COTE D’IVOIRE Vacciner partout malgrĂ© l’impasse politique

Summary: ABIDJAN, 24 jan (IPS) - Les campagnes de vaccination dans le nord de la CĂŽte d’Ivoire, suspendues depuis deux mois en raison de la crise sociopolitique que traverse le pays depuis l’élection prĂ©sidentielle du 30 novembre 2010, reprennent progressivement.

La campagne de vaccination contre la fiĂšvre jaune, reportĂ©e Ă  deux reprises, a finalement dĂ©butĂ© le samedi 22 janvier et doit durer une semaine. Pour le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), ce sont 830.000 adultes et enfants de plus de neuf mois qui sont concernĂ©s dans quatre districts du pays. L’épidĂ©mie s’était dĂ©clarĂ©e il y a trois mois dans plusieurs localitĂ©s du centre et du nord de la CĂŽte d’Ivoire.

"La campagne a effectivement dĂ©marrĂ© dans les quatre districts sanitaires de BĂ©oumi, Katiola (centre), SĂ©guĂ©la et Mankono (nord). La population y adhĂšre sans difficultĂ©s", a indiquĂ© au tĂ©lĂ©phone lundi, Ă  IPS, Louis Vigneault-Dubois, responsable de la communication Ă  UNICEF-CĂŽte d’Ivoire. "Pour le moment, nous travaillons exclusivement avec les ONG et nous serons Ă  mĂȘme de servir toutes les doses prĂ©vues", a-t-il assurĂ©.

Dans les quatre districts concernĂ©s, ce sont 66 cas de fiĂšvre jaune qui ont Ă©tĂ© enregistrĂ©s depuis novembre dernier, dont 25 dĂ©cĂšs, selon l’UNICEF dans un communiquĂ© datĂ© du 21 janvier. De son cĂŽtĂ©, l’Organisation mondiale de la santĂ© (OMS) avait annoncĂ© 79 cas dont 44 dĂ©cĂšs dans un communiquĂ© du 20 janvier.

"Ce sont surtout les rĂ©gions rurales oĂč le taux global de vaccination est trop bas, ce qui est inacceptable", a expliquĂ© Dr Eli Ramamonjisoa, chef de la section Survie de l’enfant pour l’UNICEF en CĂŽte d’Ivoire, dans son communiquĂ©.

Elle a ajoutĂ© : "Nous travaillons Ă©galement avec nos partenaires pour reconstituer les stocks de vaccins et de traitement aux anti-rĂ©troviraux dans tout le pays, en particulier dans les endroits difficiles d’accĂšs".

La responsable par intĂ©rim de l’UNICEF en CĂŽte d’Ivoire, Sylvie Dossou, a estimĂ© pour sa part que "cette campagne montre... que malgrĂ© l’impasse politique dans laquelle se trouve le pays, le travail humanitaire continue toujours et sauve des vies en CĂŽte d'Ivoire..."

Le coĂ»t de l’opĂ©ration est estimĂ© par les organisations humanitaires Ă  50 millions de francs CFA (environ 100.000 dollars).

La gravitĂ© de la fiĂšvre jaune, une maladie potentiellement mortelle transmise par les moustiques, est telle qu'un seul cas confirmĂ© dans un pays est considĂ©rĂ© comme une Ă©pidĂ©mie. A ce jour, il n'existe pas de remĂšde connu, mais une seule dose du vaccin confĂšre une immunitĂ© pour dix ans, souligne le communiquĂ© de l’UNICEF.

Outre la fiĂšvre jaune, la campagne contre la poliomyĂ©lite est attendue pour reprendre, selon des agents de santĂ©. En effet, fortement perturbĂ©e par la campagne Ă©lectorale d’avant le premier tour du scrutin du 31 octobre 2010, la vaccination contre la polio n’avait pas rĂ©ussi Ă  atteindre les 6,8 millions d’enfants de zĂ©ro Ă  59 mois annoncĂ©s initialement.

"Nous se sommes pas certains que cette derniĂšre campagne (contre la polio du 26 au 29 octobre 2010) ait couvert Ă  90 pour cent l’ensemble du territoire national", a affirmĂ© Ă  IPS, AurĂ©lien KouamĂ©, infirmier au dispensaire de Borotou (nord-ouest). "Les doses de la vaccination Ă©tait disponibles, mais la population n’était pas accessible parce que prĂ©occupĂ©e par la situation politique. Il faudrait donc songer Ă  une reprise de l’opĂ©ration", a-t-il conseillĂ©.

Revenu Ă  Abidjan, la capitale Ă©conomique du pays, avec trois de ses collĂšgues, aprĂšs les Ă©lections, KouamĂ© attend un environnement apaisĂ© avant de retourner Ă  Borotou. "Nous avions craint pour notre sĂ©curitĂ©. Et comme il est constatĂ© dans d’autres secteurs de l’administration, beaucoup de personne ont fui par peur les zones sous contrĂŽle des ex-rebelles. Des services de santĂ© sont maintenant Ă  l’abandon", a-t-il affirmĂ©.

"En plus de cela, des mĂ©dicaments de premiĂšre nĂ©cessitĂ© commencent Ă  manquer dans les hĂŽpitaux", a rĂ©vĂ©lĂ© au tĂ©lĂ©phone Ă  IPS, Daouda Soro, agent de santĂ© Ă  l’hĂŽpital d’OdiennĂ© (nord). "Avant la crise, c’est la Pharmacie de santĂ© publique qui nous approvisionnait. Depuis deux mois, il n’y a plus rien. Les malades tendent Ă  retourner vers l’automĂ©dication avec les mĂ©dicaments de rue".

Concernant la mĂ©ningite, la campagne lancĂ©e dĂ©but dĂ©cembre 2010 en Afrique de l’ouest, par l’OMS pour les 25 pays de la ceinture de mĂ©ningitique, avec un nouveau vaccin, n’a pas encore Ă©tĂ© engagĂ©e en CĂŽte d’Ivoire, Ă  cause de la crise postĂ©lectorale en cours dans le pays depuis le 3 dĂ©cembre.

"Il y a une situation de dualitĂ© au sommet de l’Etat. Dans un tel contexte, il n’est pas prudent, pour les organisations humanitaires internationales, de prendre sur elles la dĂ©cision d’engager une campagne dans le pays, surtout quand il s’agit d’utiliser un nouveau traitement", a expliquĂ© Dr Kadi Kamara, un mĂ©decin gĂ©nĂ©raliste Ă  Abidjan.

Pour Kamara, la situation sanitaire risque d’ĂȘtre prĂ©occupante dans le pays si la normalisation n’intervenait pas au plus vite. Elle dit garder encore en mĂ©moire l’une des plus graves crises de la mĂ©ningite connue par la CĂŽte d’Ivoire en janvier-fĂ©vrier 2008, avec 120 cas enregistrĂ©s pour 28 morts dans le centre et le nord du pays.

"Nous sommes quasiment dans la mĂȘme pĂ©riode. Si cela devait encore Ă©clater, ajoutĂ© Ă  l’épidĂ©mie de fiĂšvre jaune, ce sera la catastrophe pour les populations de cette partie du territoire", a-t-elle dĂ©plorĂ©, dĂ©pitĂ©e. (FIN/2011)

pdf: http://www.ipsinternational.org/fr/_note.asp?idnews=6338

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