RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO, 1993-2003: Actes de Violence Commis contre les Enfants

Summary: Rapport du Projet Mapping concernant les violations les plus graves des droits de
l’homme et du droit international humanitaire commises entre mars 1993 et juin 2003 sur
le territoire de la République démocratique du Congo
Août 2010

Le chapitre II de la Section II du rapport (paragraphes 655-725) met l’accent sur la violence à l’égard des enfants qui représentent quasiment la moitié de la population et qui ont été victimes de violations
commises par toutes les parties aux différents conflits. Sur tout le territoire de la République
démocratique du Congo (RDC) entre 1993 et 2003, le rapport indique que « les enfants n’ont pas
échappé aux vagues de violences successives qui ont déferlé sur tout le pays. Bien au contraire, ils en
ont été les premières victimes ». (paragraphe 657)
Pendant les conflits, comme ceux qui ont eu lieu en RDC, les enfants sont « les victimes exclusives de
certains crimes, tels que le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats dans des hostilités. Ils sont parfois forcés de commettre eux-mêmes des crimes. Et dans les zones de conflit, ils sont souvent encore plus vulnérables parce que la violence supprime leur première ligne de défense - leurs parents. Même lorsqu’ils ne sont pas des victimes directes, le fait de voir leurs parents tués ou violés, leurs biens pillés et leurs lieux d'habitation incendiés laisse en eux de profonds traumatismes. Les déplacements à répétition les rendent plus vulnérables à la malnutrition et aux maladies. Leur jeune âge et leur virginité en font des cibles de croyances et superstitions abjectes, qui prétendent notamment que les relations sexuelles avec des enfants permettent de soigner certaines maladies ou rendent les violeurs invincibles. En dernier lieu, la guerre les prive généralement de leur droit à l’éducation et compromet ainsi leur avenir de façon durable ». (655)
En RDC, non seulement les enfants ne bénéficiaient pas de protection dans les zones de combat, mais
ils « ont même parfois été délibérément tués ou mutilés par les parties au conflit, souvent de manière
particulièrement atroce ». (658)
Pendant les massacres de réfugiés en 1996 et 1997, le rapport indique que « les troupes de
l’AFDL/APR 1 auraient tué indifféremment hommes, femmes et enfants, certains à coups de marteau sur la tête. À partir de 1998, lors des opérations contre des populations civiles, les éléments de l’ANC (la branche armée du RCD) et de l’armée rwandaise (APR) auraient attaqué des groupes pourtant
composés essentiellement de femmes et d’enfants, qu’ils auraient tués ou mutilés (Nord-Kivu), abattu des femmes et des enfants dans des églises (Maniema), mis le feu à des huttes et des maisons dans
lesquelles ils avaient enfermé des civils, dont des enfants (Katanga) et seraient allés jusqu’à décapiter
des enfants (province Orientale) ». (659)
Les ex-FAR/Interahamwe auraient aussi tué des enfants de façon délibérée, comme par exemple en
Équateur, en avril et mai 1997, « en représailles lorsque les Zaïrois refusaient de leur donner de la
nourriture ou leurs bicyclettes dans certains cas ». (660)
Les armées régulières auraient elles aussi commis des crimes contre des enfants, « comme par exemple les Forces armées angolaises (FAA), alliées au Gouvernement de Kinshasa, au Bas-Congo en 1998, et les Forces armées congolaises (FAC) au Maniema et au Katanga. À une occasion, les militaires FAC auraient tué sept garçons parce qu’ils avaient refusé de céder leurs vélos ». (661)
Dans le district de l’Ituri, de nombreux enfants auraient été tués ou mutilés par des groupes armés dans des conditions atroces. (662)
Même les lieux qui hébergent traditionnellement des mineurs n’ont pas été respectés par les
belligérants : « Un grand nombre d’écoles, d’hôpitaux, d’orphelinats ainsi que des locaux de plusieurs
organisations humanitaires ont été des sites de massacres d‘enfants » souligne le rapport. (664)
Ainsi les enfants, qu’ils soient hunde, tutsi, banyamulenge ou d’origine rwandaise, n’ont pas échappé aux violences ethniques qui ont ravagé les différentes régions du pays: « Lors de plusieurs attaques contre les réfugiés hutu rwandais dans les camps et sur la route, les éléments de l’AFDL/APR n’auraient pas fait de distinction entre les éléments armés et les réfugiés, parmi lesquels se trouvaient de nombreux enfants. Plus grave encore, les éléments de l’AFDL/APR auraient fréquemment attaqué des camps que les ex-FAR/Interahamwe avaient déjà désertés et qui se composaient essentiellement de personnes vulnérables et affaiblies comme par exemple les enfants non accompagnés, les vieillards, les femmes et les blessés ».(667)
