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[MONROVIA, le 11 mai 2006] - Le gouvernement libérien et les Nations unies ont promis d’ouvrir une enquête à la suite d’un rapport de l’organisation caritative anglaise Save the children faisant état d’abus sexuels contre des femmes et des fillettes au Liberia. Dans un rapport publié ce mois-ci, l’organisation révèle que beaucoup de fillettes – dont certaines ont à peine huit ans - se prostituaient pour de l’argent, de la nourriture ou d’autres services. Le rapport épingle notamment certains responsables de camps de déplacés, des casques bleus, des fonctionnaires et des enseignants qui useraient de leur autorité pour commettre de tels actes. Le gouvernement du Liberia dit prendre ces conclusions très au sérieux. « Le rapport sera étudié de près et le ministère de la Justice se chargera de poursuivre les personnes qui ont commis de tels actes contre les jeunes filles de notre pays», a déclaré Mohammed Sheriff, ministre-adjoint à la Santé. «Nous sommes confrontés à un grave problème.» Le rapport, From Camp to Community: Liberia Study on Exploitation of Children (Du camp à la communauté : Enquête sur l’exploitation des enfants libériens) se base sur les conclusions d’une étude menée l’année dernière auprès de quelque 300 personnes, dans quatre communes très peuplées et plusieurs camps de réfugiés, et portant sur la prostitution des mineurs. «Tous les membres des communautés et les réfugiés ont évoqué l’étendue du problème et la résignation des adultes et des enfants face au fait que la prostitution contre de l’argent, des services ou comme moyen de survie, était devenue une solution à laquelle de plus en plus d’enfants avaient recours pour subvenir à leurs besoins et à ceux de le leur familles », a expliqué Save the Children. En réponse au rapport de Save the Children, la Mission des Nations unies au Liberia (Minul), qui compte aujourd’hui quelque 15 000 soldats de maintien de la paix, a rappelé lundi qu’elle ne tolérait aucune forme d’exploitation et qu’elle avait commencé à mener sa propre enquête. «Des enquêteurs de l’unité de discipline et de conduite ont été immédiatement dépêchés dans les zones où les crimes allégués ont eu lieu», a déclaré lundi la Minul dans un communiqué. «Cette équipe appliquera la politique de tolérance zéro des Nations unies. Toute preuve d’exploitation ou d’abus sexuel sera traitée par des systèmes d’investigation compétents». Les Nations unies ont précisé que des Casques bleus en mission en Bosnie, au Cambodge, en République démocratique du Congo (RDC), au Timor oriental, au Kosovo et dans des pays de l’Afrique de l’Ouest avaient déjà été accusés d’abus sexuels. Bien que des allégations similaires aient été déjà formulées dès le déploiement des premières missions de maintien de la paix des Nations unies, il y a un demi-siècle, le scandale avait été dévoilé que l’année dernière lorsque les Nations unies ont découvert que des Casques bleus en mission en RDC avaient des rapports sexuels avec des femmes et des jeunes filles contre de l’argent et de la nourriture. Selon les responsables des Nations unies au Liberia, huit plaintes pour exploitation et abus sexuels ont été déposées contre certains employés des Nations unies depuis le début de l’année 2006. Un des Casques bleus a été reconnu coupable et a été «suspendu de ses fonctions sur le champ». Un employé d’une autre organisation a également été reconnu coupable si bien que la Minul a cessé de travailler avec l’organisation en question. La plupart des affaires sont en cours d’investigation, a déclaré la Minul à la veille de la publication du rapport de Save the Children. Mi-avril, la Minul a publié les résultats d’une enquête d’opinion publique sur la manière dont les Libériens considéraient les activités des forces de maintien de la paix dans le pays. Plus d’une personne interrogée sur cinq a fait part de ses inquiétudes vis-à-vis des abus sexuels commis par les Casques bleus. «Environ 22 pour cent des personnes interrogées ont indiqué que certains Casques bleus avaient violé des femmes et des enfants et encouragé les jeunes filles à se prostituer, les contraignant d’arrêter d’aller à l’école», ont indiqué les résultats de l’enquête. Les Libériens interrogés par IRIN ont souligné que le rapport de Save the Children a permis de mettre en lumière un problème inquiétant, et ont demandé au gouvernement d’agir. « J’ai entendu parler de ce rapport, mais je ne l’ai pas lu. J’ai entendu à la radio certains passages qui étaient très justes », a déclaré Geneva Cooper, un travailleur social libérien. « Dans ce pays, le taux de pauvreté est très élevé et la plupart des parents demandent à leurs filles de sortir avec des hommes plus âgés pour gagner de l’argent et aider leur famille. C’est un grave problème. » Les jeunes libériens sont très en colère, car selon eux, les jeunes filles sont contraintes d’arrêter leurs études. « Lorsque tu te promènes dans les rues, le soir notamment, tu vois des filles se faire embarquer dans des voitures pour finir dans des discothèques, alors qu'elles devraient normalement être en famille ou en train d’étudier. Ces hommes agissent vraiment mal », a déploré Jeremiah Quiah, un jeune étudiant. Selon le Liberia Women Media Action Committee, l’une des principales organisations de lutte contre l’exploitation et les abus sexuels du Liberia, les jeunes filles sont également victimes d’abus sexuels dans les écoles. «Il y a une affaire en cours dans le comté de Maryland [dans le sud-est du Liberia] qui met en cause un professeur qui aurait eu des rapports sexuels avec des élèves», a déclaré Estella Nelson, responsable de l’organisation. «Nous avons reçu le rapport et voulons que le gouvernement agisse pour que cessent ces pratiques.» Afin de lutter contre l’exploitation et les violences sexuelles, le gouvernement libérien a voté en décembre dernier une loi faisant du viol un délit. Avant l’adoption de ce texte, seul le viol collectif était considéré comme un acte illégal. Informations supplémentaires
pdf: http://www.irinnews.org/FrenchReport.asp?ReportID=6918&SelectRegion=Afri...'ouest&SelectCountry=Liberia