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ConfĂ©rence europĂ©enne pour le respect des droits des mineurs Ă©trangers en Europe contre leur enfermement et leur Ă©loignement Mercredi 14 mars 2007 Mesdames et Messieurs, Le droit des enfants est un droit dâun petit ĂȘtre humain, mais ce nâest pas pour cela que ce droit est incomplet. En tant que SecrĂ©taire GĂ©nĂ©rale Adjointe dâune organisation pour qui le respect du droit de lâhomme et le droit en gĂ©nĂ©ral consacre sa mission principale, je suis heureuse de pouvoir mâadresser Ă vous. LâarrivĂ©e de mineurs migrants non accompagnĂ©s nâest pas un phĂ©nomĂšne nouveau. Leur accueil et leur protection se pose aujourdâhui de façon cruciale en raison de lâaugmentation de leur nombre, de la paralysie des dispositifs dâaccueil et de protection, et des dangers auxquels ils sont exposĂ©s. Pour rĂ©pondre Ă cette question il faut remonter aux origines de leur dĂ©part de leur pays dâorigine souvent liĂ© Ă une situation de dĂ©tresse, comme les enfants orphelin du SIDA, ou dâexploitation tel que les enfants victimes de la traite dâĂȘtres humains. Les solutions adoptĂ©es par les diffĂ©rents Etats membres du Conseil de lâEurope divergent. En gĂ©nĂ©ral, leur prĂ©sence est tolĂ©rĂ©e jusquâĂ lâĂąge de leur majoritĂ©, ensuite ils sont renvoyĂ©s vers leurs pays dâorigine. Il arrive aussi que ces mineurs soient renvoyĂ©s dans leurs pays avant 18 ans. Dans la plupart des cas, lâaccompagnement qui est offert Ă ces mineurs dans le pays dâaccueil laisse Ă dĂ©sirer et ne tient pas compte de leurs besoins en tant quâenfant. Il nâest pas rare que ces mineurs, au lieu de suivre le parcours scolaire, prĂ©fĂšrent fuir les centres dâaccueil et vivent dans les rues. Quelle est la position des instances du Conseil de lâEurope ? Plusieurs instances ont eu Ă se prononcer sur la question. Je commence par le ComitĂ© pour la prĂ©vention de la torture. Le CPT a notamment indiquĂ© que « les mineurs migrants non accompagnĂ©s demandeurs dâasile devraient ĂȘtre accueillis dans des maisons rĂ©sidentielles et/ou dans des familles de placement, ou avec des membres de la famille rĂ©sidant dĂ©jĂ dans le pays dâaccueil ». La Cour europĂ©enne des droits de lâhomme sâest Ă©galement penchĂ©e sur cette question dans lâarrĂȘt Mubilanzila Mayeka et Kaniki Mitunga c. Belgique du 12 octobre 2006 sous lâangle de lâarticle 3 de la CEDH qui interdit la torture. En effet, dans cette affaire, la Cour a constatĂ© que autoritĂ©s belges nâont pas veillĂ© Ă ce quâune prise en charge effective de Tabitha, alors ĂągĂ©e de cinq ans, ait lieu et nâont pas tenu compte de la situation rĂ©elle que risquait dâaffronter lâenfant lors de son retour dans son pays dâorigine. Vu les conditions dans lesquelles il sâest dĂ©roulĂ©, elle a conclu que le refoulement de Tabitha lui a nĂ©cessairement causĂ© un sentiment dâextrĂȘme angoisse et fait preuve dâun manque flagrant dâhumanitĂ© envers sa personne, eu Ă©gard Ă son Ăąge et Ă sa situation de mineure non accompagnĂ©e de sorte quâil atteint le seuil requis pour ĂȘtre qualifiĂ© de traitement inhumain. La Cour estime que ce refoulement constitue un manquement aux obligations positives de la Belgique, qui sâest abstenu de prendre les mesures et prĂ©cautions requises. DĂšs lors, la Cour conclut Ă la violation de lâarticle 3 Ă lâĂ©gard de Tabitha du fait de son refoulement. Concernant la dĂ©tention des mineurs migrants, le Commissaire aux droits de lâhomme a lui aussi dans nombre de ses rapports, critiquĂ© cette pratique quâil considĂšre contraire à l'intĂ©rĂȘt supĂ©rieur de l'enfant et Ă la Convention des droits de lâenfant. On constate pour autant que cette pratique se dĂ©veloppe. Au-delĂ de son opposition de principe, le Commissaire a souvent pu constater que les centres de dĂ©tention ou de rĂ©tention accueillant des mineurs ou des familles nâĂ©taient aucunement adaptĂ©s aux besoins des mineurs : absence dâĂ©quipements, de nourritures ou de fournitures (couches, lait, jouets, livres) appropriĂ©s. Les structures sont souvent adaptĂ©es dans l'urgence et de maniĂšre ad hoc pour faire face Ă une demande particuliĂšre sans prendre en compte la problĂ©matique dans son ensemble. A titre d'exemple, un espace de jeu n'est jamais prĂ©vu pour ces enfants qui passent leurs journĂ©es enfermĂ©es avec leurs parents. De ces considĂ©rations, ils ressort clairement que la situation des mineurs migrants non accompagnĂ©s demande une sĂ©rie de mesures allant au-delĂ du contrĂŽle des frontiĂšres et des actions contre la