TOGO: Des taux de malnutrition inacceptables - UNICEF

[DAKAR, 4 septembre 2007] - La communautĂ© internationale envoie des aliments thĂ©rapeutiques aux communautĂ©s du Togo, oĂč, dans certaines rĂ©gions, une Ă©tude des Nations Unies sur la santĂ© et le bien-ĂȘtre des enfants a rĂ©vĂ©lĂ© que prĂšs d’un enfant sur trois souffrait de malnutrition aiguĂ«.

Cette Ă©tude, rĂ©alisĂ©e par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) en 2006, qualifie « d’inacceptables » les taux de malnutrition Ă©levĂ©s enregistrĂ©s dans deux rĂ©gions du nord du pays et dans une rĂ©gion du sud. L’UNICEF se prĂ©pare Ă  lancer un projet qui, selon l’organisation, permettra de sauver la vie de nombreux enfants et de prĂ©venir la malnutrition, qui, d’aprĂšs l’étude, est responsable de 51 pour cent des dĂ©cĂšs d’enfants au Togo.

« La malnutrition aiguĂ« est l’indicateur d’une dĂ©tĂ©rioration nette de l’état gĂ©nĂ©ral d’une population », a expliquĂ© StĂ©phane Quinton, directeur des bureaux ouest-africains d’ECHO, le bras humanitaire de la Commission europĂ©enne.

ECHO, qui a rĂ©cemment menĂ© une mission d’évaluation au Togo, a versĂ© 500 000 euros (683 000 dollars) pour aider les enfants des rĂ©gions touchĂ©es, oĂč, de l’avis de M. Quinton, les conditions « se sont considĂ©rablement aggravĂ©es ».

Selon l’étude de l’UNICEF, approuvĂ©e par le gouvernement togolais en mai 2007, dans les rĂ©gions des Savanes et de la Kara (nord), le taux de malnutrition aiguĂ« s’élĂšve respectivement Ă  32 et 24 pour cent. Ce taux est de 17 pour cent dans la rĂ©gion Maritime, dans le sud, prĂšs de LomĂ©, la capitale.

Le taux national est de 14,3 pour cent, soit le double de ceux enregistrĂ©s au BĂ©nin et au Ghana, pays voisins du Togo, et l’équivalent de ceux enregistrĂ©s dans des rĂ©gions de certains pays du Sahel, tels que le Niger, le Burkina Faso ou le Mali. Il se situe Ă  peine en-deçà du seuil d’urgence dĂ©fini par l’Organisation mondiale de la santĂ©, ont affirmĂ© plusieurs responsables d’organisations humanitaires.

Le Togo, qui compte environ 6,1 millions d’habitants, fait partie des 20 pays les plus pauvres du monde, oĂč d’aprĂšs les Nations Unies, la situation nutritionnelle des enfants s’est aggravĂ©e en termes absolus, au cours des dix derniĂšres annĂ©es. MalgrĂ© cela, des antĂ©cĂ©dents de corruption et de mauvaise gouvernance ont limitĂ© l’aide au dĂ©veloppement accordĂ©e au pays et dissuadĂ© les organisations humanitaires d’y intervenir.

Une conjonction de causes

Au Togo comme ailleurs, les causes de la malnutrition sont multiples, selon les experts de la santĂ©. « Comme c’est le cas dans d’autres pays de la rĂ©gion, plusieurs facteurs se conjuguent pour provoquer la malnutrition des enfants au Togo, dont la rĂ©gion nord se trouve Ă  la lisiĂšre du Sahel », a expliquĂ© Victor Aguayo, conseiller principal en nutrition de l’UNICEF pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale.

« Parmi ces facteurs, on recense la mauvaise alimentation des enfants, qui ne reçoivent pas une nourriture appropriĂ©e, de qualitĂ© et en quantitĂ© suffisante ; le manque d’accĂšs aux services de santĂ© essentiels, Ă  l’eau et aux systĂšmes d’assainissement ; et les taux croissants de pauvretĂ© et de vulnĂ©rabilitĂ©, notamment chez les femmes ».

Selon plusieurs responsables humanitaires, il est difficile de savoir dans quelle mesure les taux Ă©levĂ©s de malnutrition et de mortalitĂ© infantiles enregistrĂ©s au Togo sont dus au peu d’aides accordĂ© par les bailleurs de fonds. Un lien entre les deux n’est pourtant pas Ă  exclure.

