Trinité et Tobago: Les homicides commis par des policiers restent impunis

Dans un rapport (en anglais) rendu public ce mercredi 26 avril, Amnesty International défend l’idée que des réformes structurelles au sein de la police - notamment la mise en œuvre d’un code de conduite basé sur le respect des droits humains, une chaîne de commandement transparente et l’engagement de poursuites pénales en cas d’atteintes aux droits humains - sont essentielles pour retrouver le soutien de la population, indispensable en matière de prévention et de lutte contre la criminalité.

Le rapport d’Amnesty International se penche sur la question des homicides commis par des policiers et des morts en garde à vue, en s’intéressant aux affaires signalées depuis 2003. Le rapport met en lumière le manque de détermination des autorités à mener des enquêtes et à poursuivre en justice les auteurs présumés de tels actes.

Le taux de criminalité à Trinité-et-Tobago est l’un des plus élevés des Caraïbes. Les meurtres et les enlèvements sont en hausse depuis plusieurs années. En réaction à l’augmentation de la criminalité, des appels en faveur de mesures policières plus sévères ont été lancés.

Entre 2003 et 2005, 35 personnes sont mortes, abattues par des policiers ou lors de leur garde à vue. En mars 2006, le policier Dave Burnett a été le premier et le seul fonctionnaire de police reconnu coupable du meurtre d’un civil pendant son service. Le manque d’informations concernant les enquêtes menées dans les autres affaires montre l’absence d’engagement des autorités à traduire en justice les auteurs présumés de tels actes.

« Un code de conduite, incluant les actions ou omissions considérées comme des atteintes aux droits humains et tenant chaque fonctionnaire de police pour responsable des actes commis, ne servirait pas seulement à prévenir de nouvelles atteintes aux droits humains, mais aurait pu empêcher la mort de 35 personnes dans les îles depuis 2003 », a déclaré Kerrie Howard, directeur adjoint du programme Amériques d’Amnesty International.

Le 13 octobre 2004, Sherman Monsegue, dix-sept ans, a été abattu par un policier. Sherman se trouvait dans la rue avec un ami, lorsque des policiers sont arrivés et ont ouvert le feu sur les deux jeunes qui ont pris la fuite. Sherman est mort à l’hôpital. Selon la police, Sherman aurait ouvert le feu le premier - ce qu’ont démenti un certain nombre de témoins.

Une enquête de police a été ouverte presque un an après la mort de Sherman. Des policiers appelés en tant que témoins ne se sont toujours pas présentés à ce jour. Selon les informations dont nous disposons, ces policiers sont toujours en service actif dans la zone. Les avocats représentant la famille n’ont pas eu accès à tous les documents concernant l’affaire, ils n’ont notamment pas pu consulter certaines déclarations de témoins. L’enquête pour rechercher les causes de la mort de Sherman Monsegue devait reprendre le 25 avril.

En avril 2004, Galene Bonadie, quarante-et-un ans, a été tuée par un policier à Morvant, un village du nord-ouest de Trinité. Galene Bonadie a été tuée à bout portant avec un fusil, après avoir tenté d’intervenir auprès de policiers qui frappaient un homme. L’enquête pour rechercher les causes de sa mort a pris du retard et est suspendue depuis début 2005.

« L’affaire Galene illustre parfaitement le choix fait par les forces de police pour répondre à l’augmentation de la criminalité : le recours à la force meurtrière, sans égard pour les terribles conséquences que cela implique pour des dizaines de personnes et leurs familles.

« Les enquêtes judiciaires après mort violente, menées par le coroner (officier de justice chargé de faire une enquête en cas de mort violente, subite ou suspecte), doivent devenir obligatoires dans toutes les enquêtes sur des affaires de mort en garde à vue ou mort par balles tirées par des policiers. Les enquêtes visant à rechercher les causes de la mort devraient également être menées de manière effective dans des délais raisonnables pour que justice soit rendue aux proches de la victime », a déclaré Kerrie Howard.

Les récentes mesures prises pour contrer la criminalité de rue et améliorer les résultats de la police n’ont pas vraiment amélioré la situation.

Le Service des plaintes contre la police, un organe civil de surveillance créé en 1993 pour suivre le traitement des plaintes par les services de police, a enregistré 12 919 plaintes entre 1999 et 2004. Au nombre de celles-ci figuraient des plaintes pour coups et blessures, harcèlement et destruction de biens. Seuls vingt pour cent des dossiers ont fait l’objet d’une enquête.

Amnesty International espère que la Loi sur le service des plaintes, qui vient d’être promulguée, lui permettra de mener davantage d’enquêtes indépendantes et que ses recommandations deviendront contraignantes.

« Le maintien de l’ordre est une tâche très souvent difficile et dangereuse qui demande une formation et des qualités professionnelles. Les droits humains devraient être au centre de tout processus de réforme, cette approche représentant le meilleur moyen de s’assurer qu’au niveau de la pratique policière, la dignité humaine et les droits de chaque personne à Trinité-et-Tobago seront reconnus, et une protection efficace contre la criminalité assurée . »

Complément d’information

En janvier 2006, Amnesty International a écrit aux autorités de Trinité-et-Tobago, mettant en avant ses inquiétudes concernant les allégations de violations des droits humains impliquant des policiers. L’organisation demandait des informations sur certains des dossiers cités dans le rapport. Elle n’a obtenu aucune réponse à ce jour.

Le rapport Trinidad and Tobago : end police immunity for unlawful killings and deaths in custody (index AI / AMR 49/001/2006) est disponible sur le site Secrétariat international d’AI, à l’adresse suivante http/web.amnesty.org/library/index/ENGAMR490012006


pdf: http://www.amnestyinternational.be/doc/article7598.html

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