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Summary: Cette section résume les questions des droits de l'enfant soulevés par les mandataires des procédures Spéciales des Nations Unies.
Une introduction aux droits de l'enfant et les procédures spéciales des droits des Nations Unies est disponible ici :
http://www.crin.org/resources/infoDetail.asp?ID=18043&flag=report
Groupe de travail d’experts sur les personnes
d’ascendance africaine
Rapport de la Rapporteuse spéciale chargée d'étudier la question de la vente d'enfants, de la prostitution des enfants et de la pornographie impliquant des enfants, Mme Ofelia Calcetas-Santos 30 novembre - 4 décembre 1998 (Belgique et aux Pays-Bas)
La Rapporteuse spéciale a décidé de se rendre en Belgique et aux Pays-Bas à la suite de l'arrestation en Belgique en 1996 d'une personne très en vue soupçonnée d'être responsable de l'enlèvement, du viol et du meurtre de plusieurs enfants. Selon des allégations ultérieures, l'intéressée aurait été membre d'un réseau international organisé de pédophilie. (paragraphe 6)
Deux années plus tard, en 1998, la région a de nouveau fait parler d'elle avec la découverte, dans le cadre de l'"Opération Cathédrale" menée par la police britannique, d'un réseau de pédophilie essentiellement européen baptisé "WOnderland" fonctionnant sur l'Internet. Des perquisitions ont été effectuées par la police chez une centaine de personnes soupçonnées d'appartenir au réseau dans plusieurs pays en même temps dont la Belgique. (paragraphe 7)
Vente d'enfants :
En Belgique, la vente d'enfants est étroitement liée au vaste trafic d'êtres humains pour lequel ce pays est une véritable plaque tournante. La majeure partie des victimes sont des jeunes filles et des jeunes femmes d'Europe orientale, vendues à des fins de prostitution, qui portent l'étiquette de réfugiées (paragraphe 14)
Selon certaines allégations, des recruteurs de talents qui ne disent pas leur nom ramènent des jeunes garçons très doués pour le football de pays africains, en particulier du Nigéria, car recruter des footballeurs amateurs dans un pays en développement coûte moins cher que de former des joueurs locaux. Arrivés en Belgique, les jeunes sont ballottés d'un club de football à un autre. S'ils sont engagés par un club, il est probable que le recruteur y trouve largement son compte. Si leurs talents ne se confirment pas, ils sont généralement laissés à eux-mêmes. Étant entrés illégalement dans le pays, il ne leur est guère possible d'y rester légalement. (paragraphe 15)
Prostitution des enfants :
1. Prostitution d'enfants réfugies
La Rapporteuse spéciale s'est entretenue avec le Commissaire général aux réfugiés, qui lui a confirmé que la traite à des fins de prostitution de femmes et d'enfants portant l'étiquette de réfugiés, est un problème grave en Belgique. L'ampleur de ce problème a été confirmée tant par les interlocuteurs du Gouvernement que par les organisations non gouvernementales. (paragraphe 18)
L'immigration n'est plus autorisée par la loi depuis 1994, et le nombre de demandeurs d'asile a régulièrement augmenté depuis. En 1997, 1 146 provenaient de mineurs non accompagnés, parmi lesquels on comptait 719 garçons et 88 enfants de moins de 10 ans. (paragraphe 19)
Selon les renseignements communiqués à la Rapporteuse spéciale, c'est surtout aux femmes et aux jeunes filles que sont destinés ces réseaux, les hommes et les jeunes garçons ayant plus de chances de venir de leur plein gré. (paragraphe 21)
Un nombre important de victimes de ces réseaux de trafiquants viennent d'Europe de l'Est ou d'Afrique de l'Ouest ( paragraphes 20, 26)
La prostitution des adultes n'étant pas illégale en Belgique, la police ne peut guère appréhender les jeunes filles lorsqu'elles sont en possession de ce permis temporaire, surtout s'il n'est pas possible d'établir leur âge. (paragraphe 22)
Une fois la demande d'asile initiale présentée au Haut-Commissariat général aux réfugiés, la décision initiale prend six mois. La procédure peut durer deux à trois ans, pendant lesquels le mineur peut faire gagner des sommes énormes aux trafiquants ou aux souteneurs qui l'ont fait venir en Belgique. (paragraphe 27)
2. Prostitution d'enfants immigrés
Il existe en Belgique une importante population d'immigrés qui s'installent le plus souvent dans des quartiers où se trouvent déjà d'autres immigrés de même origine nationale. Il existe à Bruxelles des quartiers turcs, marocains et tunisiens, entre autres. (paragraphe 28).
