Journée de débat général: remarques finales de Mr. Jean Zermatten, membre du Comité des droits de l'enfant

Il est évidemment très difficile, sinon impossible de faire une synthèse d'une journée aussi riche en avis, opinions, exemples, propositions, même parfois provocatrices, défis, présentations, expériences diverses et si intéressantes. Journée rendue encore plus passionnante par la présence de plus de 30 enfants de 4 continents. Il a donc fallu effectuer un choix qui, comme tous les choix, provoque des frustrations pour les auditeurs, comme pour l’orateur.

Le critère du choix de cette conclusion repose sur l’évocation des thèmes transversaux qui touchent le thème général de la journée de discussion générale (l’article 12 CDE) et les 2 thèmes particuliers retenus pour les groupes de travail (la parole de l’enfant dans les procédures ; la parole de l’enfant dans la vie publique).

THEMES TRANSVERSAUX

A. Signification de l’art 12 CDE

L'article 12 (pris individuellement ou en relation avec les articles 13, 14, 15, 16 et 17, entre autres…) est le socle de la notion de participation ….;

… mais il constitue surtout un droit, non négociable, car attaché à la personne de l'enfant.

Parler de droit signifie qu'il est exigible et qu'il y a des débiteurs de ce droit : ce sont les Etats….

…qui ont l'obligation de mettre en place des mécanismes adaptés aux enfants et à leur développement progressif et d'aménager les espaces de parole nécessaires pour ce faire.

Parler de droit est aussi …

- passer d'une approche protectionnelle (certains disent paternaliste) à une approche basée sur le droit (rigths based approach) où il est reconnu que chaque enfant, peu importent son âge et sa situation, est titulaire de ce droit

- et donc concevoir les rapports avec les enfants comme fondés sur cette approche nouvelle.

B. Les Conditions

Dans l'approche basée sur le droit, la considération que l'on accorde à la participation ne peut pas consister en un cadeau (je t'offre, avec bienveillance, de dire un mot…), une parole alibi ou prétexte (faire parler l'enfant, mais sans l'écouter, ni l'entendre) ou en une manipulation (utiliser l’enfant pour être le porte-voix de ce que l'on souhaite). Pour que la participation soit un exercice véritable, il faut le respect des conditions suivantes :

  • un changement de mentalité chez l'adulte, qu'il soit parent, maître d'école, entraîneur sportif, représentant d'une institution publique ou privée ou politicien, voire… membre du Comité des droits de l'enfant,
  • un apprentissage de l'écoute, qui n'est ni simple, ni neutre et qui demande certaines aptitudes,
  • un équilibre à trouver entre une trop grande protection (infantilisation des enfants) et une sur-responsabilisation (demander aux enfants de prendre les décisions à la place des adultes ou les punir davantage puisqu’ils ont pu s’exprimer),
  • le respect de l'enfant, comme un partenaire véritable et non seulement comme un individu sympathique, mais petit, donc inférieur.

C. Bénéfices

Il ne fait de doute pour aucun d'entre nous que de reconnaître à l'enfant le droit d'exercer sa parole et de participer dans les différentes activités de la vie apporte un certain nombre de bénéfices :

  • pour l'enfant lui-même qui gagne en estime, en confiance, en compétences, ce qui le renforce et le rend plus résilient, tout en le préparant à son futur de citoyen. Il devient acteur de la décision, donc concerné pour l'appliquer ou la respecter,
  • pour la famille qui modifie son regard sur l'enfant en le considérant comme sujet et donc plus digne de respect (donc un facteur de prévention des abus et des violences domestiques),
  • pour la communauté en général, qui a besoin d'intégrer, dès que possible, ses membres, donc les enfants, tous les enfants, surtout ceux qui sont les plus vulnérables et les moins disposés, soit par naissance, soit à la suite de circonstances difficiles, à s'exprimer,
  • pour l'Etat, dont les décisions gagnent en légitimité puisqu'un groupe, jusque alors oublié ou laissé pour compte, (les enfants, comme autrefois les femmes) a été entendu,
  • pour la démocratie, puisque la connaissance et l'exercice par une personne de ses droits constituent les éléments fondamentaux sur lequel elle repose ; en ce temps où la démocratie est en déficit de participation et souvent se cherche dans de nombreux pays, croire aux enfants est certainement un remède simple et prometteur. Un « investissement », comme cela a été répété à maintes reprises.

 

D. Responsabilités

Il paraît, au moment de se quitter, que d'avoir ouvert ce débat débouche sur de nouvelles responsabilités :

  • celle des enfants présents ici, d'être le relais envers leurs frères et sœurs, leurs écoles, leurs organisations, du souci de développer leur rôle actif et leur participation dans la société (de nombreux modèles ont été présentés),
  • celles des ONGs et des adultes participants de cette journée et convaincus, comme ils l’ont exprimé si fortement, de continuer à défricher le terrain de la participation effective des enfants,
  • celle de nous tous, rendre les Etats conscients qu'ils doivent faire sauter les obstacles pour recueillir la parole de l’enfant et lui accorder sa juste place, comme d’aménager les possibilités concrètes d'exercer le droit de participation,
  • celle du groupe restreint des membres du Comité de veiller au respect de cette obligation des Etats et d'établir, comme promis, une Observation générale à cet effet.

 

POUR TERMINER

Parler, participer, décider.

Ces trois verbes expriment bien le déroulement par étapes de l'exercice du droit de participation. Ceci d'un point de vue fonctionnel.

Mais derrière le droit et sa fonction, il y a semble-t-il une autre conséquence pour notre monde du 3eme millénaire :

Reconnaître aux enfants ce qui leur revient de droit en leur permettant de participer aux décisions de la société est certainement inaugurer un nouveau contrat social. Celui où les enfants sont devenus, enfin, des personnes à part entière, destinataires certes de prestations, de soins et de protection, mais avant tout détentrices de droits, dont celui de participer est le symbole.

Donc des PARTENAIRES véritables.

pdf: http://www.ohchr.org/english/bodies/crc/docs/discussion/Zermattenclosing...

Pays

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