Bulletin n° 187
Dans ce numéro
Actualités
Vie privée et droits numériques
Une action en justice introduite aux États-Unis accuse Disney d’autoriser des compagnies à intégrer dans ses applications de jeux des programmes visant à collecter les données personnelles des enfants qui les utilisent. Le loi américaine exige un consentement parental vérifiable pour toute collecte de données personnelles d’enfants de moins de 13 ans, et la plainte affirme que Disney a failli à ses obligations. Les informations concernant les enfants auraient également été vendues à d’autres entreprises.
En France, plusieurs syndicats d’enseignants expriment leur inquiétude après que le ministère de l’Éducation nationale a déclaré ne pas avoir de réserve sur l’usage à l’école des géants du numérique Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft. Jusqu’à présent, l’éducation nationale préconisait l’utilisation d’environnements de travail fournis par des éditeurs français, avec un strict encadrement de l’accès aux données. Durant l’été, des associations de défense des droits de l’homme ont demandé au gouvernement comment il comptait assurer la protection des données des élèves préconisée par la Commission nationale informatique et libertés (CNIL). Les grandes entreprises du web voient dans la conquête de l’éducation un moyen de fidéliser les enfants à leurs services ou de collecter leurs données personnelles. En 2015, le gouvernement français avait signé un accord de prestation de services avec Microsoft, qu’un collectif avait essayé sans succès de contester en justice. La « charte de confiance » qui doit encadrer cet accord, actuellement en cours de négociation, a déjà reçu des critiques de la CNIL, notamment sur son caractère non contraignant…
Toujours en France, un éditeur de logiciels a mis en vente sur son site un logiciel espion permettant soit-disant aux parents de « savoir si leur fils est gay ». Le site incitait les parents à surveiller la correspondance privée de leurs enfants, tout en dressant une liste de préjugés homophobes, élevés au rang d’« indices ». Pour se justifier, la société a déclaré sans complexe que les pages incriminées avaient « pour seul but d’améliorer le référencement internet sur les moteurs de recherche » et n’étaient pas destinées « à être lu[e]s par des humains ». Les commentateurs ont relevé que le site, anonyme et sans mentions légales, contrevient à la loi française, qui interdit la vente sans autorisation et l’incitation à l’usage illégal de logiciels espions.
Réformes législatives
Le parlement d’Haïti a initié les débats sur un projet de loi visant à interdire les mariages homosexuels ainsi que toute « promotion » de l’homosexualité. Rappelons que le mariage homosexuel n’a jamais été légal à Haïti. Les personnes reconnues auteurs ou complices de mariage entre personnes de même sexe encoureraient trois ans de prison et des amendes jusqu’à 7 000 euros. La loi prévoit également l’interdiction de « toutes manifestations publiques d'appui à l'homosexualité et de prosélytisme en faveur de tels actes ». Les homosexuels « avérés » pourraient se voir privés du « certificat de bonnes moeurs », exigé par exemple à l’inscription à l’université, ce qui équivaut à une criminalisation indirecte de l’homosexualité. L’argument de « défense de la famille » avancé par les sénateurs à l’origine du projet justifie de plus en plus souvent des violations des droits de l’enfant. Le projet de loi, approuvé par le Sénat, doit maintenant être examiné par la chambre basse du Parlement.
L’Italie a abandonné le projet de loi qui devait abolir le système de tribunaux pour enfants, après la condamnation d’experts en droits de l’homme, d’ONU et des 26 000 signataires d’une pétition contre le projet. Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe avait écrit au Président du Sénat italien pour lui signifier que cette réforme allait dans le mauvais sens.
Après la Jordanie et la Tunisie, le Liban a à son tour abrogé la disposition du Code pénal permettant aux violeurs d’échapper aux poursuites en épousant leur victime. Les associations de défense des droits de l’homme espèrent que cette série de réformes influencera les pays qui appliquent toujours de telles dispositions, dont le Bahreïn, l’Irak, le Koweït et la Syrie.
Justice
Au moins 209 enfants détenus dans l’état de Lagos au Nigéria ont été libérés sur décision de justice fondée sur leurs conditions de détention. Ils étaient détenus pour de petits délits avec les adultes, dans de très mauvaises conditions. Une enquête avait découvert un taux élevé de maladies, et certains enfants seraient morts avant cette inspection à cause des conditions d’hygiène et de la surpopulation carcérale.
En France, un tribunal administratif a annulé la décision de la ville de Châlon-sur-Saône de fournir aux élèves un menu unique dans les cantines scolaires. La ville avait ainsi mis fin à la distribution d’un menu alternatif sans porc, pratiquée dans les cantines scolaires depuis 1984. Pour annuler la décision, le juge ne s’est pas fondé sur une violation de la liberté de conscience et de culte, mais a déclaré que la décision n’était pas dans l’intérêt des enfants, puisque les élèves musulmans se trouveraient ainsi privés de repas lorsque celui-ci contient du porc. Le juge a toutefois précisé que cette décision d’annulation n’avait pas de portée générale et n’avait été prise qu’au regard des circonstances locales. La ville a annoncé sa volonté de faire appel.
