Soumis par crinadmin le
Summary: Si elle nâest pas traitĂ©e, l'hydrocĂ©phalie entraĂźne lâaugmentation du volume de la tĂȘte sous lâeffet dâune pression croissante, ce qui mĂšne Ă lâinvaliditĂ© et Ă une mort douloureuse.
[21 juillet 2011] - Le pansement qui couvre les yeux dâOlida Soanirina, une petite fille de trois ans qui se remet de son opĂ©ration Ă lâhĂŽpital Joseph Ravoahangy Andrianavalona (HJRA) de la capitale Antananarivo, ne camoufle pas les ravages de lâhydrocĂ©phalie. Quelques jours aprĂšs sa naissance, le volume de sa tĂȘte a augmentĂ© et ses pleurs incessants se sont tus lorsque ses yeux ont commencĂ© Ă suinter du sang. Ses parents, des fermiers de la ville portuaire de Toamasina, situĂ©e Ă 215 km Ă lâest dâAntananarivo, se sont alors dĂ©cidĂ©s Ă solliciter une aide mĂ©dicale. « Je nâai jamais vu et jamais entendu parler de ce genre de choses. Je pensais que son Ćil allait gonfler et gonfler jusquâĂ ce quâil explose », a dit Nordina, 30 ans et mĂšre de deux enfants, Ă IRIN. « Nous ne savons pas ce que nous aurions fait si personne ne nous avait aidĂ©s et amenĂ©s ici. Nous nâavons pas dâargent. Ce que nous cultivons, nous le mangeons, et câest tout ». Le mĂ©decin a diagnostiquĂ© une hydrocĂ©phalie, littĂ©ralement « de lâeau dans le cerveau », et a envoyĂ© une photo Ă Nazaraly NourâAly, un neurochirurgien et pĂ©diatre dâAntananarivo. LâhydrocĂ©phalie est due Ă lâaccumulation du liquide cĂ©phalorachidien dans les ventricules cĂ©rĂ©braux : les personnes qui souffrent dâhydrocĂ©phalie produisent jusquâĂ sept cuillerĂ©es de liquide par heure contre une cuillerĂ©e en moyenne pour les personnes ordinaires. Si elle nâest pas traitĂ©e, cette maladie entraĂźne lâaugmentation du volume de la tĂȘte sous lâeffet dâune pression croissante, ce qui mĂšne Ă lâinvaliditĂ© et Ă une mort douloureuse. Il est difficile de traiter cette maladie dans les pays en dĂ©veloppement en raison du coĂ»t Ă©levĂ© des opĂ©rations neurochirurgicales qui permettent lâinstallation dâune valve ou shunt sous la peau afin dâĂ©vacuer lâexcĂšs de liquide du cerveau vers lâestomac. La FĂ©dĂ©ration Internationale du Spina Bifida et de lâHydrocĂ©phalie (IFSBH), qui est basĂ©e Ă Bruxelles, a apportĂ© de lâaide Ă M. NourâAly pour rĂ©duire le coĂ»t de chaque valve de 333 Ă 50 dollars, en incluant sa commande annuelle de 150-180 valves pour Madagascar dans un lot destinĂ© Ă toute lâAfrique et provenant dâInde. « Si personne ne les traite â sâils ne savent pas oĂč ils doivent se rendre, en particulier les gens qui vivent dans la brousse ou dans les zones rurales - alors ils meurent, ou ils deviennent complĂštement invalides et meurent dans des souffrances atroces en un an au maximum », a dit M. Nourâ Aly Ă IRIN. ProblĂšmes de vue Le mĂȘme hĂŽpital accueille Lina Razakamaniny, un bĂ©bĂ© ĂągĂ© de 13 mois, qui vomit une partie du liquide Ă©vacuĂ© vers son estomac aprĂšs lâopĂ©ration ; sa tĂȘte a gardĂ© un volume disproportionnĂ©. Nadia, sa mĂšre, une autre fermiĂšre de Toamasina, a contactĂ© M. NourâAly alors que Lina avait six mois et nâĂ©tait plus capable de bouger. LâhydrocĂ©phalie entraĂźne Ă©galement des problĂšmes de vue, car la pression intense provoque un enfoncement des globes oculaires. Toutefois, lorsque Lina bouge les yeux, les petits points bruns qui viennent du blanc de ses yeux indiquent quâelle pourra bientĂŽt voir Ă nouveau. M. NourâAly a fondĂ© lâorganisation non gouvernementale (ONG) Global Medical Centre en 2004 aprĂšs avoir participĂ© Ă un programme de vaccination contre la polio organisĂ© sur trois ans dans le pays par des agences des Nations Unies, Ă la fin des annĂ©es 1980. Il avait ainsi visitĂ© des milliers de centres mĂ©dicaux et Ă©tĂ© confrontĂ© Ă de nombreux cas dâhydrocĂ©phalie. « Cela coĂ»te trop cher et nous nâavons pas lâargent » : telle a Ă©tĂ© la rĂ©ponse donnĂ©e par les parents et les mĂ©decins Ă qui il a demandĂ© pourquoi les enfants souffrant dâhydrocĂ©phalie nâĂ©taient pas soignĂ©s. M. NourâAly