Les jeunes hommes seraient particulièrement ciblés. Une des personnes rencontrées par le Représentant sur la route d’Ouandago a ainsi indiqué que tous les habitants de son village avaient dû fuir il y a un an, suite à l’attaque des forces régulières contre un groupe rebelle qui opérait à partir de leur village. Quelques mois plus tard, pensant que les conditions le permettaient, les villageois sont rentrés chez eux apportant notamment les produits – surtout des bâches – que leur avaient fournies des organisations humanitaires. En octobre, ils se sont fait de nouveau attaquer par les forces de sécurité qui leur ont volé leurs bâches.

Le Représentant s’inquiète par ailleurs de la stigmatisation dont font l’objet les jeunes hommes de la part des forces de sécurité qui les perçoivent comme des rebelles ou des collaborateurs de ceux-ci. Cette stigmatisation accroît le sentiment permanent d’insécurité dans lequel vit la population et limite encore plus la liberté de circulation d’un groupe déterminé de la population. (Paragraphe 69).

De peur d’être interceptées et brutalisées par les membres des forces de sécurité, les personnes déplacées n’osent pas se rendre dans leurs villages pour chercher de l’eau ni dans les centres urbains pour se faire soigner. Souvent perçus par les forces de sécurité comme des rebelles ou des collaborateurs de ceux-ci, les déplacés internes – en particulier les jeunes hommes – sont en outre stigmatisés. Cette stigmatisation accroît le sentiment permanent d’insécurité dans lequel vit la population et limite de ce fait la liberté de circulation des personnes. Partant, le Représentant partage l’avis de nombreuses victimes de déplacement qui estiment que les conditions ne sont pas encore réunies pour un retour durable dans leurs lieux d’habitation habituels. (Paragraphe 81).

L’éducation : À l’issue de sa mission, le Représentant du Secrétaire général constate que la République centrafricaine connaît une situation d’urgence et que de nombreuses personnes déplacées ont un besoin impératif de protection et d’assistance, notamment en ce qui concerne la jouissance de leurs droits au logement, à l’alimentation, à l’accès aux soins de santé et à l’éducation. En effet, si dans certains cas les personnes déplacées ont fui à Bangui ou dans d’autres villes comme Bokaranga ou Kabo où elles ont trouvé refuge dans les familles, la majorité d’entre elles ont fui dans la forêt, à quelques kilomètres de leurs villages dans des conditions extrêmement difficiles. Ainsi, elles sont confrontées aux problèmes d’insécurité, elles n’osent pas se déplacer même en cas d’urgence médicale, elles organisent dans bien des cas des marchés en brousse pour ne pas être victimes de violence et ne peuvent pas envoyer leurs enfants à l’école. (Paragraphe 46).

Le secteur de l’éducation a été grandement affecté au cours des événements que connaît la République centrafricaine. Déjà en 2003, de nombreuses écoles avaient été détruites. Cette tendance a continué au cours de l’année 2006. Pour l’année 2005, on estime que 117 écoles ont dû fermer. Dans des régions où l’offre scolaire était déjà insuffisante, le Représentant s’inquiète que la jouissance du droit à l’éducation ne devienne de plus en plus un vœu pieu pour des milliers d’enfants. Selon les estimations de l’ONU, environ 90 000 enfants âgés de 6 à 16 ans seraient concernés . (Paragraphe 60).

Par ailleurs, de nombreux enseignants ont quitté les régions concernées fuyant la violence. En outre, même lorsque les écoles existent encore, les parents n’osent pas y envoyer les enfants du fait de l’insécurité. Les parents craignent que les écoliers puissent être attaqués sur le chemin de l’école et, dans certains cas, préfèrent que les enfants restent proches de la famille au cas où ette dernière devrait de nouveau prendre la fuite. Selon l’estimation de l’ONU, les déplacements qui ont eu lieu en 2006 ont privé d’accès à l’école environ 30 000 enfants . (Paragraphe 61).

