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Summary: Andoany, 1 dĂ©cembre 2010 (IRIN) - A Nosy Be, une Ăźle au large de la cĂŽte nord-ouest de Madagascar et son lieu de villĂ©giature le plus animĂ©, la rĂ©sistance de la communautĂ© au tourisme sexuel reste ferme vis-Ă -vis du travail sexuel des enfants, mais lâĂ©conomie dĂ©clinante du pays rend ce dur combat encore plus difficile.
Andoany, 1 dĂ©cembre 2010 (IRIN) - A Nosy Be, une Ăźle au large de la cĂŽte nord-ouest de Madagascar et son lieu de villĂ©giature le plus animĂ©, la rĂ©sistance de la communautĂ© au tourisme sexuel reste ferme vis-Ă -vis du travail sexuel des enfants, mais lâĂ©conomie dĂ©clinante du pays rend ce dur combat encore plus difficile. Officiellement, la population de Nosy Be est de 109 000 habitants, dont 12 personnes sĂ©ropositives ; officieusement, personne ne sait vraiment jusquâĂ quel point les travailleuses du sexe migrantes ont fait monter ce chiffre. « Les filles de lâensemble des 22 rĂ©gions [de Madagascar] viennent ici Ă cause du tourisme et de lâopportunitĂ© dâavoir un mari blanc », a dit Ă IRIN Jean-Claude de Bikiny, administrateur adjoint de lâĂźle. « Nous nous battons contre ce problĂšme [le tourisme sexuel] depuis 1990 ». Selon lui, les travailleuses du sexe pourraient reprĂ©senter environ huit pour cent de la population de Nosy Be, mais ce chiffre baisse ou augmente selon lâimportance des saisons touristiques. Il existe des vols directs et frĂ©quents depuis lâEurope vers cette Ăźle de 300 km2, et des bateaux ferry couvrent rĂ©guliĂšrement les huit kilomĂštres de distance avec lâĂźle de Madagascar. Selon ONUSIDA, environ 0,2 pour cent de la population sexuellement active est infectĂ© au VIH/SIDA, dans un pays qui compte 20 millions dâhabitants. « Il y a 20 ans, il Ă©tait inimaginable que des femmes deviennent des prostituĂ©es », a dit Ă IRIN Antoinette Djaotoly, une Ă©ducatrice au Foyer Social, un centre de formation communautaire Ă Andoany , la capitale de Nosy Be â anciennement Hellville. Le centre offre des formations dâaptitudes Ă la vie quotidienne, et toute une palette de mĂ©tiers, de manucure Ă mĂ©canicien automobile, permettant aux travailleuses du sexe de chercher un autre travail. Quâest ce qui a mal tournĂ© ? En 1990, deux Ă©vĂ©nements sont Ă lâorigine du tourisme sexuel : les effets dâun programme dâajustement structurel ont commencĂ© Ă se faire sentir, provoquant des licenciements Ă grande Ă©chelle en vue dâune croissance Ă©conomique ; et le gouvernement a accordĂ© un contrat de pĂȘche au thon Ă une entreprise japonaise, amenant plus de 20 chalutiers dans les eaux poissonneuses de lâĂźle. « A Nosy Be, beaucoup de femmes sont venues travailler dans une usine de crevettes, et quand lâentreprise a commencĂ© Ă rĂ©duire le personnel, les femmes au chĂŽmage sont devenues des prostituĂ©es. Les pĂȘcheurs japonais avaient de lâargent et câest lĂ que la prostitution Ă grande Ă©chelle a dĂ©butĂ© », a dit Ă IRIN Jocelyn Gabriel, membre du rĂ©seau de protection qui lutte contre le travail sexuel. LâĂ©conomie, se basant sur la pĂȘche Ă petite Ă©chelle, lâylang-ylang (Cananga odorata, Ă©galement connue comme lâarbre Ă parfum), le cafĂ© et la canne Ă sucre, a souffert depuis que le plus grand employeur de lâĂźle, une distillerie de rhum, a fermĂ© ses portes en 2008. « Environ 1 300 personnes ont perdu leur emploi [quand la distillerie a fermĂ©] et si vous estimez que chaque employĂ© Ă cinq personnes ou plus Ă charge, vous pouvez voir les effets », a dit M. Gabriel. Une Ă©conomie en ralentissement â mĂȘme dans le secteur du tourisme qui a souffert de la rĂ©putation de lâĂźle au sujet du tourisme sexuel, selon M. de Bikiny, â a fait baisser le salaire moyen des employĂ©s des hĂŽtels, passant par exemple de 40 Ă 30 dollars par mois. Les travailleuses du sexe sont considĂ©rĂ©es comme des opportunistes venant dâailleurs. « Les filles de Nosy Be ne travaillent pas comme prostituĂ©es, car tout le monde se connaĂźt