MADAGASCAR : La crise sociopolitique jette plusieurs Ă©coliers hors de l’école

Summary: La crise sociopolitique coĂ»te cher Ă  beaucoup de foyers malgaches et Ă  plusieurs niveaux. Outre le coĂ»t de la vie qui n’a cessĂ© de grimper durant ces deux derniĂšres annĂ©es, la scolarisation est aussi touchĂ©e.

[Le 1 octobre 2011] - Le chiffre communiquĂ© par les Nations Unies inquiĂšte plus d’un. Fatma Samoura, coordonnateur du systĂšme des Nations Unies Ă  Madagascar, a annoncĂ© que quelque 138.000 enfants de six Ă  10 ans et plus ont abandonnĂ© l’école depuis l’annĂ©e derniĂšre. Ce chiffre s’ajoute aux 400.000 non-scolarisĂ©s dĂ©jĂ  recensĂ©s en 2009-2010.

Heriniaina, huit ans, en fait partie. Il a arrĂȘtĂ© de frĂ©quenter un cours d’enseignement gĂ©nĂ©ral Ă  Isotry, un quartier surpeuplĂ© d’Antananarivo, la capitale de Madagascar, oĂč il s’est inscrit depuis qu’il avait quatre ans. Depuis le dĂ©but de la crise, sa mĂšre, machiniste dans une entreprise textile de la zone franche, a perdu son emploi et s’est retrouvĂ©e au chĂŽmage. Elle a dĂ» faire de petits boulots ça et lĂ  comme la lessive chez les gens pour joindre les deux bouts.

MalgrĂ© cela, elle ne pouvait plus subvenir aux besoins scolaires de ses fils. «Si j’avais inscrit mes trois fils Ă  l’école comme j’aurais dĂ» l’avoir fait, nous n’aurions plus eu de quoi manger. Le prix du matĂ©riel scolaire est une charge supplĂ©mentaire. Du coup, ils ont arrĂȘtĂ© d’étudier un mois aprĂšs que je me suis retrouvĂ©e au chĂŽmage», explique la mĂšre.

Auparavant, les Ă©coles publiques malgaches bĂ©nĂ©ficiaient d’un don de kits scolaires du programme «Education pour tous», qui recevait beaucoup de fonds et d’aides Ă©trangĂšres. Ces dons comprenaient des lots de fournitures scolaires (cahiers, stylos, trousses et cartables) et des tabliers distribuĂ©s gratuitement Ă  tous les Ă©lĂšves des Ă©coles publiques pour allĂ©ger les charges parentales et assurer la scolarisation des enfants issus de familles pauvres.

Mais les aides ont Ă©tĂ© suspendues depuis le dĂ©but de la crise, en 2009, aprĂšs les dĂ©parts successifs des grands bailleurs de fonds dans le domaine de l’éducation. Ce secteur se trouve de plus en plus dans un Ă©tat inquiĂ©tant, l’enseignement public notamment.

Du coup, les kits scolaires ne sont plus disponibles et la caisse Ă©cole est passĂ©e de 3.000 Ă  800 ariary (monnaie locale) par Ă©lĂšve par an suite Ă  une coupe budgĂ©taire. Cette caisse Ă©cole est consacrĂ©e Ă  l'appui financier des Ă©coles primaires publiques afin d'allĂ©ger les charges scolaires des Ă©lĂšves dans les Ă©tablissements. Elle concerne prĂšs de 1,694 million Ă©lĂšves des 10.550 Ă©coles primaires publiques rĂ©parties sur l’ensemble de la Grande Ile.

De plus en plus d’enfants en Ăąge de scolarisation ne sont pas inscrits. «Nous avons enregistrĂ© moins d’enfants cette annĂ©e par rapport Ă  2009. La baisse dans les inscriptions a atteint les 25 pour cent. La prochaine annĂ©e scolaire risque d’ĂȘtre encore plus lourde pour les parents», souligne Jeanne Ranaivosoa, directrice d’une Ă©cole publique de la capitale.

Certaines mĂšres de familles, interviewĂ©es sur les rĂ©inscriptions de leurs enfants, avouent ne pas y penser du tout. Pourtant, la majoritĂ© des Ă©coles ont dĂ©jĂ  ouvert leurs inscriptions. «La non-scolarisation est tolĂ©rable, mais priver mes enfants de nourriture est intolĂ©rable», explique Jeanne D’Arc Rakotoarivony, qui va de quartier en quartier pour trouver de petits boulots et amasser un peu de sous.

Au lieu d’aller Ă  l’école, de plus en plus d’enfants errent en ville pour travailler, vendre des sachets en plastique, chercher de l’eau, garder les voitures dans les parkings, rien que pour se faire un peu d’argent. D’autres, moins chanceux, n’ont d’autre alternative que de demander l’aumĂŽne pour s’acheter un bol de riz au moins une fois par jour.

«J’ai dĂ©cidĂ© de ne pas aller Ă  l’école pour aider ma mĂšre qui souffre beaucoup tous les jours suite au dĂ©part de mon papa qui l’a quittĂ©e depuis l’annĂ©e derniĂšre», confie Andry Arivony, un petit garçon de 12 ans, conscient de l’importance de l’éducation, mais forcĂ© par les circonstances d’entrer dans le monde du travail informel.

Le syndicat des professionnels diplĂŽmĂ©s en travail social a dĂ©jĂ  attirĂ© l’attention du public par rapport Ă  cette situation causĂ©e par la crise. La situation en milieu rural est pire que celle en rĂ©gion urbaine. Les Nations Unies se sentent interpellĂ©es. «Le plan social souffre Ă  Madagascar. Nous devons agir vite», a dĂ©clarĂ© Samoura.

Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) Ă  Madagascar rapporte que le nombre de personnes considĂ©rĂ©es comme Ă©tant pauvres n’a cessĂ© d’augmenter en raison de la crise. La pauvretĂ© touche prĂšs de huit enfants - de zĂ©ro Ă  14 ans - sur 10. Cette pauvretĂ© lĂšse les enfants de leurs droits fondamentaux comme l’accĂšs Ă  l’éducation.

Les partenaires de l’éducation se sont dĂ©jĂ  mobilisĂ©s Ă  Madagascar pour tenter de remĂ©dier Ă  la situation. L'UNICEF compte bientĂŽt inclure dans ses programmes la distribution de kits scolaires aux Ă©lĂšves, enseignants et Ă©coles avant la prochaine rentrĂ©e scolaire. Mais malgrĂ© les efforts menĂ©s par certaines agences pour faire remonter le secteur Ă©ducatif, le pays risque de ne pas atteindre les Objectifs du millĂ©naire pour le dĂ©veloppement en 2015.

pdf: http://www.ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=6714

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