Soumis par Louise le
[Le 2 avril 2015] - Amos Yee a 16 ans et un sacré culot. Il se taillait un joli succès sur Internet depuis quelques mois en postant des sortes d'éditoriaux vidéo, où il se moque des fêtes de Noël, étrille le système scolaire («Pourquoi vous devez quitter l'école»), et n'hésite pas à parler Saint-Valentin et masturbation.Aussi, lorsque Lee Kuan Yew, qui avait proclamé l'indépendance de la ville-Etat il y a presque cinquante ans, est mort le 23 mars, le jeune rebelle n'a pas tardé à s'emparer du sujet, tournant depuis sa chambre huit minutes de pamphlet intitulé «Lee Kuan Yew est enfin mort!»
Pendant ce temps, le Premier ministre de Singapour et propre fils du défunt, Lee Hsien Loong, avait décidé d'organiser une semaine de funérailles nationales et des centaines de milliers de personnes se pressaient au siège du Parlement pour se recueillir sur la tombe de celui qui était resté trente ans au pouvoir. Amos Yee, de son côté, qualifiait le patriarche, mort à 91 ans, d'«horrible personne» dont «les défauts flagrants comme dirigeant ont toujours été cachés parce que tout le monde a peur». Dans sa vidéo, postée sur You Tube, il ose un parallèle avec Jésus-Christ et la «soif de pouvoir», remet en cause le discours dominant sur la prospérité, le bonheur de vivre à Singapour et la liberté d'expression, etdéfie le Premier ministre de l’arrêter s’il l’ose.
A peine Lee Kuan Yew en terre - plusieurs personnalités étrangères, comme Shinzo Abe et Bill Clinton, avaient fait le déplacement -, l'adolescent a été arrêté et menacé de trois ans de prison pour «intention délibérée de blesser la religion catholique», ainsi que de «partage de matériel obscène», pour une photo brièvement postée sur son compte Facebook. Un des avocats des autorités déclarant à un journal local qu'«il y a des limites à la liberté d’expression». Amos Yee a finalement été libéré le lendemain, avec le versement d'une caution de 20 000 dollars singapouriens (13500 euros) par ses parents, visiblement plus fâchés que lui de l'aventure.