Traitement inhumain de personnes handicapées en institution

Summary: En Bulgarie, le procureur gĂ©nĂ©ral a ouvert des enquĂȘtes pĂ©nales concernant 166 dĂ©cĂšs et plus de 30 cas de maltraitance d’enfants survenus dans des foyers publics pour jeunes handicapĂ©s mentaux. Il a ainsi lancĂ© un signal fort non seulement aux autoritĂ©s bulgares, mais aussi Ă  plusieurs autres Etats oĂč des enfants et des adultes vivent encore dans ces institutions d’un autre Ăąge.

En Europe, aujourd’hui encore, des milliers de personnes handicapĂ©es sont tenues Ă  l’écart dans de grands Ă©tablissements souvent isolĂ©s. Il n’est pas rare qu’elles y vivent dans des conditions dĂ©plorables, laissĂ©es sans soins et en butte Ă  de graves atteintes aux droits de l’homme. Un trop grand nombre de dĂ©cĂšs prĂ©maturĂ©s ne sont pas signalĂ©s et, a fortiori, ne font l’objet d’aucune enquĂȘte.

Dans plusieurs Etats membres du Conseil de l’Europe, on utilise encore des lits-cages et d’autres moyens de contention pour « maĂźtriser » les personnes handicapĂ©es. Trop peu de choses ont Ă©tĂ© faites pour empĂȘcher que des personnes ne soient victimes de telles violences et d’autres abus et ne soient privĂ©es de soins adaptĂ©s dans des institutions qui Ă©chappent Ă  tout contrĂŽle public. Un climat d’impunitĂ© entoure ces violations.

Des personnes handicapĂ©es sont placĂ©es sous tutelle et dĂ©clarĂ©es juridiquement incapables. Dans nombre de cas, elles sont internĂ©es, privĂ©es de libertĂ© – parfois sans que ces dĂ©cisions puissent faire l’objet d’un contrĂŽle judiciaire. Cette situation est inacceptable.

En effet, tout internement doit ĂȘtre exceptionnel, de courte durĂ©e et strictement contrĂŽlĂ©. Une telle mesure ne doit ĂȘtre prise que lorsqu’elle est absolument nĂ©cessaire pour protĂ©ger la vie et la sĂ©curitĂ© du patient et d’autres personnes.

Le droit à une vie indépendante

La Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapĂ©es, instrument phare en la matiĂšre, dĂ©finit des normes qui devraient servir de feuille de route pour amĂ©liorer le traitement des personnes handicapĂ©es. Elle remet en cause l’existence mĂȘme des grandes institutions.

Les personnes handicapĂ©es, y compris celles qui prĂ©sentent des troubles mentaux ou des dĂ©ficiences intellectuelles, devraient avoir le droit de mener une vie indĂ©pendante et de participer Ă  la sociĂ©tĂ©. Cette approche est aussi celle qui prĂ©vaut dans le Plan d’action du Conseil de l’Europe 2006-2015 pour la promotion des droits et de la pleine participation des personnes handicapĂ©es Ă  la sociĂ©tĂ©.

La dĂ©sinstitutionalisation a Ă©tĂ© expĂ©rimentĂ©e avec sĂ©rieux dans certains pays. En Albanie, j’ai notĂ© que le processus d’installation des personnes handicapĂ©es dans un environnement ordinaire et dans leur milieu familial avait produit des rĂ©sultats satisfaisants. « L’ex-RĂ©publique yougoslave de MacĂ©doine » et la Serbie ont aussi des projets de rĂ©forme ambitieux qui vont dans le mĂȘme sens.

NĂ©anmoins, ces Ă©tablissements psychiatriques et sociaux de grande taille ne sont pas prĂšs de disparaĂźtre, car plusieurs pays europĂ©ens ne disposent pas encore d’un rĂ©seau de services de proximitĂ©. Il est d’autant plus important que ceux qui restent en activitĂ© soient soumis Ă  un contrĂŽle rĂ©gulier.

Un suivi rigoureux, effectif et indépendant

Il faut reconnaĂźtre l’extrĂȘme vulnĂ©rabilitĂ© des personnes internĂ©es en Ă©tablissement psychiatrique ou social. Vu leurs possibilitĂ©s limitĂ©es de communiquer avec le monde extĂ©rieur, les Etats ont l’obligation de mettre en place et de soutenir des organes de suivi nationaux vĂ©ritablement indĂ©pendants et de les doter de ressources suffisantes.

Tout signalement de mauvais traitements dans un hĂŽpital psychiatrique doit faire l’objet d’une enquĂȘte approfondie et effective – afin qu’aujourd’hui, en Europe, il n’y ait plus dans les institutions de personnes soumises Ă  la torture et Ă  des traitements ou peines inhumains et dĂ©gradants. Comme le montre l’initiative du procureur bulgare, nous ne pouvons accepter que restent impunies des violations des droits des plus vulnĂ©rables.

Thomas Hammarberg

pdf: http://commissioner.cws.coe.int/tiki-view_blog.php?blogId=2&bl=y

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