Le représentant de l'organisation non gouvernementale "Adzon", qui s'occupe surtout des garçonnets prostitués, a indiqué au Rapporteur spécial qu'un quart des enfants sans abri auxquels cette organisation tente de venir en aide, proviennent d'Europe orientale, un autre quart est composé essentiellement d'enfants marocains, turcs et tunisiens qui possèdent une carte d'identité belge (paragraphe 29).
Les enfant d'immigrés ne sont pas nécessairement plus exposés à la prostitution que les enfants belges car ils sont protégés dans une certaine mesure par les liens familiaux solides qui existent en général dans les communautés d'immigrés. En revanche ils sont exposés à des problèmes particuliers de discrimination et de marginalisation. Cette ambivalence est parfois insurmontable et les conflits qui en résultent les poussent parfois à s'enfuir de la maison. Ces enfants, livrés à eux-mêmes et se sentant rejetés, sans argent ni abri, sont des proies faciles pour les réseaux de recruteurs locaux. Il existe des réseaux qui recrutent les filles d'immigrés. (paragraphes 30, 31)
3. Prostitution d' enfants Belges
Dans un pays très développé comme la Belgique, où 6 % à peine de la population vit dans la misère, on ne peut pas dire que ce soit la nécessité économique qui soit à l'origine de la prostitution. Pour ceux qui se prostituent plus ou moins "volontairement" les causes sont les mêmes que dans toute l'Europe et dans d'autres pays développés. (paragraphe 32)
Ces enfants ont souffert dès leur jeune âge de violences et d'abus sexuels, de carences affectives ou d'indifférence, dans leur foyer. Il est très difficile de se faire une idée de l'ampleur de la prostitution impliquant de jeunes enfants. Ce genre d'abus est souvent occulté. Tout se passe à l'abri des regards pendant que l'enfant est encore dans sa famille, et la plupart des enfants ont un trop grand sentiment de honte et de culpabilité pour oser demander de l'aide. De nombreux enfants qui sont victimes de tels abus s'enfuient de chez eux à l'âge de 12 ou 13 ans. La plupart du temps, vivant dans la rue, ils ne tardent pas à se livrer à la prostitution pour faire un peu d'argent, reproduisant les mêmes schémas mais en étant cette fois maîtres de la situation. (paragraphes 33,34,35)
Quelles que soient les circonstances qui amènent ces enfants, belges, immigrés ou réfugiés, à vivre et travailler dans la rue, ils finissent tous plus ou moins de la même manière : 70 % s'adonnent à la consommation de cocaïne, d'héroïne, d'ecstasy, d'amphétamines ou d'un mélange de ces drogues, quelques-uns deviennent des dealers pour entretenir leur vice. D'autres s'adonnent au jeu; selon des estimations 80 % des enfants dépensent leur argent dans des salles de jeu. Ces salles se sont multipliées à Bruxelles en 1995. Elles ont remplacé les salles vidéo et c'est là que traînent aujourd'hui les enfants des rues. (paragraphe 37)
4. Les Belges et le tourisme sexuel impliquant les enfants
Les autorités belges ont pris des mesures face aux accusations selon lesquelles des ressortissants belges sont mêlés à des affaires de tourisme sexuel impliquant des enfants à l'étranger. En 1995, la Belgique a adopté une législation extraterritoriale permettant aux instances judiciaires belges de juger des ressortissants belges qui se rendent coupables de délits sexuels à l'étranger. Plusieurs Belges ont été jugés en vertu de cette loi. (paragraphe 38, 39)
La Belgique a eu beaucoup de difficultés à exercer ce genre de poursuites souvent à cause des difficultés extra territoriales (paragraphe 41)
Pornographie impliquant des enfants
L'organisation non gouvernementale Adzon estime que les enfants qui courent le risque de tomber dans la prostitution courent aussi celui d'être attirés dans des réseaux de pornographie mais qu'ils sont moins enclins à le reconnaître dans le deuxième cas. Les garçons semblent être plus exposés que les filles ( paragraphe 44)
Détention d'enfants:
Au moment de l'examen du rapport initial de la Belgique, le Comité des droits de l'enfant s'était interrogé sur les modalités d'application de la loi et la politique suivie au sujet des enfants en quête d'asile, notamment les enfants non accompagnés. La Rapporteuse spéciale rejoint le Comité qui s'était dit préoccupé par le fait que les mineurs non accompagnés dont la demande d'asile a été rejetée, mais qui peuvent demeurer en Belgique jusqu'à 18 ans, risquaient d'être privés d'une identité et du plein exercice de leurs droits, notamment du droit aux soins médicaux et à l'éducation. Comme on l'a déjà dit, qu'il s'agisse de demandeurs d'asile authentiques ou de victimes d'un réseau organisé, les intéressés sont particulièrement exposés au risque d'être exploités et de tomber ensuite dans la délinquance et ils devraient bénéficier d'une protection spéciale. (paragraphe 57)
