Zimbabwe. Les dĂ©cĂšs de nouveaux-nĂ©s doivent faire l’objet d’enquĂȘtes

Summary: Le gouvernement du Zimbabwe doit de toute urgence enquĂȘter sur les dĂ©cĂšs de nouveaux-nĂ©s survenus dans un campement qu’il a installĂ© afin de reloger les personnes jetĂ©es Ă  la rue dans le cadre du programme d’expulsions forcĂ©es massives mis en Ɠuvre il y a cinq ans, Ă©crit Amnesty International dans un rapport rendu public jeudi 2 dĂ©cembre.

IntitulĂ© No Chance to Live, Newborn death at Hopley Settlement , ce document dĂ©voile qu’au moins 21 nouveaux-nĂ©s sont morts Ă  Hopley sur une pĂ©riode de cinq mois, mettant le doigt sur le trĂšs fort taux de dĂ©cĂšs de nouveaux-nĂ©s au sein de ce quartier.

« Lorsque les gens ont Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©s Ă  Hopley, le gouvernement leur a promis une vie meilleure, mais ils sont en fait tombĂ©s de Charybde en Scylla, a dĂ©plorĂ© Michelle Kagari, directrice adjointe du programme Afrique d’Amnesty International.

« Bien des femmes avec lesquelles nous nous sommes entretenues ont le sentiment que leur accĂšs restreint aux soins de santĂ© a contribuĂ© Ă  la mort de leurs bĂ©bĂ©s. D’autres pensent que leurs bĂ©bĂ©s sont morts de froid parce qu’elles vivent dans des cabanes faites de bĂąches en plastique.

« Le gouvernement doit veiller Ă  ce que ces femmes aient accĂšs Ă  des soins maternels et infantiles afin de prĂ©venir de nouveaux dĂ©cĂšs qui peuvent ĂȘtre Ă©vitĂ©s. »

Le gouvernement a justifiĂ© son programme d’expulsions massives de 2005, l’ OpĂ©ration Murambatsvina , en faisant valoir que les habitants concernĂ©s vivaient dans des conditions dĂ©plorables. Il a mis sur pied un programme d’attributions de logement baptisĂ© OpĂ©ration Garikai (Une vie meilleure) en vue de reloger plusieurs milliers de personnes victimes du programme d’expulsions, leur promettant un meilleur accĂšs aux services Ă©lĂ©mentaires. Le camp de Hopley – situĂ© Ă  une dizaine de kilomĂštres au sud de Harare – s’inscrivait dans le cadre de ce programme.

« Les victimes de l’OpĂ©ration Murambatsvina ont Ă©tĂ© abandonnĂ©es par le gouvernement et, cinq ans aprĂšs avoir perdu leur logement et leur gagne-pain, leur situation continue de se dĂ©tĂ©riorer », a indiquĂ© Michelle Kagari.

Les femmes qui vivent Ă  Hopley ont expliquĂ© Ă  Amnesty International qu’elles avaient parfaitement conscience de l’importance des soins maternels et infantiles, et que nombre d’entre elles en avaient bĂ©nĂ©ficiĂ© lors de grossesses prĂ©cĂ©dentes, avant que le gouvernement ne les installe Ă  Hopley. Elles ont toutes affirmĂ© vouloir accoucher dans un hĂŽpital ou avec l’aide d’une accoucheuse qualifiĂ©e.

Beaucoup ont expliquĂ© qu’elles ne pouvaient pas dĂ©bourser les 38 euro requis pour s’inscrire et bĂ©nĂ©ficier d’un suivi prĂ©natal. Ce tarif, qui s’applique Ă  toutes les femmes enceintes au Zimbabwe, est tout particuliĂšrement prohibitif pour les habitantes de Hopley, nombre d’entre elles ayant perdu leurs moyens de subsistance lors des expulsions forcĂ©es de masse qui se sont accompagnĂ©es de la destruction d’étals de marchĂ© et de commerces informels.

Par ailleurs, à Hopley, les femmes enceintes souffrent du manque de moyens de transport, lorsque leur travail commence. La maternité la plus proche se trouve en effet à Glen Norah, à environ huit kilomÚtres.