et il est honteux dâĂȘtre connu comme prostituĂ©e...Sans la prostitution, Nosy Be connaĂźtrait une croissance [Ă©conomique], car il y a beaucoup dâautres choses Ă faire », a dit Ă IRIN Lawrence Velonkasise, administrateur au ministĂšre de lâEducation de Madagascar Ă Nosy Be. Le « succĂšs » des travailleuses du sexe A Andoany, les Ă©coles donnent des cours dâaptitudes Ă la vie quotidienne qui mettent en garde contre le travail du sexe, mais « si on choisit de dire que les filles ne doivent pas aller avec des hommes blancs, cela pourrait ĂȘtre considĂ©rĂ© comme du racisme », a dit M. Velonkasise. Le « succĂšs » de certaines travailleuses du sexe, dont les liaisons avec des ressortissants Ă©trangers les ont transformĂ©es en « modĂšles » possĂ©dant une maison, ou voiture, ou les deux, a dit M. Gabriel, complique la lutte contre le travail du sexe dans lâun des pays les plus pauvres au monde. Des travailleuses du sexe migrantes rentrant au pays relativement bien pourvues dâargent ont aussi jouĂ© un rĂŽle de publicitĂ© vivante pour que dâautres viennent sur lâĂźle. Elles viennent Ă Nosy Be depuis aussi loin que Toliara, la capitale de la province de Toliara, mais Mme Gabriel pense quâenviron 80 pour cent viennent du district dâAntsohihy, dans la rĂ©gion de Sofia, dans la province de Mahajanga, une zone de culture des oignons, des haricots et du riz prĂšs de Nosy Be sur lâĂźle de Madagascar. Il y a 8 000 rĂ©sidents Ă©trangers [installĂ©s] de longue date Ă Nosy Be, principalement des Français et des Italiens, selon Mme Gabriel. Les lois sur lâimmobilier requiĂšrent que les investisseurs Ă©trangers aient des partenaires locaux, et les femmes malgaches sont souvent partenaires dans des achats immobiliers. « Il y en a peut-ĂȘtre qui pense que ce nâest pas bien pour un homme de 55 ans dâavoir une aventure avec une jeune femme malgache. Mais alors, quâen est-il si aprĂšs une vie de travail, lâĂ©pouse de cet homme lâa quittĂ© ? » a dit un Français, qui a requis lâanonymat, Ă IRIN. « Ses enfants ont dĂ©jĂ quittĂ© la maison. Devrait-il rester seul [en France] ? Pourquoi ne pourrait-il pas venir ici et rencontrer des femmes superbes ? Lâhomme a une nouvelle vie, et les femmes et leur famille en bĂ©nĂ©ficient aussi ». Oriel, 26 ans, une travailleuse du sexe de la ville portuaire de Mahajanga, a dit Ă IRIN quâelle Ă©tait devenue une travailleuse du sexe aprĂšs que le pĂšre de ses deux enfants est venu sâinstaller Ă Nosy Be pour monter une entreprise, qui a fait faillite. Il est ensuite parti Ă Mayotte, une Ăźle française dans le canal du Mozambique, et elle sâest retrouvĂ©e obligĂ©e de se dĂ©brouiller, pour elle-mĂȘme et ses enfants. Elle travaille le long du front de mer, avec de nombreux bars et restaurants Ă Ambatoloaka, un village de pĂȘcheurs avec une population officielle de 4 461 habitants, Ă sept kilomĂštres dâAndoany, qui fourmille la nuit de travailleuses du sexe offrant leurs services. Chatian Andriamahasolo, conseiller municipal Ă Ambatoloaka , a commencĂ© Ă surveiller les travailleuses du sexe en 2008, « car jâai une fille et je ne veux pas quâelle devienne comme [ces] autres filles », a-t-il dit Ă IRIN. Les citoyens malgaches doivent porter sur eux leur carte dâidentitĂ© et un groupe de sept volontaires parcourent les rues ; sâils croisent une fille de moins de 18 ans, ou sans identification, ils lâaccompagnent jusquâau commissariat. nitiatives de la communautĂ© « En 2008/09, on trouvait habituellement 10 Ă 15 filles sans carte dâidentitĂ© en une nuit et certaines Ă©taient mineures. Ces jours ci, il sâagit dâune ou deux [sans carte dâidentitĂ©] â les gens savent quâils sont obligĂ©s dâavoir sur eux leur carte dâidentitĂ© », a-t-il dit Ă IRIN. De nombreux hĂŽtels Ă Ambatoloaka et dans dâautres endroits Ă Nosy Be permettent aux clients dâamener des travailleuses du sexe dans leur chambre sans coĂ»t supplĂ©mentaire, mais M. Andriamahasolo a dit que la direction Ă©tait obligĂ©e de vĂ©rifier leur carte