SLOVAQUIE. Les enfants roms en butte à la discrimination en matière d'accès à l'éducation


« Ici, les enfants sont mentalement attardés. On a tendance à intégrer les enfants roms dans les écoles primaires, mais les élèves qui souffrent de retard mental et social ne changent pas. Les enfants issus de milieux socialement défavorisés souffrent d’un retard social et mental. »
Le directeur d’une école spécialisée, dont 95 p. cent des élèves sont roms

[16 novembre 2007] - De très nombreux jeunes roms continuent d’être placés soit dans des écoles et des classes spécialisées pour enfants atteints de handicaps mentaux ou de difficultés d’apprentissage, soit dans des établissements de type classique mais réservés aux Roms, a déclaré Amnesty International ce jeudi 15 novembre.

Dans un rapport intitulé Toujours séparés, toujours inégaux. Les violations du droit à l’éducation des enfants roms en Slovaquie, l’organisation de défense des droits humains révèle que les enfants roms placés dans des établissements spécialisés ne bénéficient que de programmes réduits et qu'ils n'ont pratiquement aucune chance de réintégrer le système scolaire général ou de passer ensuite dans le secondaire.

Dans son rapport, Amnesty International demande aux autorités slovaques d'afficher clairement leur volonté d'en finir avec la ségrégation généralisée dont sont victimes les enfants roms dans l'enseignement et de prendre rapidement des mesures pour mettre fin à cette situation.

« Quelles que soient leurs capacités personnelles, les enfants roms n’ont droit qu’à un enseignement au rabais, dans des classes où règne la ségrégation, a déclaré Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International. Le fait que le gouvernement ne leur assure pas une scolarité satisfaisante compromet leurs perspectives d'emploi plus tard et ne fait que perpétuer la marginalisation et la pauvreté des Roms. »

Amnesty International craint que la manière dont est menée l’évaluation des élèves et les critères retenus pour placer un enfant dans une école ou une classe spécialisée ne constituent, de fait, des actes de discrimination, dans la mesure où ceux-ci ne tiennent pas réellement compte des différences culturelles et linguistiques. Une étude de la procédure d’évaluation a montré que près de 50 p. cent des enfants roms scolarisés dans des écoles ou des classes spécialisés y ont été orientés à tort.

« Un enfant qui vit dans un coin perdu, dans un cabanon sans électricité ni eau courante, ne peut pas savoir ce que c’est que de tirer une chasse d’eau ou d’utiliser les toilettes, a ajouté Nicola Duckworth. Il ne va pas non plus savoir tenir un crayon ni faire un dessin ni même parler slovaque, mais il ne doit pas pour autant être privé de son droit fondamental à bénéficier d'un enseignement digne de ce nom. »

Amnesty International est préoccupée également par le grand nombre d’écoles ou de classes réservées aux Roms. Dans certains secteurs de l'est de la Slovaquie, la ségrégation touche la quasi totalité des établissements. La loi slovaque dispose que les parents ont le droit de choisir l’école dans laquelle ils souhaitent inscrire leur enfant. Contrairement aux apparence, cette politique contribue à la ségrégation. Libres de leur choix, les parents non roms seraient de plus en plus nombreux à retirer leurs enfants des établissements accueillant une majorité d’élèves roms.

Cette liberté, doublée de l’absence de transports scolaires gratuits pour les Roms, accentue la ségrégation et réduit fortement les contacts entre les enfants roms et les autres enfants de Slovaquie.

Alors que le gouvernement slovaque assure que cette ségrégation n’émane pas d’une politique gouvernementale officielle, il ne la considère toujours pas comme un problème et ne s’engage pas réellement à y remédier.

Amnesty International se félicite de certaines mesures prises par le gouvernement slovaque, comme la mise en place de classes préparatoires, le recrutement d'auxiliaires pédagogiques, certaines incitations financières encourageant les écoles classiques à intégrer des enfants roms, ou encore les quelques stages de formation organisés pour les enseignants amenés à travailler avec des enfants roms. Toutefois, aucune de ces mesures n’est obligatoire et, très souvent, elles ne sont pas appliquées au niveau local.

Le droit à l’éducation est lié à d’autres droits fondamentaux de la personne, comme le droit d'être logé décemment. Le tiers environ des Roms de Slovaquie habitent dans des implantations situées à la périphérie des villes et des villages et partiellement ou totalement privées d'eau, d'électricité, de système d'assainissement, de voies goudronnées et, de manière générale, des infrastructures les plus élémentaires.

Les conditions de logement inadaptées de nombreux Roms affectent profondément la capacité de leurs enfants d'exercer leur droit à l’éducation. Katarina Kruštenová, qui habite un campement rom situé près de Letanovce, dans l’est de la Slovaquie a déclaré aux délégués d’Amnesty International :« Nous voulons que les enfants fassent leurs devoirs à la maison, mais nous n’avons qu’une bougie et elle se consume très vite… »

« Les Roms ont les mêmes aspirations que la majorité de la population de la Slovaquie, a conclu Nicola Duckworth. Le gouvernement doit assumer les responsabilités qui sont les siennes, en veillant à promouvoir, à protéger et à assurer le droit à l’éducation des jeunes Roms. Il doit également faire en sorte que les implantations roms isolées et misérables ne soient plus qu’un souvenir du passé. »

« Il faut absolument que l’Union européenne, dont fait partie la Slovaquie, soutienne le gouvernement à chaque fois qu'il s'efforce sincèrement de lutter contre la violation systématique du droit à l'éducation dont sont victimes les enfants roms. Pour cela, l’Union européenne doit lui apporter l'assistance financière et technique nécessaire, en veillant à ce que la communauté rom soit associée, à tous les stades, à l’adoption et à la mise en œuvre des programmes la concernant. »

Informations supplémentaires

pdf: http://www.categorynet.com/v2/content/view/54673/365/

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