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Le projet de loi sur la récidive des majeurs et des mineurs a été présenté par la ministre de la justice, Rachida Dati, mercredi 13 juin, en conseil des ministres. Le texte prévoit l'instauration de peines planchers pour les récidivistes, qu'ils soient majeurs ou mineurs, et l'abaissement de la majorité pénale pour les mineurs récidivistes. Il sera examiné en première lecture au Sénat, début juillet. Le texte prévoit l'instauration de peines minimales de l'ordre d'un tiers de la peine maximale encourue, dès la première récidive pour les crimes et les délits passibles de trois ans d'emprisonnement. Le juge peut toutefois prononcer une peine inférieure, "par une décision spécialement motivée", tenant compte "des circonstances de l'infraction, de la personnalité de son auteur ou de ses garanties d'insertion ou de réinsertion". La possibilité de prononcer une peine inférieure est plus sévèrement encadrée à la deuxième récidive pour les cas de violences volontaires, délits commis avec la circonstance aggravante de violences, agression ou atteinte sexuelles ou délit puni de dix ans d'emprisonnement. La décision du juge doit alors reposer uniquement sur "des garanties exceptionnelles d'insertion ou de réinsertion". En ce qui concerne les mineurs de 16 à 18 ans, à la deuxième récidive, l'excuse de minorité est écartée pour les crimes d'atteintes volontaires à la personne et les délits de violence volontaires, agression sexuelle ou délits commis avec la circonstance aggravante de violences. Le texte a reçu l'aval du Conseil d'Etat, mais le gouvernement a dû retirer l'essentiel de l'article 4 du projet – qui prévoyait la possibilité pour un juge de retenir la récidive même si celle-ci n'avait été relevée par une précédente juridiction –, devant les réticences des juges administratifs. Le Conseil d'Etat a également fait part d'une "réserve d'interprétation" sur la justice des mineurs. Dans son avis, non rendu public, le Conseil d'Etat rappelle l'esprit de l'ordonnance de 1945, qui privilégie les mesures éducatives. Le projet suscite une grande inquiétude chez les magistrats et les avocats, qui redoutent une brutale augmentation de la population carcérale. Le Syndicat de la magistrature (SM, gauche) a lancé un appel contre le projet de loi : "Nous dénonçons l'esprit particulièrement régressif de ce texte qui fait de la peine d'emprisonnement, le centre de la réponse pénale. (…) Mécaniquement ce projet de loi est une machine à créer de l'emprisonnement à un moment où la France atteint un taux d'incarcération inégalé depuis 1945." "Nous n'acceptons pas le renoncement à l'éducation de nos enfants, fussent-ils délinquants multirécidivistes", poursuit l'appel du SM. Le projet est jugé insuffisant pour le syndicat de gardiens de la paix Alliance, classé à droite, qui propose son propre texte sur les peines planchers. Pour son secrétaire général, Jean-Claude Delage, "on ne fait pas de distinction entre récidive légale et réitération d'un délit. Les victimes ne font pas la différence. Un délinquant qui fait du trafic de stupéfiants et qui agresse un policier n'est pas récidiviste.Sur certains points, nous sommes moins durs que le projet de Mme Dati. Par exemple sur les mineurs, où nous prévoyons davantage de mesures éducatives".