PAKISTAN : l'exécution de Shafqat Hussain suspendue

Mise à jour le 23 mars 2015 : le sursis accordé a été prolongé à 30 jours par le Président du Pakistan

 

[Le 19 mars 2015] - Soupir de soulagement au Pakistan chez les défenseurs de Shafqat Hussain, ce jeune homme condamné à mort pour meurtre en 2004, et qui devait être exécuté ce jeudi matin. Or tard dans la soirée de ce mercredi 18 mars, le président Mamnoon Hussain a suspendu l’ordre d’exécution de celui qui est devenu pour certains un symbole des dérives de la justice pakistanaise.

Shafqat Hussain a été condamné à mort par un tribunal anti-terroriste en 2004, pour l’enlèvement et le meurtre d’un enfant de 7 ans. Mais, selon sa famille et ses défenseurs, il n’avait que 14 ans au moment de sa condamnation, un état de fait qui n'a pas été pris correctement en compte comme il l'aurait dû selon eux. Or la loi interdit la condamnation à mort d’un mineur. En outre, Shafqat Hussain affirme que les aveux qui ont mené à sa condamnation ont été obtenus sous la torture.

Ceux qui le soutiennent en ont donc fait un cas emblématique des profondes lacunes qui minent le système judiciaire pakistanais. C’est pour ça qu’ils ont mené campagne pour empêcher sa pendaison. Le président les a entendus et a repoussé hier sa condamnation pour une durée de 30 jours. C’est la deuxième fois que son exécution est reportée. La première fois, une enquête devait être menée pour déterminer son âge exact, mais elle n’a toujours pas eu lieu.

Shafqat Hussain a donc obtenu un sursis. Mais ce n’est pas le cas de dizaines d’autres condamnés à mort qui ont été exécutés ces dernières semaines. Et manifestement, ce n’est pas fini. Le Pakistan a levé en décembre un moratoire sur la peine de mort en place depuis 6 ans. C’était juste après l’attentat qui a fait plus de 150 morts dans une école de Peshawar, dont une majorité d’enfants. On avait recommencé à ce moment-là à exécuter des condamnés dans des affaires de terrorisme. Or la politique a changé il y a quelques jours, dans une certaine discrétion, sans annonce officielle, et ce sont désormais tous les condamnés à mort qui sont concernés par la levée du moratoire, peu importe le crime pour lequel ils ont été condamnés. Soit près de 8 000 personnes qui sont dans les couloirs de la mort pakistanais, selon diverses associations. Et les exécutions s’accélèrent. Vingt-cinq personnes ont été pendues depuis le début de la semaine, 52 en tout depuis décembre.

Le Pakistan critiqué par l'UE

Les organisations de défense des droits de l’Homme et une partie de la société civile montent au créneau et constatent qu’à ce rythme, le Pakistan rejoint rapidement le peloton de tête des pays où on exécute le plus. Plusieurs pays ont dénoncé aussi cette décision. L’Union européenne a appelé plusieurs fois déjà les autorités à revenir sur leur décision. Mais force est de constater que ces critiques, ici, sont minoritaires. Il y a eu hier mercredi des rassemblements en soutien à Shafqat Hussain, mais les manifestants étaient peu nombreux. Beaucoup de gens approuvent la peine capitale, y compris dans des cas comme celui de Shafqat.


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Auteur: 
Gaëlle Lussiaa-Berdou

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