LIBAN : « Penser avant de cliquer », ou comment sensibiliser les enfants à un usage sécurisé d’Internet

Summary: Utiliser Internet sans risque est un défi auquel sont confrontés les adolescents et leurs parents. Les experts préconisent l’encadrement et la sensibilisation des jeunes.

[Le 26 janvier 2012] - Faut-il avoir peur pour la sécurité des enfants sur Internet ? C’est à cette question que s’est efforcé de répondre le séminaire organisé, hier, par le Conseil supérieur pour l’enfance relevant du ministère des Affaires sociales, en collaboration avec l’organisation Worldvision, à l’Hôtel Rotana, Hazmieh.

Et ce, à quelques jours de la Journée mondiale pour un Internet plus sûr, qui sera célébrée le 7 février prochain. Un séminaire qui a mis l’accent sur l’importance des nouvelles technologies et sur la nécessité pour les parents, les éducateurs et les enfants eux-mêmes de faire preuve de vigilance sur la toile. Mais qui refuse de dramatiser les risques. Car l’enfant n’est pas plus en danger sur Internet que dans le monde réel.
Soucieux de sensibiliser les jeunes du Liban, mais aussi leurs parents et éducateurs, le ministère des Affaires sociales cherche donc à promouvoir l’utilisation responsable des nouvelles technologies. « Les éducateurs ont le devoir de pousser les enfants à faire un usage sûr d’Internet et à opter pour des choix responsables, afin de les aider à se forger une personnalité équilibrée et apprendre à communiquer avec l’autre », affirme Élie Mikhaël, secrétaire général du Conseil supérieur pour l’enfance. Il ne manque pas de souligner le rôle de la presse, « qui doit contribuer à cette sensibilisation ».

S’adapter aux nouvelles technologies
Le but n’est pas de pousser parents et éducateurs à la panique. Ni de crier au danger. Surtout pas d’interdire à leurs enfants l’accès à Internet. Bien au contraire. « C’est la société qui doit évoluer, vu l’importance de la technologie de l’informatique », note le professeur Georges Sadaka, expert en information et enseignant à l’Université libanaise. Il évoque ainsi les transformations sociales, liées à l’informatique. « Nous recevons aujourd’hui les informations à la vitesse de l’éclair, explique-t-il, alors qu’auparavant, il fallait des années pour transmettre la moindre information. » Et d’ajouter qu’Internet a créé un monde virtuel, sans frontières, en constante relation, et même changé les modes de loisirs, l’économie mondiale et la Bourse.
Certes, ces changements liés au monde virtuel comportent des conséquences et certains risques pour les enfants. M. Sadaka évoque, à titre d’exemple, l’accès facile aux sites pornographiques, les longues heures d’affilée devant l’écran, le manque de sport, les informations non fiables... « Mais ces risques sont limités face aux possibilités de recherche et de rencontres qu’offre la Toile », estime-t-il, invitant les parents à accompagner leurs enfants, autant que possible. Le professeur interpelle même la presse, insistant sur son rôle d’accompagnateur de ce changement. « Elle doit œuvrer au service de la société, expliquer les comportements et les changements et montrer du doigt les risques », conseille-t-il.
Une étude menée en 2010, dans le caza de Jbeil, par le ministère des Affaires sociales devrait permettre de mieux comprendre le comportement des adolescents face aux nouvelles techniques de l’information. Cette étude sur 600 jeunes internautes et utilisateurs de nouvelles technologies, âgés entre 15 et 18 ans, tous étudiants, a été présentée par la coordinatrice du Conseil supérieur pour l’enfance, Katia Haddad. Elle souligne que la grande majorité de l’échantillon, 89 %, habitent dans un logement équipé d’un ordinateur et que 45 % d’entre eux ont un téléphone portable. Elle montre aussi l’engouement des jeunes pour les cafés Internet : « 69 % d’entre eux fréquentent ces cafés, soit pour jouer, soit pour chatter. » « Au niveau de leur comportement, seulement 59 % des jeunes estiment que donner des informations personnelles à des étrangers sur Internet représente un danger. De même, seulement 40 % trouvent qu’il est dangereux de rencontrer une personne connue sur le Net. »

 

