Nigéria: Le gouvernement manque à son devoir envers les femmes et les jeunes filles violées par des policiers ou les forces de sécurité

« Ils Ă©taient trois. J’ai encore mal aujourd’hui ... ils ont utilisĂ© ma fille aussi. Elle a douze ans ... Ils ont Ă©galement violĂ© ma sƓur. Un autre homme a violĂ© une femme qui Ă©tait enceinte de quatre mois et elle a fait une fausse-couche ... c’étaient des militaires. Tout le monde les voyait dans le village, ils ne se cachaient pas, cela leur Ă©tait bien Ă©gal. Je ne l’ai pas dit Ă  la police parce que les policiers me font peur. »

Le viol par des membres de la police ou des forces de sĂ©curitĂ© est endĂ©mique au NigĂ©ria, de mĂȘme que l’inertie dĂ©solante des autoritĂ©s nigĂ©rianes lorsqu’il s’agit de dĂ©fĂ©rer Ă  la justice les coupables, a dĂ©clarĂ© Amnesty International ce mardi 28 novembre, lors d’une confĂ©rence de presse Ă  Lagos, au NigĂ©ria. L’organisation a appelĂ© les autoritĂ©s du pays et des États nigĂ©rians Ă  rĂ©former de toute urgence le droit et le systĂšme social qui permettent que des viols et des violences sexuelles Ă  grande Ă©chelle soient commis contre des femmes et des jeunes filles dans tout le pays. Dans un rapport rendu public aujourd’hui sous le titre Nigeria : Rape - the silent weapon, Amnesty International fait apparaĂźtre, en s’appuyant sur les tĂ©moignages de victimes, une tendance prĂ©occupante de la police et des forces de sĂ©curitĂ© Ă  se rendre coupables de viols et de violence sexuelle contre les femmes et les jeunes filles. Le rapport indique que ces agissements sont encouragĂ©s par les dĂ©faillances de la justice et qu’ils perdurent parce que l’État ne s’attaque pas au problĂšme de la violence de la police et des forces de sĂ©curitĂ© envers les femmes. Il montre les Ă©normes difficultĂ©s auxquelles sont confrontĂ©es les femmes et les jeunes filles victimes de viol ou de violence sexuelle au NigĂ©ria, que ces violences aient eu lieu aux mains de la police ou des forces de sĂ©curitĂ©, chez elles ? ou dans leur entourage. « La dure rĂ©alitĂ© quand vous ĂȘtes une femme ou une jeune fille qui a subi le traumatisme du viol au NigĂ©ria est que votre souffrance sera soumise aux manƓuvres d’intimidation de la police, Ă  l’indiffĂ©rence de l’État et Ă  la certitude que l’auteur du viol ne sera trĂšs probablement jamais poursuivi en justice », a dĂ©clarĂ© Kolawole Olaniyan, directeur du programme Afrique d’Amnesty International.

Voici quelques-uns des points présentés à la conférence de presse :

  • Ă©lĂ©ments attestant de l’utilisation du viol et de l’esclavage sexuel par les forces de sĂ©curitĂ© nigĂ©rianes pour intimider des secteurs de la population dans l’État du Delta ;
  • utilisation du viol par la police comme moyen de torture pour obtenir des aveux des suspects en garde Ă  vue ;
  • nombre trĂšs peu Ă©levĂ© des plaintes des femmes ou des jeunes filles, qui craignent des manƓuvres d’intimidation de la police et le rejet de leur famille et de leur entourage. Lorsqu’elles s’adressent Ă  la justice, les dĂ©faillances de celle-ci sont telles qu’on estime Ă  10 p. cent Ă  peine la proportion des poursuites qui aboutissent.

Le rapport dĂ©crit les obstacles qui rendent extrĂȘmement difficiles de signaler qu’il y a eu un viol et d’engager des poursuites. Il s’agit par exemple du manque de formation des policiers, qui les conduit Ă  humilier et intimider les victimes, ou des problĂšmes de corruption et d’incompĂ©tence qui empĂȘchent la tenue de vĂ©ritables enquĂȘtes policiĂšres. Au niveau de la lĂ©gislation, les diffĂ©rences entre le droit national, coutumier, musulman et de chaque État donnent lieu Ă  des normes de justice variables et Ă  des dĂ©cisions arbitraires quant Ă  la gravitĂ© des infractions. « Notre rapport montre que l’État nigĂ©rian n’offre pratiquement aucune protection contre ces crimes graves aux femmes et aux jeunes filles de ce pays, a dĂ©clarĂ© Kolawole Olaniyan. Le gouvernement nigĂ©rian n’a pratiquement rien fait pour traduire dans le droit national et dans les politiques et usages en vigueur dans le pays les obligations qu’il a aux termes du droit international en ce qui concerne les femmes et les jeunes filles. Les autoritĂ©s du pays et des diffĂ©rents États nigĂ©rians doivent maintenant honorer ces obligations en assurant la sĂ©curitĂ© des femmes et des jeunes filles du NigĂ©ria et en leur permettant d’obtenir justice.

pdf: http://www.amnestyinternational.be/doc/article9483.html

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