Somalie: Interview du reprĂ©sentant de l’Unicef en Somalie

Quels sont les principaux dĂ©fis de l’Unicef en Somalie ?

La Somalie est souvent dĂ©crite comme un Etat qui a Ă©chouĂ©, mais nous considĂ©rons qu’il y a lĂ  un challenge. Nous ne voyons pas un Ă©chec. Tant que la volontĂ©, les ressources et le ressort existent, nous voyons de l’espoir et des occasions de rĂ©ussir. L'Unicef continue Ă  travailler avec des partenaires pour rĂ©pondre aux besoins immĂ©diats des enfants, sur qui pĂšse le poids de la malnutrition et du dĂ©placement. Nous travaillons en particulier dans le domaine des soins nutritionnels, de l'accĂšs Ă  l'eau potable et Ă  l'Ă©ducation. Dans un pays qui a connu beaucoup de conflits (oĂč certains jeunes n'ont jamais vĂ©cu sous l’autoritĂ© d'un gouvernement central), nous travaillons avec des communautĂ©s somaliennes, avec des autoritĂ©s rĂ©gionales et nationales, pour promouvoir un environnement focalisĂ© sur les droits des enfants. Nous sommes prĂȘts Ă  travailler avec les autoritĂ©s de Somalie, les agences onusiennes et les ONG pour renforcer la capacitĂ© de nos partenaires locaux Ă  offrir des services de base Ă  tous les enfants de Somalie et Ă  leurs familles.

Le 3 septembre, pour la premiĂšre fois depuis dix ans, un bateau du Programme alimentaire mondial a rĂ©ussi Ă  accoster dans le port de Mogadiscio. D’autres ont-ils pu accĂ©der au port depuis ? Cet Ă©vĂ©nement est-il important pour l’avenir de l’aide humanitaire en Somalie ?

L’accĂšs des moyens de l’Unicef par mer au niveau du port de Mogadiscio est maintenant possible. Le bon fonctionnement et l'efficacitĂ© du port de Mogadiscio va faciliter le transport et la logistique d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale vers le centre et le sud de la Somalie, aussi bien pour les agences d’aide humanitaire que pour le secteur privĂ©.

Y a-t-il une possibilitĂ© pour un gouvernement central de s’établir en Somalie et quelles en seraient les consĂ©quences sur l’aide humanitaire Ă  travers le pays ?

MalgrĂ© les Ă©vĂ©nements rĂ©cents, la crĂ©ation d’institutions fĂ©dĂ©rales de transition ainsi que la volontĂ© de travailler ensemble affirmĂ©e par le gouvernement fĂ©dĂ©ral de transition et l'Union des cours islamiques est de bonne augure (il peut cependant subsister quelques Ă©lĂ©ments de la sociĂ©tĂ© qui aient envie de faire Ă©chouer ce projet). La Somalie est un pays avec quelques uns des pires indicateurs de dĂ©veloppement du monde : les partenaires humanitaires font dĂ©jĂ  face Ă  des niveaux inadmissibles de malnutrition, il y a un grand nombre de personnes dĂ©placĂ©es Ă  l'intĂ©rieur du pays, des maladies, un accĂšs limitĂ© aux services sociaux de base pour la population et des catastrophes naturelles comme la sĂ©cheresse ou les inondations. Un gouvernement central fort et reconnu crĂ©erait un environnement de paix essentiel pour nous permettre l’accĂšs sans contraintes aux populations affectĂ©es. Tant que les tensions et le conflit existent, l'accĂšs est limitĂ©, les coĂ»ts entraĂźnĂ©s par la sĂ©curitĂ© sont Ă©levĂ©s, les civils se retrouvent pris au milieu des combats, des populations sont dĂ©placĂ©es et nous ne pouvons pas Ă©largir et renforcer nos capacitĂ©s d’action ni celles de nos partenaires.

L’absence de rùgle de droit : un problùme continuel

Est-il facile pour l’Unicef de trouver des autoritĂ©s avec qui travailler ?