Accès facile à la pornographie
L’étude met donc en valeur l’imprudence de ces adolescents, qui n’hésitent pas à rencontrer des personnes qu’ils ont connues sur Internet. « 75 % des jeunes qui ont répondu par la positive à une proposition de rencontre y sont allés seuls et ne l’ont raconté à personne », souligne Mme Haddad. Et d’ajouter que de manière générale, les parents ne sont pas au courant de ces rencontres à risques, car leur autorité est faible lorsqu’il est question d’Internet. « Une preuve que les jeunes sont peu conscients des risques de telles rencontres, notamment de l’existence de prédateurs sexuels qui s’inventent une identité pour faire des rencontres, par le biais du chat », note la coordinatrice.
C’est une étude qualitative qu’a menée de son côté Worldvision, dans le cadre d’un projet lié à la sécurité des enfants sur Internet. « Une étude basée sur des discussions avec des groupes de jeunes, dans des camps palestiniens et à Bécharré », explique Zeina Khoury, coordinatrice du projet. Si les parents se disent satisfaits que leurs enfants fassent des recherches sur Internet, et tranquilles de les savoir à la maison ou au cybercafé, ils sont conscients des conséquences et des risques liés à la Toile. « Ils déplorent notamment l’accès de leurs enfants aux jeux de hasard, à la pornographie, aux informations non désirées, et font part de leur peur de la dépendance aux jeux ou du chat à risques », explique Mme Khoury. Inquiets pour la santé mentale et physique de leurs enfants, ils ne savent toutefois pas comment les protéger. « Quant aux adolescents, inconscients des inconvénients du Net, mais pertinemment conscients des risques d’accoutumance, ils estiment pouvoir faire face aux problèmes qu’ils rencontrent sur Internet, sans en parler avec leurs parents », poursuit-elle. D’où l’importance du dialogue entre parents et enfants et la nécessité pour les parents d’être formés aux nouvelles technologies.

Cyberintimidation et sextings
L’idéal serait d’encourager les enfants à trouver le juste équilibre entre la vie virtuelle et la réalité, comme le préconise l’expert technique, Akram Karamé. À l’intention des parents, il estime qu’ils devraient surveiller leurs enfants sur Internet, comme ils le font dans la vie quotidienne. « Les parents doivent enseigner à leurs enfants à préserver leur réputation sur le Net », souligne-t-il, se demandant pourquoi les jeunes tiennent tant à exposer leurs photos en ligne. « Nombre d’études dans le monde observent, de plus, que les enfants sont capables de se protéger sur le Net. Mais il n’en reste pas moins qu’ils devraient se tourner vers un adulte de confiance, s’ils rencontrent des problèmes sur Internet », conseille M. Karamé.
Pourquoi est-il désormais nécessaire d’aborder le sujet de la sécurité en ligne de l’enfant ?
« Parce que plus du quart de la population libanaise est aujourd’hui connectée à Internet et qu’il ne faut pas occulter les risques, liés notamment à la mauvaise utilisation du Net », explique l’expert. Il énumère alors les risques, dont nous retiendrons la cyberintimidation, qui peut se faire de la part d’adultes et d’enfants, souvent des camarades de classe, ou le cyberharcèlement, qui proviennent généralement de la part de prédateurs adultes. Il évoque aussi les sextings, sms via téléphone mobile, qui véhiculent un contenu inapproprié concernant une tierce personne sans le consentement de cette dernière, généralement une photo à caractère sexuel.
« Pensez avant de cliquer. » C’est le conseil que donne Akram Karamé aux adolescents dans leur relation à Internet. Car il trouve « précieuses les informations et les possibilités de communication auxquelles donnent directement accès les nouvelles technologies ». Un clin d’œil aussi à l’intention de certains parents, tentés de priver leurs enfants d’Internet, par peur irraisonnée des risques.

pdf: http://www.lorientlejour.com/category/%C3%80+La+Une/article/742044/%3C%3...

Pays: 

Please note that these reports are hosted by CRIN as a resource for Child Rights campaigners, researchers and other interested parties. Unless otherwise stated, they are not the work of CRIN and their inclusion in our database does not necessarily signify endorsement or agreement with their content by CRIN.