Bien que les enfants soient exonérés de responsabilité pénale, on a signalé à la Rapporteuse spéciale qu'il existe un petit nombre d'enfants pour lesquels la Belgique est tenue d'avoir une prison. On ne voyait pas très bien pour quels motifs les délinquants juvéniles pouvaient être incarcérés, la législation stipulant que les enfants âgés de moins de 18 ans étaient incapables de commettre des infractions pénales. (paragraphe 84)
Ce qui préoccupe particulièrement la Rapporteuse spéciale est le fait que le système de l'assistance à la jeunesse repose notamment sur l'idée que l'incarcération est une protection. Cela s'applique spécialement aux enfants qui ont été introduits en Belgique par des trafiquants. Les réseaux de trafiquants ont parfois fait preuve d'une violence extrême, en particulier ceux qui ont fait sortir des femmes et des enfants d'Albanie. La nécessité de protéger les enfants en question a été invoquée pour justifier leur incarcération dans un établissement fermé. (paragraphes 85-88)
La plupart des représentants d'organisations non gouvernementales que la Rapporteuse spéciale a rencontrés estimaient que le système d'incarcération n'était pas une bonne solution et ne protégeait pas correctement les enfants réfugiés et les mineurs appartenant à des réseaux de prostitution. Une organisation a signalé à la Rapporteuse spéciale un centre situé à Bruges, dénommé "De Zande", qui s'occupe des enfants sortis du circuit de la prostitution mais qui ne peut accueillir que 10 enfants seulement en même temps. (paragraphe 92)
La Rapporteuse spéciale partage l'inquiétude des organisations non gouvernementales qui craignent que ce système n'estompe la limite entre le délinquant juvénile et l'enfant victime. Il est à ses yeux essentiel que les enfants victimes de trafiquants et demandeurs d'asile, et ceux que l'on utilise pour des activités criminelles ne soient en aucune façon traités comme des délinquants et que les mesures prises pour les protéger n'aient pas pour effet de les punir par une privation de liberté. (paragraphe 93)
Recommandation :
Il faudrait mettre en place des mécanismes d'intervention immédiate pour les enfants qui entrent en Belgique et aux Pays-Bas soit en tant que réfugiés soit en tant que victimes de trafiquants. Des mesures devraient être prises pour faire en sorte que ces enfants se retrouvent pas de nouveau en situation de victimes au cours de la détermination de leur statut (paragraphe 146 (a))
La création d'un centre d'accueil permettrait de répondre aux besoins immédiats et d'assurer la sécurité des mineurs non accompagnés sans attendre, avant même que les procédures administratives et/ou judiciaires à engager ne soient déterminées. (paragraphe 146 (b))
Il convient de mettre en place des programmes et des initiatives de sensibilisation touchant les droits de l'enfant qui sont énoncés dans la Convention relative aux droits de l'enfant, et en particulier concernant leur droit d'être protégé contre toute forme d'exploitation sexuelle. (paragraphe 146 (e))
Des programmes de formation à l'intention de tous les professionnels du système de justice pénale devraient être dispensés sur une base permanente afin de promouvoir des mesures plus énergiques à l'encontre de ceux qui abusent des enfants et une attitude plus compréhensive à l'égard des enfants victimes. (paragraphe 146 (f))
L'utilisation des enfants, et en particulier des garçons, dans la production de matériel pornographique est très préoccupante. Des études doivent être menées sur les méthodes de recrutement, sur les lieux de production, sur l'impact et les effets néfastes des abus, sur les méthodes de traitement et de réadaptation, ainsi que sur d'autres facteurs pertinents afin de pouvoir prendre des initiatives ne faisant pas de distinction entre garçons et filles. De même, il faut réagir face à la prolifération du matériel de pédopornographie. Il faut aussi limiter les possibilités qu'ont les enfants de regarder ces matériels pornographiques. (paragraphe 146 (g))
