EUROPE : Les Défenseurs européens des enfants sonnent l’alarme au sujet des dangers inacceptables rencontrés par les enfants migrants

[10 février 2016] - La sécurité des enfants réfugiés est gravement mise en danger pendant leur voyage vers et à travers l'Europe. Ils risquent la mort, la maladie, la traite, la séparation des parents, l'extorsion de fonds, l'exploitation et les abus. Les pays et les institutions européennes ne parviennent pas à protéger les enfants migrants, selon les conclusions du Groupe de travail sur «les enfants en mouvement/les enfants migrants », du Réseau des Défenseurs européens des enfants (ENOC).

Les Défenseurs européens, représentés par le Président d’ENOC, Marc Dullaert, exhortent les dirigeants européens à donner la plus haute priorité à la sécurité des enfants. Le rapport sera présenté lundi après-midi à Vera Jourová, la Commissaire européenne chargée de la justice, des consommateurs et de l'égalité des genres, à sa demande. Séparément, dans une lettre ouverte, les médiateurs et défenseurs appellent conjointement les dirigeants européens Jean-Claude Juncker, Donald Tusk, Martin Schulz et d'autres hauts représentants de l'Union européenne à faire des enfants réfugiés leur plus haute priorité. Certains médiateurs présentent lundi également le rapport aux gouvernements de leurs pays respectifs.

Au cours de l’année 2015, le nombre d'enfants venant en Europe pour demander une protection internationale a considérablement augmenté. Pour 2015, malgré les grandes lacunes existant encore dans les informations fournies par Eurostat, au moins 337 000 enfants sont inscrits en tant que demandeurs d'asile, représentant 29% des demandeurs d'asile. Selon le HCR, 16% de tous les migrants qui traversaient la Méditerranée en juin étaient des enfants, tandis qu’en décembre le pourcentage d'enfants arrivant en Europe était passé à 35%.

Les principaux risques pour les enfants en déplacement

• Le voyage à travers la mer Méditerranée est dangereux pour les enfants - environ 30% de tous les migrants qui décèdent pendant la traversée sont des enfants. Les enfants arrivent mouillés et frigorifiés, et beaucoup risquent l’hypothermie, ce qui conduit à d’innombrables maladies comme la pneumonie. Les bénévoles qui travaillent sur les rives grecques rapportent que des enfants meurent à l'arrivée en raison d'hypothermie, à cause d’un manque de coordination et de soutien immédiat. A Lesbos, les migrants doivent marcher 70 km jusqu’au centre d'accueil, même si un certain nombre d'ONG transportent au moins les enfants et les familles.

• Les centres de transit présents le long de la route des Balkans ne sont pas suffisamment équipés pour l'hiver et manquent d'installations sanitaires de base. Selon le HCR, à la mi-décembre seulement 22% à 45% (en fonction du pays) des logements disponibles avait été adaptés à l’hiver.

• Les enfants risquent d’être séparés de leurs parents pendant le voyage, surtout lors des contrôles aux frontières chaotiques. Certains enfants sont confrontés aux abus sexuels et à la violence dans les centres de transit. Beaucoup d'enfants, à la fois les enfants accompagnés de leurs familles et les enfants non accompagnés, sont extorqués par des passeurs, y compris par des menaces visant des membres de la famille restés dans le pays d'origine ou dans des camps de réfugiés.

• Les enfants non accompagnés sont confrontés à un risque accru de devenir victimes de la traite et de l'exploitation sexuelle. Beaucoup d'enfants non accompagnés ne veulent pas divulguer aux autorités qu'ils sont mineurs, car ils craignent être placés en détention, rendant impossible pour eux de continuer leur voyage vers l'Europe du Nord.

• Malheureusement, les risques pour les enfants migrants ne cessent pas quand ils atteignent le pays de destination. Certains Etats ne disposent pas d'un système de tutelle pour les enfants non accompagnés, laissant ces enfants sans la protection d’un adulte. Dans d'autres pays la nomination d'un tuteur légal prend trop de temps. Des actions violentes des habitants sur les enfants réfugiés, et entre enfants réfugiés, sont rapportées dans différents pays. La faible proportion de filles arrivant les rend particulièrement vulnérables. De nombreux pays signalent aussi des enfants qui disparaissent des centres d'accueil, ou sont victimes de la traite ou d'exploitation. Beaucoup de pays autorisent que ces enfants soient placés en détention, dans certains cas pour plusieurs mois, dans des installations qui sont rarement adaptées aux enfants.

Appel à l'action

L’analyse de la réponse européenne à l'afflux accru de migrants révèle que l'Europe ne parvient pas à répondre à ces questions. Alors que le contrôle des frontières et les mesures visant à restreindre l'immigration sont une priorité pour l'UE et les pays membres, aucune action n’est prise pour protéger les enfants. Le programme de l'UE pour les migrations ̶ lignes directrices utilisées par les institutions de l'UE et les États membres pour gérer l'afflux ̶ mentionne seulement une action concernant les enfants, mention faite dans une note de bas de page.

Recommandations

• Les Défenseurs des enfants demandent à la Commission européenne d'élaborer d'urgence un plan d'action global de l'UE pour tous les enfants migrants. L'Europe dans son ensemble doit intensifier et prendre la responsabilité de ses engagements internationaux envers les enfants.

• Les Défenseurs des enfants conseillent aux dirigeants européens de donner la priorité aux enfants dans la mise en œuvre du régime de réinstallation afin de prévenir les risques auxquels les enfants sont confrontés lors de leur traversée de l'Europe. La Commission européenne a accepté de relocaliser 160.000 individus demandant une protection internationale, principalement de l'Italie et de la Grèce vers d'autres Etats membres. Cela devrait inclure à la fois les enfants non accompagnés et les enfants voyageant avec leurs familles.

• Les Médiateurs recommandent également une amélioration rapide des conditions des centres d'accueil et de transit à travers l'Europe. Les centres doivent être chauffés, avoir de l'eau chaude, des couvertures et des vêtements chauds. Des espaces adaptés aux enfants doivent être mis en place et pour ceux qui restent toute la nuit, il devrait y avoir des zones de couchages séparés pour les hommes, les femmes et les enfants.

• Les Médiateurs recommandent que les dirigeants européens fassent un meilleur usage des possibilités légales d’entrée dans l'UE. Cela comprend, par exemple, l’augmentation des possibilités de regroupement familial, l’augmentation des quotas de réinstallation et la délivrance de visas humanitaires.

• Les droits de l'enfant doivent être une partie intégrante de l'assistance financière attribuée aux pays tiers qui facilitent l'aide aux réfugiés, en particulier l'aide fournie par l'UE à la Turquie dans le cadre du plan d'action convenu le 15 Octobre et le 29 Novembre 2015. Cela devrait inclure le droit à l'éducation pour tous les enfants, la mise en place d’espaces adaptés aux enfants dans les camps de réfugiés et de systèmes de protection de l'enfant.

A propos de l'ENOC

Le groupe de travail représente 41 Défenseurs des enfants et Médiateurs européens basés dans 33 pays. Marc Dullaert, l'Ombudsman des Pays-Bas pour les enfants, dirige le groupe de travail en sa qualité de président du Réseau européen des Défenseurs des enfants. Les médiateurs pour les enfants de Flandre, Croatie, Angleterre, Grèce, Italie, Malte, Pologne, Catalogne et Suède sont également membres de ce groupe de travail. 

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