migration irrĂ©guliĂšre. Câest la perspective du Conseil de lâEurope. Depuis la ConfĂ©rence de Malaga sur "les migrations des mineurs non accompagnĂ©s: agir dans lâintĂ©rĂȘt supĂ©rieur de lâenfant", tenue les 27 et 28 octobre 2005, le CDMG travaille sur un projet de recommandation relatif Ă une politique de projets de vie pour promouvoir lâintĂ©rĂȘt supĂ©rieur de lâenfant. Ce projet de recommandation sera examinĂ© par le CDMG lors de sa prochaine rĂ©union en mai prochain. Pourquoi une initiative du Conseil de lâEurope sur un Projet de recommandation sur les projets de vie en faveur de mineurs migrants non accompagnĂ©s ? Jâaime beaucoup le titre de cette recommandation car elle vise lâavenir de ces enfants, leur donne de lâespoir. Elle vise Ă protĂ©ger les enfants, et pas les Ă©tats contre les enfants ! Il rĂ©sulte des rapports, notamment de la ConfĂ©rence de Malaga en 2005, quâune approche fondĂ©e uniquement sur les politiques dâimmigration nâapporte pas de solutions appropriĂ©es. Il faut prendre en compte les raisons Ă lâorigine des projets migratoires de ces mineurs. Le mineur migrant non accompagnĂ© est avant tout un enfant. Les principales caractĂ©ristiques dâun projet de vie tel que proposĂ© par le projet de recommandation est fondĂ© sur le respect de lâintĂ©rĂȘt supĂ©rieur de lâenfant. Toute proposition doit prendre en compte la situation spĂ©cifique du mineur migrant non accompagnĂ©, son profil, ses attentes et les opportunitĂ©s qui lui sont offertes dans les pays dâaccueil et dâorigine. Le projet de vie doit offrir Ă un mineur migrant non accompagnĂ© une perspective dâavenir, une proposition de recherche dâune solution durable renforçant ainsi la capacitĂ© personnelle du mineur et ses facultĂ©s . Il doit fixer des objectifs individualisĂ©s et Ă©volutifs que le mineur sâengage Ă respecter, des modalitĂ©s de suivi de leur mise en Ćuvre et une Ă©valuation rĂ©guliĂšre basĂ©e sur des Ă©changes entre le mineur et les autoritĂ©s compĂ©tentes. Câest un engagement respectif entre le mineur migrant non accompagnĂ© et les autoritĂ©s de son sĂ©jour. Le retour au pays dâorigine doit ĂȘtre prĂ©vu que si les conditions dans ce pays permettent dây rĂ©aliser le projet de vie. Ce retour nâexclut pas la possibilitĂ© quâune partie du projet de vie puisse toujours se rĂ©aliser dans le pays de destination. A cet Ă©gard, plusieurs possibilitĂ©s sont possibles. Lâessentiel est que le mineur puisse rĂ©aliser son projet de vie jusquâĂ la fin. Il poursuit lâobjectif que le mineur devienne membre Ă part entiĂšre de la sociĂ©tĂ© oĂč quâil soit. Afin de se concrĂ©tiser, les projets de vie nĂ©cessitent certaines conditions de faisabilitĂ©. Sur le plan national, il faut rĂ©server les ressources matĂ©rielles, humaines et financiĂšres nĂ©cessaires Ă la mise en place du projet de vie et des structures chargĂ©es de la rĂ©alisation, notamment en ce qui concerne lâidentification, lâaccueil, lâĂ©valuation de la situation et la protection des mineurs migrants non accompagnĂ©s ; dĂ©finir les responsabilitĂ©s de chacun des partenaires, notamment les autoritĂ©s nationales, locales, services sociaux, Ă©ducateurs, familles, reprĂ©sentants lĂ©gaux, pour la mise en Ćuvre et le suivi des projets de vie ; mettre en Ćuvre au niveau national des structures chargĂ©es de la coordination des diffĂ©rents acteurs intervenant auprĂšs des mineurs non accompagnĂ©s ; il faut au niveau europĂ©en Ă©tablir des rĂ©seaux dâĂ©changes dâinformations impliquant les Etats dâorigine, de transit et dâaccueil, mais aussi les organisations internationales et les reprĂ©sentants de la sociĂ©tĂ© civile ; et enfin il faut mettre en place une coopĂ©ration renforcĂ©e entre les Etats membres du Conseil de lâEurope et les Etats non membres afin de rechercher des solutions durables pour et avec les mineurs migrants non accompagnĂ©s et coordonner leurs politiques et pratiques. Mesdames et Messieurs, Pour conclure, je voudrais revenir Ă la question de la dĂ©finition. Peu importe la raison de leur dĂ©part de leur pays dâorigine, les mineurs migrants non accompagnĂ©s sont tout dâabord des enfants. Ils sont vulnĂ©rables, seuls et se sentent abandonnĂ©s. Nous ne pouvons faire autrement que de les accueillir au vĂ©ritable sens du mot afin de protĂ©ger leur dignitĂ© humaine et la nĂŽtre par la mĂȘme occasion.
Conseil de lâEurope, Strasbourg
La dĂ©finition retenue est particuliĂšrement importante : qui sont les mineurs migrants non accompagnĂ©s ? Des enfants ? des immigrants ? des demandeurs dâasile?