Violences d'Etat
Aux Philippines, un adolescent de 17 ans a été abattu lors d’une prétendue opération anti drogue. Le chef de district de la police locale, ainsi que trois policiers ont été suspendus. Ils ont prétendu avoir agi en état de légitime défense, mais des caméras de vidéosurveillance montrent que la victime, Kian Loyd delos Santos a été traîné dans l’allée où son corps a été retrouvé avec une balle à l’arrière de la tête. Des centaines d’enfants ont assisté aux funérailles de l’adolescent, en faisant l’une des plus importantes manifestations contre la « guerre contre la drogue » du Président Duterte. Le porte-parole de la Présidence Ernesto Abella a qualifié la mort de Kian Loyd delos Santos de « cas isolé », mais d’après une organisation de défense des droits de l’enfant, la « guerre contre la drogue » aurait tué au moins 54 mineurs. Le ministre de la justice a quant à lui parlé de « dommage collatéral ». Le 24 août, le Sénat des Philippines a consacré une audience aux conséquences meurtrières de la « guerre contre la drogue » pour les mineurs. Mais considérant que les précédentes audiences consacrées au sujet n’ont mené à aucune action, Amnesty International a pressé le gouvernement d’ordonner une enquête indépendante sur la mort de Kian et sur tous les homicides imputables à la police.
Plus de 125 000 réfugiés de la minorité Rohingya ont fui la Birmanie en deux semaines. D’après l’Unicef, près de 80% d’entre eux seraient des femmes et des enfants. Des dizaines de personnes, dont au moins cinq enfants, se sont noyés en tentant de passer la frontière du Bangladesh. Le gouvernement a lancé contre les Rohingyas une opération militaire en réaction à une attaque menée le 25 août par un groupe armé. Selon l’armée birmane, la répression aurait fait 400 morts, dont 370 « terroristes » rohingyas. Mais des témoignages font état d’actes d’extrême violence à l’encontre de civils. Human Rights Watch a notamment documenté des villages incendiés. Les enfants qui n’ont pas passé la frontière n’ont pas accès à l’aide humanitaire.
Un rapport d’Amnesty International dénonce les méthodes du gouvernement de Bahreïn pour étouffer les dissidents et la société civile. Les répressions de manifestations on fait six morts dont un enfant pendant l’année écoulée.
L’Iran a exécuté le 10 août dernier Alireza Tajiki, un jeune homme condamné à mort alors qu’il était mineur, à l’issue d’un procès inéquitable, entaché d’allégations de torture. Depuis le début de l’année, l’Iran a exécuté quatre condamnés mineurs au moment des faits et d’après Amnesty International, au moins 89 autres seraient en attente d’exécution dans le couloir de la mort.
Les droits de l'enfant aux Nations unies
Actualités
La convention de Minamata sur le mercure est entrée en vigueur le 16 août dernier. Il s’agit du premier traité contraignant sur l’environnement depuis plus de dix ans. Il rend les Etats parties responsables des effets nocifs du mercure, et prévoit la régulation de l’utilisation du mercure dans les industries. Le mercure, qui attaque le système nerveux central, est particulièrement nocif pour les enfants. Les enfants et adultes qui travaillent dans l’extraction artisanale de l’or au Ghana, au Mali, au Nigeria, en Tanzanie, aux Philippines et en Papouasie Nouvelle Guinée y sont exposés quotidiennement. 74 Etats ont déjà ratifié la Convention.
Cet été, des agences de l’ONU ont publié des recommandations d’action pour améliorer la situation des jeunes réfugiés et migrants qui arrivent ou vivent en Europe sans parents ou adultes responsables. Élaborés par le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, l’UNICEF et l’International Rescue Committee (IRC), la feuille de route, intitulée « La voie à suivre » souligne la nécessité d'identifier ces jeunes, de les enregistrer via des procédures adaptées à l'enfant et de bâtir au plus vite une relation de confiance avec eux. Le document énonce des recommandations issues d’un vaste processus consultatif dirigé par les trois organisations, avec la participation d’une centaine de professionnels, notamment des tuteurs, des psychologues, des travailleurs sociaux, des juristes, des autorités compétentes de plusieurs États européens, de l’Union européenne et d’enfants réfugiés et migrants sur l’ensemble du continent. « Toutes les mesures et décisions doivent viser l’intérêt supérieur de l’enfant. Nous pouvons tous œuvrer en ce sens et la feuille de route nous indique la voie à suivre », a déclaré Diane Goodman, cheffe adjointe du Bureau du HCR pour l’Europe.
La Francophonies aux Nations unies en bref
Procédures spéciales
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Le Rapporteur spécial sur les droits des personnes handicapéesse rendra en France du 3 au 13 octobre 2017.
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Le groupe de travail sur la discrimination à l’égard des femmes se rendra au Tchad du 4 au 14 décembre 2017.
