CANADA : La Commission Vérité et Réconciliation qualifie de "génocide culturel" la scolarisation forcée des enfants aborigènes

[Le 12 juin 2015] - Au Canada, grâce aux conclusions de la Commission Vérité et Réconciliation chargée d’enquêter sur la scolarisation forcée de dizaines de milliers d’Amérindiens et d’Inuits, de nombreux citoyens ont pris conscience du désastre causé par cet épisode douloureux qu’ont vécu les « autochtones ». Les réactions sont aussi nombreuses que diverses. Certains sont même allés jusqu’à parler de génocide culturel.

Un « génocide culturel » : c’est ainsi que le porte-parole de la Commission Vérité et Réconciliation a qualifié la scolarisation forcée de 150 000 enfants issus des premières nations, et avec lui une ex-juge de la Cour suprême. Au XIXe siècle, les dirigeants canadiens voulaient sortir l’Indien de l’enfant, qu’il devienne un Canadien comme les autres. De 1870 à 1970 environ, les enfants amérindiens et inuits étaient emmenés de force dans des pensionnats, souvent religieux : 5 à 7 % d’entre eux y ont d’ailleurs perdu la vie. Un taux de mortalité supérieur à celui des soldats canadiens impliqués dans la Seconde Guerre mondiale.

Loin de leurs familles et de leur peuple, on les obligeait à parler anglais ou français, à adopter les mœurs canadiennes et, incidemment, on leur apprenait à lire et à écrire. Quand ils rentraient chez eux, uniquement l’été, beaucoup avaient oublié leur langue, et les retrouvailles étaient difficiles. Sans compter qu’un nombre important d’enfants étaient battus, violés, agressés dans ces lieux d’éducation, et qu’à la perte de leur culture, s’ajoutait la honte de ces agressions.

Identité bouleversée

Quelles traces cet épisode douloureux a-t-il laissé dans les communautés ? De nombreux survivants qui ont témoigné à la Commission ont illustré comment ce séjour forcé dans ces pensionnats a bouleversé leur identité. Perdus à la fois dans leur communauté et dans la société canadienne, beaucoup ont basculé dans la violence. Une violence souvent vécue ou subie au sein même des communautés autochtones.

Depuis trente ans au Canada, près de 1 200 femmes amérindiennes ou inuites ont été assassinées ou ont disparu : un chiffre incroyablement plus élevé que les crimes concernant les autres canadiennes durant la même période. Une des recommandations de la Commission porte d’ailleurs sur la nécessité de mener une enquête nationale à propos de ces disparitions. Pour la première fois, un lien formel a été établi entre les mauvais traitements subis par les enfants autochtones, génération après génération, et leurs difficultés de vie actuelles.

La Commission espère améliorer la situation en misantsur l’éducation... Celle des autochtones, car les moyens consacrés à leur scolarisation (comparable à celle de leurs compatriotes canadiens) laissent encore à désirer faute d’investissements suffisants, mais aussi celle du reste des Canadiens sur cet épisode sombre de leur histoire. Certaines provinces canadiennes ont d’ailleurs inclus l’histoire des pensionnats autochtones dans les cours d’histoire.

Le Premier ministre du Québec a d’autre part suggéré de revoir la Constitution canadienne pour permettre aux autochtones de sortir de leur état de dépendance par rapport au gouvernement central. La loi sur les Indiens, qui date du XIXe siècle, les cantonne encore dans un rôle de citoyens de seconde zone. Le seul à garder le silence pour l’instant, c’est le gouvernement canadien. Il veut attendre l’automne avant de réagir officiellement aux recommandations de la Commission… 


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