a dit que « leurs enfants Ă©taient condamnĂ©s Ă mourir » Ă la maison dans des conditions terribles, la pression croissante sur la moelle Ă©piniĂšre provoquant dâatroces douleurs au « moindre mouvement ». Le ministĂšre de la SantĂ© de Madagascar ne dispose pas de statistiques sur lâhydrocĂ©phalie. AprĂšs des nĂ©gociations avec le gouvernement, lâONG de M. NourâAly a obtenu 24 lits dans un hĂŽpital public dâAntananarivo et lâaccĂšs Ă une table dâopĂ©ration ; il devrait ensuite payer quelque 700 dollars par enfant pour couvrir les dĂ©penses de traitement. LâhydrocĂ©phalie nâest pas une maladie curable, mais des procĂ©dures mĂ©dicales permettent de rĂ©duire la pression sur le cerveau : grĂące Ă elles, « ces enfants peuvent grandir normalement, aller Ă lâĂ©cole et pratiquer des sports non violents », leur espĂ©rance de vie pouvant atteindre 30 ans, a indiquĂ© M. NourâAly. Le Global Medical Centre a soignĂ© 1 001 enfants de moins de six ans Ă Antananarivo depuis 2004, et 34 autres enfants Ă Fianarantsoa, la seconde plus grande ville de Madagascar, depuis 2008. Quarante et un enfants sont morts, car les opĂ©rations nâavaient pas permis dâenlever les tumeurs cancĂ©reuses. Bien que les causes de lâhydrocĂ©phalie ne soient pas entiĂšrement comprises, les experts mĂ©dicaux estiment quâenviron un enfant sur 500 souffre dâhydrocĂ©phalie ; aux Ătats-Unis, câest la premiĂšre cause de chirurgie cĂ©rĂ©brale chez lâenfant. M. NourâAly pense quâenviron 60 pour cent des cas quâil a traitĂ©s Ă©taient dus Ă des mĂ©ningites ; 20 pour cent Ă©taient des cas dâhydrocĂ©phalies congĂ©nitales ; et 20 pour cent des cas Ă©taient liĂ©s aux effets de la malnutrition. LâIFSBH indique que des preuves scientifiques datant de 1986 dĂ©montraient que la dĂ©ficience en acide folique pendant la grossesse Ă©tait un facteur de la maladie et a demandĂ© Ă ce que la nourriture soit enrichie en acide folique, particuliĂšrement dans les pays en dĂ©veloppement. Malnutrition Selon le Fonds des Nations Unies pour lâenfance (UNICEF) , plus de 50 pour cent des enfants de Madagascar souffrent dâun retard de croissance liĂ© Ă la malnutrition chronique, et le pays prĂ©sente un des taux de malnutrition les plus Ă©levĂ©s au monde. La nourriture de base (le riz) est accompagnĂ©e, au mieux, de quelques morceaux de lĂ©gumes. M. NourâAly distribue de la luzerne, un complĂ©ment alimentaire riche en vitamines A et D et en nutriments, qui est fournie par lâOffice national de nutrition (ONN) de Madagascar. Il a toutefois dit Ă IRIN que le gouvernement tirait profit de la luzerne, qui, bien quâofferte gracieusement par des donateurs français, Ă©tait taxĂ©e Ă hauteur de 1 400 dollars par tonne. « Les femmes doivent ĂȘtre vaccinĂ©es pendant leur grossesse, ainsi que les bĂ©bĂ©s, particuliĂšrement contre la mĂ©ningite » et la disponibilitĂ© des complĂ©ments alimentaires doit ĂȘtre renforcĂ©e, a indiquĂ© M. NourâAly. Des sanctions ont Ă©tĂ© prononcĂ©es contre Madagascar en 2009, suite au renversement illĂ©gal du prĂ©sident Marc Ravalomanana par Andry Rajoelina, avec le soutien de lâarmĂ©e. Selon certaines estimations, 80 pour cent de la population des zones rurales gagne un dollar ou moins par jour, tandis que les dĂ©penses de santĂ© ont baissĂ©, passant de 8 dollars par habitant Ă 2 dollars depuis 2009. M. NourâAly devrait se rendre aux Ătats-Unis en 2012 pour sensibiliser les responsables amĂ©ricains au traitement de lâhydrocĂ©phalie Ă Madagascar et lever des financements. « Jâai 82 ans, et avec le travail que je fais, je dois penser Ă la personne qui me succĂšdera, donc je vais essayer de mettre en place une fondation qui prendra le contrĂŽle du Global Medical Centre et le financera ».
Avant 2004, aucun traitement nâĂ©tait disponible pour les personnes souffrant dâhydrocĂ©phalie ; les personnes qui avaient les moyens de payer le traitement se rendaient Ă la RĂ©union et Ă lâĂźle Maurice, deux Ăźles de lâocĂ©an Indien, pour se faire soigner.