Soumis par Louise le
[Le 20 mai 2015] - Le parquet nigérian a abandonné mercredi les poursuites contre une adolescente de 15 ans accusée d'avoir empoisonné son mari de plus de vingt ans son aîné avec de la mort aux rats.
Originaire d'une famille musulmane pauvre, Wasila Tasi'u était poursuivie pour homicide volontaire pour le meurtre de son mari, Umar Sani, 35 ans, deux semaines après leur mariage en avril 2014.
L'accusation avait requis la peine de mort contre Wasila Tasi'u en mars, au dernier jour d'un procès qui a duré plusieurs mois. La défense, elle, avait plaidé l'acquittement.
Le procureur Lamido Abba Soron-Dinki a demandé mercredi à la Haute Cour de Gezawa, en périphérie de Kano (nord du Nigeria) de "classer l'affaire d'homicide volontaire contre Wasila Tasi'u".
"C'est le coeur gros que je requiers l'abandon des poursuites contre l'accusée", a-t-il ajouté.
Le juge Mohammed Yahaya a déclaré à la Cour avoir besoin d'une déclaration orale ou écrite du bureau du procureur général de Kano avant de pouvoir abandonner les poursuites de façon formelle et d'autoriser la relaxe de Wasila. Cette déclaration doit être présentée le 9 juin, a-t-il poursuivi.
Selon des sources judiciaires à Kano, les autorités nigérianes ont subi des pressions importantes pour classer cette affaire qui a suscité des critiques de nombreuses organisations de défense des droits de l'Homme.
M. Soron-Dinki a déclaré à l'AFP que l'émir de Kano, Mohammed Sanusi II, une des autorités les plus importantes du monde musulman au Nigeria, avait offert "d'héberger" Wasila après sa libération.
L'émir, connu sous le nom de Sanusi Lamido Sanusi, avait la réputation d'être très progressiste quand il occupait le poste de gouverneur de la Banque centrale nigériane.
On ignore, pour l'instant, si l'émir a joué un quelconque rôle dans l'abandon des charges contre la jeune fille.
De nombreux défenseurs des droits de l'Homme ont demandé la libération immédiate de Wasila, mettant en avant le fait que les rapports sexuels qu'elle a eus avec son mari peuvent être considérés comme des viols, une adolescente de 14 ans ne pouvant être consentante.
Mais dans le nord du Nigeria, majoritairement musulman, les mariages d'adolescentes avec des hommes beaucoup plus âgés sont très répandus, en particulier dans les zones rurales pauvres.
Plus d'informations
- L'étude de cas de CRIN sur une affaire similaire : "NIGERIA: A child bride, a dead husband and a long battle" (en anglais).