Comme démontré dans le chapitre sur les violences faites aux femmes (voir la Fiche d’information n°3),la violence sexuelle était une réalité quotidienne de 1993 à 2003 qui n’a pas épargné les enfants.
« Utilisées comme instrument de terreur, sur la base de l’appartenance ethnique ou à des fins de torture et d’humiliation, les violences sexuelles ont souvent ciblé les jeunes filles et les enfants, dont certains n’avaient parfois pas plus de cinq ans. Leur virginité en a fait des cibles en raison de croyances et superstitions abjectes, qui prétendent que les relations sexuelles avec des enfants soignent certaines maladies (VIH/sida) ou rendent invincibles ». De nombreux groupes armés ont également utilisés les enfants comme esclaves et esclaves sexuels. (669)
Au-delà des attaques directes qu’ils ont subies, les enfants ont aussi été les victimes indirectes des
conflits armés. Les déplacements à répétition, la malnutrition, les maladies les ont affaiblis à un tel point qu’en 2001, le Comité international de secours [International Rescue Committee] concluait qu’un tiers des civils morts à cause des conflits dans l’est du Congo entre août 1998 et mai 2000 était des enfants âgés de moins de cinq ans. Le rapport indique que pendant la persécution des Kasaïens en 1993, pendant le régime de Mobutu, le taux de mortalité infantile a été particulièrement élevé, notamment lors de leur déportation forcée dans des conditions inhumaines. En 2003, dans le Sud-Kivu, Oxfam estimait que dans certaines régions, un quart des enfants mourraient avant d'avoir atteint l'âge de cinq ans. L'UNICEF rapporte que ces terribles statistiques font de la RDC l'un des trois pays au monde où il est le plus dangereux de naître. « En 2006, il mourrait ainsi chaque année plus d'enfants de moins de cinq ans en RDC qu'en Chine, alors que la population chinoise est 23 fois plus nombreuse que la population congolaise ». (671)
Le rapport décrit comment les guerres en RDC ont été marquées par l'utilisation systématique d’enfants associés aux forces et groupes armés (EAFGA). « De nombreuses batailles ont été remportées sur la simple base de la supériorité du nombre. Les groupes armés ont ainsi souvent recruté des enfants pour qu’ils servent de chair à canon. Certains ont été envoyés au combat sans même être armés... Pour les forcer à surmonter leurs émotions et leurs réticences à tuer, leurs supérieurs les ont brutalisés en les forçant à commettre des crimes particulièrement atroces. En cas de refus ils étaient exécutés. Après la prise d’une localité, il est arrivé que des filles soient amenées aux enfants soldats pour qu’ils les violent en présence des villageois et des soldats adultes. Cette stratégie « d’endurcissement » a aussi été utilisée dans les camps d’entraînement où les enfants ont été contraints de tuer et commettre des exactions en public. » (704)
Selon les estimations des agences de protection de l’enfant qui travaillent dans le domaine du
désarmement, de la démobilisation et de la réintégration (DDR) des enfants, au moins 30 000 enfants ont été recrutés ou utilisés par des forces ou groupes armés pendant le conflit. Ces statistiques font ainsi de la RDC l'un des pays au monde le plus affecté par le phénomène des EAFGA. (673)
Les EAFGA ainsi que les autres enfants « ont subi des violences indescriptibles, telles que les meurtres,
les viols, la torture, les traitements cruels, inhumains et dégradants, les déplacements forcés ainsi que la destruction de leurs villages, entre 1993 et 2003 et ont été privés de tous leurs droits ». (723) Bien que 30 000 enfant aient été démobilisés depuis 2004, beaucoup d’autres ont été recrutés voire re-recrutés pendant cette même période. Malgré le fait que plusieurs traités internationaux des droits de l'homme et du droit humanitaire, ratifiés par la RDC, interdisent explicitement le recrutement d'enfants, l’emploi de EAFGA par l’armée et les groupes armés est toujours une réalité, souligne le rapport. (717)
Soulignant qu’une génération quasi entière d’enfants congolais a été privé de son droit à l’éducation, le rapport conclu que « les enfants de la RDC ont trop souffert et laisser perdurer cette situation risque de créer une nouvelle génération qui n’aura connu que la violence et la violence comme moyen de
résolution du conflit, ce qui compromettra ainsi les chances de paix durable en RDC. » ( 725)

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pdf: http://www.crin.org/docs/Fiche4_enfants_FINAL.pdf

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