TCHAD: Lutter contre les mutilations génitales dans les camps de réfugiés

[GOZ BEIDA, 8 janvier 2010] - Au Tchad, le Haut commissariat des Nations Unies pour les rĂ©fugiĂ©s (UNHCR) identifie les femmes enceintes qui ont Ă©tĂ© excisĂ©es, afin qu’elles soient mieux prĂ©parĂ©es Ă  d’éventuelles complications, d’aprĂšs le UNHCR et ses partenaires mĂ©dicaux. Cette mesure fait partie des efforts rĂ©alisĂ©s dans les camps pour remĂ©dier aux consĂ©quences sur la santĂ© de la mutilation gĂ©nitale fĂ©minine/excision (MGF/E), ainsi que pour empĂȘcher que de nouvelles excisions soient pratiquĂ©es.

En septembre 2009, les travailleurs du centre de santĂ© du camp de Djabal, dans l’est du Tchad, ont commencĂ© Ă  enregistrer le nombre de patientes en soins prĂ©nataux qui avaient Ă©tĂ© excisĂ©es ; en septembre, elles Ă©taient 22, pour un total de 330 femmes.

« Cela nous aide Ă  identifier les grossesses Ă  risques, car chez les femmes dont le vagin est fermĂ© [consĂ©quence de la MGF/E] il peut y avoir des dĂ©chirures lors de l’accouchement », a dit Nassourou Drassadou, directeur de la santĂ© dans le camp.

COOPI, l’ONG (organisation non gouvernementale) italienne qui emploie M. Drassadou, offre des services mĂ©dicaux Ă  environ 17 000 rĂ©fugiĂ©s dans le camp de Djabal, Ă  220 kilomĂštres au sud d’AbĂ©chĂ©, la ville principale de l’est du pays.

Les dĂ©chirures obstĂ©tricales que l’on appelle fistules peuvent entraĂźner des problĂšmes de miction douloureuse et incontrĂŽlable, et leur guĂ©rison nĂ©cessite parfois plusieurs interventions chirurgicales. M. Drassadou a dit Ă  IRIN que 10 pour cent des patientes prises en charge en soins prĂ©nataux dans le camp Ă©taient confrontĂ©es Ă  un fort risque de complications, en partie Ă  cause de la MGF/E.

En gĂ©nĂ©ral, la plupart des cas de MGF/E rapportĂ©s chez les femmes rĂ©fugiĂ©es sont liĂ©s Ă  des complications mĂ©dicales, a dit le mĂ©decin Ă  IRIN. « Dans les camps de rĂ©fugiĂ©s, le personnel de santĂ© apprend gĂ©nĂ©ralement [qu’une femme a Ă©tĂ© excisĂ©e] lorsque quelque chose s’est horriblement mal passĂ© ».

Mais les travailleurs humanitaires ne voient pas seulement l’impact Ă  long terme des MGF/E sur la santĂ© ; dans les camps, des filles sont toujours soumises Ă  l’excision. Des ONG de santĂ© ont enregistrĂ© prĂšs de 60 cas d’excisions dans des camps de rĂ©fugiĂ©s en 2009.

« Malgré les efforts pour faire disparaßtre [la MGF/E], nous savons que cette pratique a toujours cours », a dit à IRIN M. Drassadou.

Dans le camp de Djabal, une petite fille a Ă©tĂ© victime d’une hĂ©morragie mortelle suite Ă  une excision mal exĂ©cutĂ©e, a-t-il dit.

Quelques jours avant la visite d’IRIN, une enfant de cinq ans a Ă©tĂ© amenĂ©e Ă  la clinique du camp pour des infections urinaires. « Elle ne pouvait pas uriner. Ses voies urinaires n’étaient mĂȘme pas visibles », d’aprĂšs M. Drassadou, qui a dit que le problĂšme venait du fait que la petite fille avait Ă©tĂ© excisĂ©e Ă  18 mois. Quand IRIN lui a rendu visite Ă  l’hĂŽpital rĂ©gional de Goz Beida, oĂč elle avait Ă©tĂ© transfĂ©rĂ©e, sa famille se prĂ©parait Ă  la ramener Ă  la maison. « Elle va mieux et elle peut uriner maintenant », a dit Ashta Ali Heissein, sa mĂšre.

Mme Heissein et ses enfants ont fui les violences au Soudan en 2006, peu aprĂšs que son mari a Ă©tĂ© tuĂ© pour avoir tentĂ© de rĂ©sister Ă  des hommes qui voulaient prendre ses vaches, a-t-elle dit Ă  IRIN. « Je me suis mariĂ©e Ă  19 ans et au Soudan, nous n’avons jamais entendu dire que nous ne devrions pas faire exciser nos filles. Toutes les mĂšres le faisaient ».

A l’arrivĂ©e au camp de rĂ©fugiĂ©s, elle a appris, par les travailleurs humanitaires et des spots radiophoniques, que la MGF/E Ă©tait dangereuse et potentiellement mortelle.

Juste aprĂšs l’arrivĂ©e de la petite fille au Tchad, les mĂ©decins ont dĂ» l’opĂ©rer Ă  cause de complications liĂ©es Ă  la MGF/E, a dit Mme Heissein. « Elle allait mieux, puis elle a recommencĂ© Ă  avoir des problĂšmes [en 2009] ».

AprĂšs la rĂ©cente hospitalisation de l’enfant, le mĂ©decin a dit qu’elle avait de bonnes chances de ne pas avoir besoin d’une nouvelle intervention chirurgicale.

« GrĂące Ă  Dieu », a dit Mme Heissein, en priĂšre, tandis que sa fille Ă©tait assise sur son lit d’hĂŽpital, attendant d’ĂȘtre autorisĂ©e Ă  sortir. « Dieu est bon. Les mĂ©decins aussi ».

 

pdf: http://www.irinnews.org/fr/ReportFrench.aspx?ReportId=87680

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