En Somalie, l’Unicef travaille avec des administrations et des partenaires locaux depuis l'effondrement du gouvernement central au dĂ©but des annĂ©es 90. Le dĂ©fi rĂ©side dans le niveau de pouvoir et de coopĂ©ration des partenaires et des autoritĂ©s locales. La facultĂ© des ONG locales partenaires a tendance Ă  ĂȘtre limitĂ©e par une sĂ©rie de facteurs, notamment un manque de formation et d’encadrement du personnel, et un manque de financement. D’autre part, alors que certaines autoritĂ©s locales cherchent Ă  vraiment reprĂ©senter au mieux les intĂ©rĂȘts de leurs communautĂ©s, des interfĂ©rences causĂ©es par l’absence de rĂšgle de droit en Somalie posent un problĂšme continuel Ă  l’Unicef et aux autres agences d'aide humanitaire : des milices armĂ©es, dans beaucoup de rĂ©gions, ont tendance Ă  agir dans leurs intĂ©rĂȘts propres. Une telle situation handicape l’action humanitaire et la rĂ©habilitation dans de nombreuses zones, particuliĂšrement dans le centre et le sud.

AprĂšs la sĂ©cheresse et les inondations dans la Corne de l’Afrique, oĂč en sont les communautĂ©s de bergers en Somalie ?

On a constatĂ© une amĂ©lioration, mais limitĂ©e. Et d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale l’observation incite Ă  la poursuite de l’aide humanitaire. Les sources et les pĂąturages ne se sont pas beaucoup reconstituĂ©s. On attend beaucoup de la brĂšve saison de pluie « deyr », qui commence en ce moment. Beaucoup de bergers ont perdu une partie importante de leurs troupeaux pendant la sĂ©cheresse, ce qui entraĂźne un manque de revenus et moins de ressources en lait. Il faudra plus que quelques bonnes saisons de pluies pour se remettre de ce choc. Des aggravations majeures ont pu ĂȘtre Ă©vitĂ©es grĂące Ă  l’Unicef et l’OMS, en menant des campagnes de vaccination contre la rougeole et la polio, en distribuant des vivres, en restaurant le service d'eau et en le dĂ©veloppant. Pourtant, la situation est fragile et pourrait se dĂ©tĂ©riorer plus si les pluies deyr Ă©taient faibles et si le conflit prenait de l’ampleur.

1,6 million d'enfants vaccinés contre la polio

Les services itinérants destinés aux populations de bergers nomades donnent-ils de bons résultats en matiÚre de santé ?

1,6 million d'enfants somaliens de moins de cinq ans (y compris des enfants des communautĂ©s de bergers que les Ă©quipes mobiles ont atteint) ont profitĂ© de la campagne contre la polio dans tout le pays (9-12 septembre). La campagne, qui a Ă©tĂ© organisĂ©e en mĂȘme temps en Ethiopie et au Kenya, Ă©tait la plus grande campagne de vaccination coordonnĂ©e de la Corne de l'Afrique. Avec des fonds de l’Unicef France, des milliers de personnes formĂ©es Ă  la vaccination ont Ă©tĂ© dĂ©ployĂ©es Ă  travers la Somalie, en plus de celles chargĂ©es de sensibiliser la population Ă  cette campagne. Les efforts pour Ă©liminer la polio en Somalie s’appuient sur une Ă©norme mobilisation qui implique tous les segments de la sociĂ©tĂ©. Pour empĂȘcher la paralysie des enfants et pour s’assurer que chacun reçoive deux doses de vaccin contre la polio, le mouvement s’est appuyĂ© sur les leaders religieux et chefs de communautĂ©s, les organisations de femmes et de jeunes, les personnes handicapĂ©es, les Ă©coles, les organisations gouvernementales et non gouvernementales. Des produits ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s pour la communication et la sensibilisation. Et la presse et les mĂ©dias ont aussi soutenu activement la campagne. (La Somalie Ă©tait dĂ©barrassĂ©e de la polio depuis presque trois ans quand la maladie a ressurgi en juillet 2005, en provenance du YĂ©men avec un virus originaire du Nigeria. A ce jour, il y a 215 cas confirmĂ©s. 14 des 19 rĂ©gions sont affectĂ©es. D’ici la fin de l'annĂ©e 2006, deux campagnes sont planifiĂ©es, en novembre et dĂ©cembre, dans la Corne de l'Afrique).

Que peut-on dire des services itinĂ©rants en matiĂšre d’éducation ?

Pour l'éducation, l'Unicef prévoit de travailler avec Save the Children Royaume-Uni afin de piloter des écoles mobiles destinées aux enfants des communautés de bergers nomades. L'Unicef a une grande expérience dans ce domaine dans la région et a participé récemment a un colloque sur l'éducation nomade. L'Unicef Somalie prévoit une mission conjointe en Iran avec des délégations des ministÚres de l'éducation du Kenya et de l'Ethiopie afin d'apprendre plus sur la façon de faire de l'Iran dans ce domaine.

pdf: http://www.unicef.fr/accueil/sur-le-terrain/pays/afrique-de-l-est-et-aus...

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