Le Représentant a été informé de l’organisation d’un système d’éducation d’urgence avec le système des «agents-parents» développé avec l’assistance de l’UNICEF. En l’absence d’enseignants professionnels, certains membres de la communauté ayant un certain bagage éducatif sont identifiés. Ils reçoivent une formation minimale incluant quelques éléments de pédagogie et sont ensuite chargés d’enseigner aux enfants de la communauté. À défaut de pouvoir se rendre à l’école, l’école est transposée dans la famille, la communauté. Le Représentant encourage ce type d’activité en ce qu’elle permet aux enfants de ne pas perdre tout le bénéfice des années scolaires précédentes. Il attire néanmoins l’attention des acteurs impliqués sur le fait que cette éducation, précaire par définition, ne saurait remplacer l’enseignement par des professionnels. Il encourage donc tous les acteurs concernés à tout mettre en œuvre pour réhabiliter les écoles détruites, remplacer l’équipement et ramener les enseignants dans les écoles dans les localités où la situation sécuritaire le permet. (Paragraphe 62).

Comme dans de nombreux conflits, les enfants paient un tribut particulièrement lourd dans la crise que traverse la République centrafricaine. Du fait de leur vulnérabilité, ils subissent de manière plus marquée les difficultés que traverse l’ensemble de la population déplacée. En outre, ils sont privés de la jouissance de droits qui leurs sont plus spécifiques comme le droit à l’éducation. (Paragraphe 66).

Le Représentant s’inquiète de la situation dans laquelle vivent les personnes déplacées qu’il juge très préoccupante. Celles-ci vivent dans la précarité absolue, n’ayant bien souvent plus de logement, ni accès à l’eau potable, ni aux soins de santé et leurs enfants n’ont pas accès à l’éducation. Dans certains cas, elles vivent dans une insécurité alimentaire considérable qui pourrait vite basculer dans la sous-alimentation. (Paragraphe 80).

Les enfants soldats : Le Représentant est préoccupé par les rapports faisant état d’enrôlement d’enfants par les groupes armés opérant dans le nord-ouest. Il a lui-même pu constater qu’il y a des enfants parmi les rebelles qui patrouillent les territoires sous leur contrôle. Selon les estimations qui lui ont été communiquées, un peu moins d’un millier d’enfants seraient concernés. Il semblerait que les groupes armés n’organisent pas de campagne de recrutement mais accueillent dans leurs rangs des enfants ayant perdu leurs parents ou cherchant refuge et protection. Le phénomène serait grandissant et il aurait été observé que la tendance à enrôler des enfants au sein des factions rebelles seraient plus importante dans les zones ayant été attaquées par les Forces armées ou la Garde présidentielle. (Paragraphe 67).

Le Représentant demande à tous les acteurs concernés de respecter leurs obligations en vertu du droit international et de procéder au plus vite à la démobilisation de ces enfants. Selon les informations recueillies durant ces entretiens, l’UNICEF serait prêt à apporter son assistance dans ce domaine, et certains groupes rebelles auraient indiqué leur volonté de démobiliser les enfants se trouvant dans leurs rangs. Le Représentant demande au Gouvernement de coopérer au processus et de donner les garanties nécessaires à sa mise en œuvre. Il demande en outre aux organisations internationales compétentes de traiter cette question en priorité et il appelle le Représentant spécial du Secrétaire général en République centrafricaine à peser de tout son poids pour que cette pratique soit éradiquée. (Paragraphe 68).

Le Représentant s’inquiète par ailleurs de la stigmatisation dont font l’objet les jeunes hommes de la part des forces de sécurité qui les perçoivent comme des rebelles ou des collaborateurs de ceux-ci. Cette stigmatisation accroît le sentiment permanent d’insécurité dans lequel vit la population et limite encore plus la liberté de circulation d’un groupe déterminé de la population. (Paragraphe 69).

Le Représentant s’inquiète tout spécialement de la situation des enfants enrôlés dans les rangs de certaines factions armées rebelles et il rappelle que les Principes directeurs (Principe 13) stipulent qu’en aucune circonstance les enfants déplacés ne seront enrôlés dans une force armée. (Paragraphe 82).

Le Représentant recommande aux groupes armés:

a) De respecter le droit international humanitaire. En particulier ils doivent respecter la distinction fondamentale entre combattants et civils et s’abstenir de tous les actes prohibés par le droit international humanitaire, tels que l’utilisation de la population civile comme base de leurs actions, l’enrôlement des enfants dans leurs rangs et l’exposition de la population civile à des risques de représailles.

b) De procéder sans délai au désarmement et à la réhabilitation immédiats des enfants soldats en coopération étroite avec les organisations internationales spécialisées en la matière. (Paragraphe 86)

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