« Il est difficile de dĂ©mĂȘler l’impact que le manque de soutien des bailleurs a eu sur la santĂ© des enfants », a expliquĂ© Ă  IRIN M. Aguayo. « Mais, de toute Ă©vidence, le peu de soutien qu’a reçu le Togo n’a pas jouĂ© en la faveur des enfants et peu de gens diraient le contraire ».

Tournant

Selon le reprĂ©sentant de l’UNICEF au Togo, le projet qui sera lancĂ© dans les prochains jours, financĂ© Ă  hauteur de 2,3 millions de dollars par le Fonds central d’intervention d’urgence (CERF) des Nations Unies, pourrait marquer un tournant. « Il s’agit de la premiĂšre fois depuis longtemps que de telles sommes sont accordĂ©es pour financer une action humanitaire au Togo », selon Una McCauley. « Nous espĂ©rons que cela marquera la rĂ©apparition du Togo au programme d’action de la communautĂ© internationale ».

La subvention versĂ©e par le CERF permettra de financer un projet lancĂ© conjointement par l’UNICEF et le Programme alimentaire mondial (PAM) et qui vise Ă  fournir des aliments thĂ©rapeutiques et complĂ©mentaires Ă  93 000 enfants de moins de cinq ans – les enfants des rĂ©gions de la Kara et des Savanes, et de la rĂ©gion Maritime que l’on sait atteints de malnutrition aiguĂ« ou aiguĂ« modĂ©rĂ©e.

Des responsables de l’UNICEF et du gouvernement se rendent Ă  l’heure actuelle dans les centres de santĂ© communautaires pour former le personnel de santĂ© aux soins des enfants atteints de malnutrition et Ă  la prĂ©vention de cette affection, et ces formations vont se poursuivre, selon plusieurs responsables humanitaires.

Le projet, qui coĂŻncidera avec l’étude de l’UNICEF sur les causes de la malnutrition au Togo, s’inscrit dans le cadre d’un effort plus global, dĂ©ployĂ© en vue de lutter contre la malnutrition dans le pays. « L’objectif immĂ©diat de cette action est de sauver des vies », a dĂ©clarĂ© StĂ©phanie Savariaud, porte-parole du PAM pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale.

« Mais ce programme s’inscrit dans le cadre d’un effort concertĂ© plus global, visant Ă  amĂ©liorer la sĂ©curitĂ© alimentaire au Togo » par le biais de la prĂ©vention et de l’éducation nutritionnelle, ainsi que d’une aide agricole accordĂ©e par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture.

« Bon nombre des bĂ©bĂ©s mal nourris que nous voyons sont les enfants de ces fillettes – ĂągĂ©es de 15 Ă  17 ans, et qui n’en savent pas assez sur les soins de santĂ© Ă  prodiguer aux enfants »

Mariage précoce, maternité précoce

Selon certains responsables humanitaires, l’étude des causes de ces taux Ă©levĂ©s de malnutrition et de mortalitĂ© infantiles est tout aussi importante que l’aide immĂ©diate. « Nous ne savons pas exactement quelles en sont les causes exactes [au Togo] », a observĂ© M. Quinton d’ECHO. « Nous devons nous pencher lĂ -dessus ».

Dans son Ă©tude des causes de la malnutrition, l’UNICEF s’intĂ©ressera de prĂšs au rĂŽle des facteurs culturels et socioĂ©conomiques, selon Mme McCauley de l’UNICEF. D’aprĂšs elle, le mariage prĂ©coce, notamment, est une cause probable, particuliĂšrement dans les rĂ©gions de la Kara et des Savanes (nord).

« Le problĂšme repose en bonne partie sur le fait que ces rĂ©gions prĂ©sentent des taux Ă©levĂ©s de mariages prĂ©coces et d’analphabĂ©tisme chez les filles », a-t-elle expliquĂ©. « Bon nombre des bĂ©bĂ©s mal nourris que nous voyons sont les enfants de ces fillettes – ĂągĂ©es de 15 Ă  17 ans, et qui n’en savent pas assez sur les soins de santĂ© Ă  prodiguer aux enfants ».

Selon le rapport publiĂ© en 2006 par l’UNICEF, les rĂ©gions de la Kara et des Savanes prĂ©sente les taux les plus faibles de scolarisation dans le primaire, soit 64 et 48 pour cent respectivement.

pdf: http://www.irinnews.org/fr/ReportFrench.aspx?ReportId=74112

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