La municipalitĂ© de Harare ne dispose que de trois ambulances opĂ©rationnelles, pour une population de quelque deux millions d’habitants. Nombre de sociĂ©tĂ©s privĂ©es d’ambulance et de transport ne se rendent pas dans le campement de Hopley, par peur de la criminalitĂ©, surtout la nuit.

Le 19 fĂ©vrier 2010, Megan, 40 ans, a donnĂ© naissance Ă  des jumeaux prĂ©maturĂ©s, vers minuit, et n’a pas pu trouver de moyen de transport pour se rendre Ă  la maternitĂ©. Elle a accouchĂ© dans sa cabane. Ses deux bĂ©bĂ©s sont morts alors qu’elle Ă©tait en route pour la maternitĂ© le lendemain matin. C’était sa cinquiĂšme grossesse. Ses quatre premiers enfants, nĂ©s avant que la famille ne soit relogĂ©e Ă  Hopley par le gouvernement, sont tous en vie.

Fadzai, 25 ans, a accouchĂ© le 26 fĂ©vrier 2010 et a donnĂ© naissance Ă  une petite fille qui est dĂ©cĂ©dĂ©e le jour mĂȘme. Elle pense que son bĂ©bĂ© est mort parce qu’elle n’a pas pu le maintenir au chaud. « L’accĂšs restreint aux services de santĂ© est l’une des causes du fort taux de dĂ©cĂšs de nouveaux-nĂ©s Ă  Hopley, a affirmĂ© Michelle Kagari. Des interventions peu onĂ©reuses et des services de santĂ© Ă©lĂ©mentaires pourraient sauver de jeunes vies, ainsi que celles des mamans. »

Il semble que les autoritĂ©s ne fassent pas grand cas des dĂ©cĂšs de nouveaux-nĂ©s survenus Ă  Hopley. Un conseiller municipal de Harare a expliquĂ© Ă  Amnesty International que le conseil et le gouvernement ne disposaient pas de donnĂ©es dĂ©mographiques sur la population de Hopley, pourtant nĂ©cessaires, selon eux, Ă  la mise sur pied d’interventions en matiĂšre de santĂ©.

Il n’existe aucun chiffre officiel, mais le gouvernement zimbabwĂ©en estime que le taux de mortalitĂ© nĂ©onatale s’élĂšve en moyenne dans le pays Ă  29 dĂ©cĂšs pour 1 000 naissances vivantes. « Les autoritĂ©s du Zimbabwe n’ont pas jugĂ© bon de surveiller la situation sanitaire Ă  Hopley. Elles doivent prendre immĂ©diatement des mesures afin de lutter contre le nombre de dĂ©cĂšs de nouveaux-nĂ©s qu’ont mis en lumiĂšre les recherches d’Amnesty International », a indiquĂ© Michelle Kagari.

Amnesty International engage le gouvernement zimbabwĂ©en Ă  Ă©carter de toute urgence les menaces qui pĂšsent sur la santĂ© et la vie des nouveaux-nĂ©s, en prenant sans dĂ©lai toutes les mesures nĂ©cessaires pour garantir aux femmes et aux jeunes filles enceintes Ă  Hopley, et dans tous les autres campements de l’opĂ©ration Garikai, un accĂšs aux soins de santĂ© maternelle et infantile. En outre, le gouvernement doit s’attaquer de toute urgence aux conditions de vie dĂ©plorables qui font planer un danger de maladie et de mort sur les nouveaux-nĂ©s et les femmes et les jeunes filles enceintes.

Enfin, il doit mettre en place de toute urgence un systĂšme de surveillance sanitaire afin de suivre la situation globale dans les campements de l’OpĂ©ration Garikai, y compris Ă  Hopley, en prĂȘtant une attention toute particuliĂšre Ă  la mortalitĂ© et Ă  la morbiditĂ© maternelles, nĂ©onatales et infantiles.

pdf: http://www.amnestyinternational.be/doc/article16957.html

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