Les Gouvernements devraient appuyer toutes les initiatives visant à dissuader leurs ressortissants d'exploiter les enfants, que ce soit à l'intérieur de leurs frontières ou à l'étranger. La Rapporteuse spéciale se félicite de l'adoption en Belgique de la loi sur l'extraterritorialité en ce qui concerne la violence faite aux enfants, mais considère que cette mesure devrait s'accompagner d'une campagne médiatique de masse destinée à sensibiliser le grand public au droit qu'ont les enfants d'être protégés contre toute forme d'exploitation sexuelle. (paragraphe 146 (i))
Pour combattre le développement de la pratique du jeu et des paris chez les enfants et compte tenu du fait que l'on a constaté que c'était l'une des causes de la présence des enfants dans la prostitution, chez les garçons surtout, il faudrait interdire rigoureusement la présence d'enfants âgés de moins de 18 ans dans les casinos ou les salles abritant des machines à sous. De même, les salons de jeux et les salles de vidéo devraient être régulièrement surveillés afin de s'assurer que les enfants qui les fréquentent ne jouent pas de l'argent. (Paragraphe 146 (j))
Les abus sexuels commis en dehors de toute considération commerciale méritent l'attention d'urgence, surtout lorsqu'ils sont commis dans le contexte familial. L'inceste ainsi que d'autres formes de violence, d'abus et de négligence vécus dans la famille doivent faire l'objet d'une étude en fonction de l'âge et du sexe de la victime. (paragraphe 146(k))
Limiter l'abus des drogues, d'alcool et d'autres types de substance toxique devrait être une tâche prioritaire pour le Gouvernement. Il faudrait que les dispensaires et les autres structures médicales encouragent les enfants à se présenter pour suivre un traitement et bénéficier d'une réadaptation. À cet égard, il importe que cette assistance soit accessible à tous les enfants nécessiteux, que leur présence dans le pays soit légale ou non. (paragraphe 146 (l))
Le rapport complet est disponible ici
Rapport du Groupe de travail d’experts sur les personnes d’ascendance africaine : visite en Belgique 13-17 juin 2005
Les experts ont également été informés du problème auquel se heurtaient certaines écoles situées dans des zones fortement peuplées de personnes d’origine étrangère, dont les effectifs étaient principalement d’origine étrangère. Ainsi, certaines écoles de la capitale belge étaient composées à 100 % d’élèves d’origine étrangère et de milieu défavorisé. Les conséquences de ce problème étaient d’une certaine façon aggravées par le principe du libre choix de l’école par les parents. (paragraphe 23)
Les experts ont soulevé la question des modalités de l’évaluation des politiques d’éducation et d’intégration des personnes d’origine étrangère eu égard au fait que l’on ne disposait pas de données statistiques fiables sur les taux ventilés par origine étrangère ou nationalité de redoublement, de retards à l’école, d’absentéisme et d’abandon scolaire, non plus que sur la composition des classes d’enseignement spécial et professionnel. Ils ont aussi souligné que très souvent les enfants d’origine étrangère ou issus de famille défavorisée n’entamaient pas leur scolarité avec le même capital social et culturel que les autres enfants. Ils considèrent que cet aspect est un élément important à prendre en considération lorsque l’on conçoit des mesures d’éducation à l’intention de ces groupes prioritaires. (paragraphe 27)
Les experts ont estimé que les chances de recevoir une éducation adéquate étaient déterminantes dans le processus d’intégration. À cet égard, ils ont reçu des informations sur les politiques et initiatives que les Communautés flamande et française avaient mises au point pour créer et offrir aux étrangers des chances égales d’apprentissage et de développement. Les experts ont constaté qu’en dépit de nombreuses initiatives d’action positive et de soutien, les problèmes soulevés par l’octroi de chances d’éducation suffisantes demeuraient sans solution. L’un de ces problèmes était celui de la reconnaissance des diplômes, que l’on pouvait obtenir par une procédure complexe − d’autant plus complexe que le diplôme délivré l’avait été dans un pays n’appartenant pas à l’Espace économique européen. (paragraphe 28)
Recommandations :
Le renforcement des mesures visant à lutter contre les résultats scolaires inégaux des enfants d’origine étrangère grâce à des politiques d’éducation qui fassent en sorte qu’une représentation plus égalitaire des élèves des groupes prioritaires soit assurée dans les écoles et qui s’attaquent au problème des redoublements, des retards à l’école, de l’absentéisme et de l’abandon scolaire ainsi qu’à celui de la surreprésentation des enfants d’origine étrangère dans les classes d’enseignement spécial et professionnel (paragraphe 78 (e))