MADAGASCAR: Une loi contre l’exploitation sexuelle des enfants

JOHANNESBOURG, [28 juin 2007]  - Selon de rĂ©cents rapports, l’exploitation sexuelle des enfants est trĂšs rĂ©pandue sur l’üle de Madagascar, oĂč dans le cadre d’un trafic Ă  l’échelle nationale, des trafiquants emmĂšnent leurs jeunes victimes des zones rurales pauvres jusqu’aux destinations touristiques les plus prisĂ©es.

Au cours d’une Ă©tude menĂ©e par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) dans deux villes – le port de Toamasina, Ă  l’est, et sur l’üle de Nosy Be, au nord-ouest des cĂŽtes malgaches- entre 30 et 50 pour cent des travailleuses du sexe interrogĂ©es avaient moins de 18 ans.

L’agence des Nations Unies a Ă©galement rapportĂ© plusieurs informations indiquant que certains trafiquants pourraient recruter des enfants issus de milieux ruraux pour effectuer des travaux domestiques dans les zones urbaines.

Les citadins promettent souvent d’offrir une Ă©ducation aux enfants pour convaincre leurs parents, issus de milieux ruraux et pauvres, de les leur confier.

Casimira Benge, directrice de la section Gouvernance pour les droits des enfants de l’UNICEF Ă  Madagascar, a racontĂ© l’histoire d’une fillette de 12 ans, sauvĂ©e d’un foyer d’Antsiranana, une ville du nord du pays, aprĂšs qu’un voisin se fut plaint des coups rĂ©guliĂšrement infligĂ©s Ă  la fillette.

« En interrogeant l’enfant, nous avons appris que ses parents, qui vivaient dans un village situĂ© Ă  90 kilomĂštres de la ville, avaient Ă©tĂ© persuadĂ©s par la ruse de laisser partir leur enfant ; les citadins leur ont en effet expliquĂ© qu’ils voulaient les aider Ă  Ă©lever leur fille, alors qu’en fait, ils avaient l’intention de l’utiliser comme domestique », a-t-elle racontĂ©.

On soupçonne les trafiquants de fournir des enfants issus des communautĂ©s rurales Ă  des fins d’exploitation miniĂšre forcĂ©e, de servitude domestique, d’exploitation sexuelle, et comme main d’Ɠuvre pour les besoins des fruitiers ambulants, selon un rapport du gouvernement amĂ©ricain, publiĂ© ce mois-ci par le Bureau du DĂ©partement d’État amĂ©ricain chargĂ© de surveiller et de combattre le trafic des personnes.

Les enfants tombĂ©s aux mains des trafiquants seraient exploitĂ©s Ă  des fins de commerce sexuel, avec la complicitĂ© de membres de leur famille, de chauffeurs de taxi ou de pousse-pousse, d’amis, de guides touristiques ou de travailleurs hĂŽteliers, peut-on lire dans le rapport du gouvernement amĂ©ricain.

Selon l’étude menĂ©e par l’UNICEF, les enfants sont vulnĂ©rables au trafic en raison de la pauvretĂ©, d’une discrimination sexuelle profondĂ©ment ancrĂ©e dans les pratiques, d’une mise en application laxiste de la loi, et des attitudes des populations, pour lesquelles une activitĂ© sexuelle prĂ©coce est moralement acceptable.

La plupart des filles interrogĂ©es au cours des enquĂȘtes menĂ©es Ă  Toamasina et Ă  Nosy Be ont eu leur premiĂšre expĂ©rience sexuelle Ă  l’ñge de 14 ans. Mme Benge de l’UNICEF a fait remarquer que les filles pouvaient se marier lĂ©galement dĂšs l’ñge de 14 ans, mais que « l’ñge lĂ©gal [serait] revu Ă  la hausse cette annĂ©e, et portĂ© Ă  18 ans ».

Le gouvernement des Etats-Unis a notĂ© que « du fait de la corruption, qui dĂ©coule souvent des difficultĂ©s Ă©conomiques, ou des pressions exercĂ©es par la communautĂ© locale, ou bien encore par crainte de provoquer un incident international, la police et les magistrats des rĂ©gions touristiques hĂ©sitent souvent Ă  poursuivre les pĂ©dophiles Ă©trangers ; plusieurs fonctionnaires ont notamment fait Ă©tat de pressions considĂ©rables, exercĂ©es par certains parents, qui profitent des bĂ©nĂ©fices que leur rapporte l’exploitation sexuelle de leurs enfants pour subvenir aux besoins de leur famille ».

Tourisme sexuel

Au moins deux affaires de pĂ©dophilie ont Ă©tĂ© signalĂ©es l’annĂ©e derniĂšre, selon le rapport publiĂ© par les Etats-Unis : Ă  Nosy Be, deux touristes sexuels français, accusĂ©s de dĂ©tournement de mineurs, ont Ă©tĂ© condamnĂ©s et extradĂ©s ; Ă  la fin de l’annĂ©e 2006, un touriste suisse a Ă©galement Ă©tĂ© condamnĂ© Ă  cinq ans de rĂ©clusion criminelle pour pĂ©dophilie.

Selon l’UNICEF, environ sept Malgaches sur 10 vivent dans la pauvretĂ©, aggravĂ©e par une croissance dĂ©mographique importante - trois pour cent – et des catastrophes naturelles frĂ©quentes : le pays a en effet Ă©tĂ© frappĂ© par quelque 30 cyclones au cours des trois derniĂšres dĂ©cennies, des catastrophes naturelles qui dĂ©tournent bien souvent des ressources de dĂ©veloppement dĂ©jĂ  rares.

La loi malgache n’interdit pas le trafic Ă  des fins d’exploitation sexuelle, mais « la loi est Ă©galement en cours de rĂ©vision cette annĂ©e », a prĂ©cisĂ© Mme Benge.

« Le ministĂšre de la Justice est en train de rĂ©diger un projet de loi visant Ă  la fois Ă  protĂ©ger les enfants contre l’exploitation sexuelle, et Ă  pĂ©naliser les personnes reconnues coupables de tels actes », a-t-elle dit. « Le ministĂšre mettra Ă©galement en application plusieurs lois visant Ă  prĂ©venir le travail des enfants, et notamment la prostitution, l’esclavage domestique et les travaux forcĂ©s ».

L’UNICEF a appelĂ© Ă  instaurer l’obligation de signaler tout incident liĂ© Ă  la disparition ou Ă  l’exploitation d’un enfant, et Ă  mener une campagne intensive en vue de sensibiliser davantage les populations Ă  ce problĂšme.

Informations supplémentaires

pdf: http://www.irinnews.org/fr/ReportFrench.aspx?ReportId=72988

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