Organes des traités
Sessions récentes
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Le Comité des disparitions forcées a examiné le rapport initial duGabon lors de sa 13ème session qui se tient du 4 au 13 septembre.
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Le Comité pour l’élimination des discriminations raciales a examiné les rapports de Djibouti et du Canada lors de sa 93ème session, qui s’est tenue du 31 juillet au 25 août.
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Les recommandations pour le Canada s’inquiètent de la discrimination contre les enfants autochtones : malgré de nombreuses décision du Tribunal canadien des droits de l’homme, les communautés autochtones sont moins bien dotées en terme d’aides à l’enfance et à la famille que les communautés non-autochtones. Le Canada a également failli à traiter les causes des placements abusifs d’enfants autochtones. Le Comité a relevé d’autres violations des droits de l’enfants telles que les inégalités dans l’accès à l’éducation et la détention d’enfants migrants.
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Les recommandations adressées à Djibouti font état de violences contre les enfants dans les camps de réfugiés et du fait que l’état soit devenu « une plaque tournante de la traite, dont les victimes sont le plus souvent des femmes et des enfants étrangers ». Par ailleurs, elles relèvent que les pratiques traditionnelles néfastes telles que les mariages précoces et les mutilations génitales féminines sont très répandues, malgré leur interdiction.
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Le Comité sur les droits des personnes handicapées a examiné le rapport du Luxembourg lors de sa 18ème session qui s’est tenue du 14 août au 1er septembre 2017. Les recommandationss’inquiètent du fait que les enfants handicapés n’aient bien souvent pas l’opportunité de donner leur opinion sur les sujets qui les concernent.
Sessions à venir
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Le Comité des droits de l’homme examinera les rapports du Cameroun, de la République Démocratique du Congo et de Maurice lors de sa 121ème session qui se tiendra du 16 octobre au 10 novembre 2017.
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Le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes examinera les rapports du Burkina Faso et de Monacolors de sa 68ème session, qui se tiendra du 23 octobre au 17 novembre 2017.
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Le Comité contre la torture examinera les rapports du Cameroun, de Maurice et du Rwanda lors de sa 62ème session qui se tiendra du 6 novembre au 6 décembre. Il adoptera la liste de points à traiter pour l’examen du rapport de la Mauritanie, et la liste de points à traiter avant soumission du rapport pour la Suisse.
Dates limites des contributions de la société civile pour les pays francophones
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18 septembre 2017 : contributions pour l’examen des rapports du Cameroun, de la République Démocratique du Congo et de Maurice par le Comité des droits de l’homme. Plus d’informations.
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2 octobre 2017 : contributions pour l’examen des rapports du Burkina Faso et de Monaco par le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes. Plus d’informations.
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29 janvier 2018 :
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contributions pour la liste de points à traiter avant soumission du rapport, pour l’examen d’Andorre par le Comité contre la torture, lors de sa 63ème session. Plus d’informations.
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contributions pour l’examen des rapports du Luxembourgpar le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes lors de sa 69ème session.
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19 février 2018 : contributions pour l’examen des rapports de laRépublique centrafricaine et du Niger par le Comité des droits économiques, sociaux et culturels lors de sa 63ème session. Plus d’informations.
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1er mars 2018 : contributions pour la pré-session du Comité des droits de l’enfant concernant l’examen de la Belgique.
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13 mars : contributions pour la pré-session du Comité des droits économiques, sociaux et culturels concernant l’examen du Cameroun et de Maurice. Plus d’informations.
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26 mars 2018 : contributions pour l’examen du rapport du Sénégal par le Comité contre la torture, lors de sa 63ème session. Plus d’informations.
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Annonces
Publication
Le rapport de la 29ème session du Comité Africain d’Experts sur les Droits et le Bien-être de l’Enfant est disponible.
Appels à contribution
- Pour le rapport du Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU sur le champ d’action de la société civile. Les contributions doivent être soumises avant le 30 septembre 2017(délai initial du 1er mai étendu). Plus d’informations (en anglais). Appel à contributions (en français).
- Pour le rapport du Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU sur les droits de l'enfant dans les situations humanitaires. Les contributions doivent être soumises avant le 8 septembre 2017. Plus d'informations.
Appel à projet
Opportunité de financement de l’Union Européenne sur la violence contre les enfants, pour des projets nationaux ou transnationaux, ouverts à des candidats des pays membres de l’UE et d’Islande. Plus d’informations Date limite : 14 novembre 2017
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Le mot de trop...
« Il y a des enfants absolument incroyables — je dirais même, la plupart. J’aime ces enfants. »
Donald Trump, à propos des Dreamers, quelques jours avant de décider de la suppression du programme qui protégeait ces centaines de milliers de personnes ayant immigré illégalement aux États-Unis alors qu’ils étaient enfants.
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Dans quinze jours, retrouvez une édition consacrée aux conflits armés et aux enfants migrants et réfugiés.
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