dâidentitĂ© pour sâassurer que les femmes avaient plus de 18 ans, et les patrouilles de la communautĂ© Ă©taient autorisĂ©es Ă vĂ©rifier les chambres dâhĂŽtel si on soupçonnait que des filles mineures sây trouvaient. « Les Ă©trangers donnent une mauvaise image de Nosy Be, mais nous avons besoin des Ă©trangers pour amener de lâargent [sur lâĂźle] », a-t-il dit. Les tentatives de la communautĂ© pour fermer les bars Ă minuit ont Ă©tĂ© contrecarrĂ©es par les propriĂ©taires. Lorsque les demandes dâextension des horaires dâouverture jusquâĂ trois heures du matin ont Ă©tĂ© refusĂ©es, les propriĂ©taires ont eu des dispenses spĂ©ciales venant dâAntananarivo, la capitale de Madagascar. « Câest un gros problĂšme, je ne vais pas vous mentir », a dit M. Andriamahasolo. Le fait que des touristes se dirigent vers le parc national de Nosy Be, Ă la recherche de lĂ©muriens plutĂŽt que de travailleuses du sexe, ne signifie pas que le tourisme sexuel ait Ă©pargnĂ© Ambatozavavy, une petite communautĂ© de pĂȘcheurs de 1 000 personnes Ă 18 kilomĂštres dâAndoany. LâĂ©cole du village, qui date de 50 ans, nâaccueillait les enfants que jusquâĂ lâĂąge de 13 ans, aprĂšs quoi ils devaient achever leur scolaritĂ© Ă Andoany. « Il y a de la violence psychologique Ă Hellville [Andoany] pour les enfants â ils voient de belles femmes, de belles voitures et de lâargent. Les garçons cherchent un travail, et les filles de lâargent facile, surtout la prostitution », a dit le directeur dâĂ©cole Edouard Rasolofo Ă IRIN. La communautĂ©, pauvre, a agrandi les classes Ă ses propres frais, et les donateurs payent sept des dix enseignants, ce qui permet aux villageois de retarder le dĂ©part des enfants Ă Andoany jusquâĂ lâĂąge de 16 ans, et cela a eu un effet remarquable sur le taux de rĂ©ussite malgrĂ© lâaugmentation des effectifs dans les classes. Avant, sur les 30 Ă©lĂšves dâAmbatozavavy qui partaient Ă Andoany lorsquâils avaient 13 ans, 10 rĂ©ussissaient leur annĂ©e. Sur ces 10, quatre passaient en classe supĂ©rieure Ă 14 ans, et deux dâentre eux passaient en classe supĂ©rieure lâannĂ©e suivante, et finalement un [seul] rĂ©ussissait son annĂ©e Ă 16 ans. Depuis la construction des classes supplĂ©mentaires, 56 des 60 Ă©lĂšves ĂągĂ©s de 13 ans Ă lâĂ©cole de la communautĂ© avaient leur annĂ©e, 52 dâentre eux rĂ©ussissaient lâannĂ©e dâaprĂšs, et 50 des Ă©lĂšves de 15 ans rĂ©ussissaient lâannĂ©e suivante. La communautĂ© a posĂ© les fondations dâune autre salle de classe, mais elle a besoin de 3 000 dollars pour le matĂ©riel, ce qui leur permettrait de retarder le dĂ©part de leurs enfants Ă Andoany jusquâĂ lâĂąge de 17 ans. « Celles du village qui sont devenues des prostituĂ©es ne reviennent pas aprĂšs quâelles aient abandonnĂ© lâĂ©cole. Elles envoient de lâargent au village via dâautres personnes, car elles auraient honte dâĂȘtre ici en personne », a dit M. Rasolo. Un rĂ©seau de protection sociale a Ă©tĂ© mis en Ćuvre, en rĂ©ponse au tourisme sexuel. Il comprend des reprĂ©sentants de la police, de la justice, des ONGs, des mĂ©decins, des Ă©coles et de lâindustrie du tourisme, et il se rĂ©unit au moins une fois par mois pour revoir et concevoir des stratĂ©gies. Djaotoly, un formateur au Foyer Social â un centre de formation Ă©tabli en 1972, mais qui se focalise depuis 1990 sur le fait de donner une deuxiĂšme chance aux travailleuses du sexe â a dit Ă IRIN quâĂ part le Fonds des Nations Unies pour lâenfance (lâUNICEF), tous les autres donateurs internationaux avaient stoppĂ© les financements depuis un changement apparentĂ© Ă un coup dâĂ©tat en mars 2008. Durant lâannĂ©e 2010, environ 60 anciennes travailleuses du sexe, dont certaines nâavaient que 16 ans, ont suivi des formations. Lâindustrie du tourisme recrute des rĂ©ceptionnistes, des secrĂ©taires et dâautres employĂ©es venant du Foyer Social. « Ce nâest pas un problĂšme de moins dâargent â nous nâavons pas dâargent », a dit Djaotoly. « Câest trĂšs difficile de travailler dans ce genre dâenvironnement ».