Appel pour un véritable statut juridique

Alors que la France accÚde à la présidence européenne et que la question de l'immigration suscite un intense travail législatif au sein de l'Union, nous, acteurs engagés dans la défense des droits de l'enfant, lançons un appel solennel aux autorités françaises au sujet de la situation des mineurs isolés étrangers.

Au-delĂ  des dĂ©bats brĂ»lants autour des politiques de rĂ©gulation des flux migratoires, nous demandons que ces enfants bĂ©nĂ©ficient d’un statut juridique leur confĂ©rant une protection adaptĂ©e.

Seuls, dĂ©racinĂ©s, privĂ©s de l’attention d’un adulte, menacĂ©s par toutes les formes de violence, d'abus et d'exploitation, leur protection relĂšve de la responsabilitĂ© des autoritĂ©s de notre pays et, plus largement, des Etats de l’Union. La prĂ©caritĂ© de leur situation de mineurs isolĂ©s doit Ă©videmment primer sur leur condition d'Ă©tranger. Il en va du respect de la Convention des droits de l'enfant (CIDE), comme des engagements pris par la France (1) et par tous les Etats signataires de ce traitĂ© international (2).

La situation actuelle des mineurs isolĂ©s Ă©trangers ne peut perdurer : inacceptable pour ceux qui ne sont pas admis sur le territoire (alors que leur situation l’exigerait aux yeux de la CIDE) et Ă  bien des Ă©gards insatisfaisante pour ceux qui sont lĂ©galement accueillis dans le pays.

Les premiers sont renvoyĂ©s dĂšs leur arrivĂ©e par les voies aĂ©roportuaires ou placĂ©s en zone d’attente comme les adultes, aucune procĂ©dure particuliĂšre n’étant dĂ©finie pour les mineurs. Le refoulement, trop systĂ©matique, s’effectue en direction du dernier pays de provenance du jeune qui n’est pas, bien souvent, son pays d’origine.

Ceux qui parviennent Ă  passer entre les mailles du filet demeurent sur le territoire, clandestinement, en errance, vulnĂ©rables Ă  l’extrĂȘme, proies faciles des trafiquants et des rĂ©seaux de prostitution ou de travail clandestin. La rĂ©alitĂ© de ces dangers reste sous-estimĂ©e par les autoritĂ©s en charge de la protection de l’enfance.

La prise en charge des seconds, Ă©cartelĂ©e entre la lĂ©gislation relative Ă  la protection de l’enfance et celle sur le sĂ©jour et l’entrĂ©e des Ă©trangers en France, prend trop peu en compte la situation particuliĂšre de ces enfants : absence de tutelle et de reprĂ©sentation lĂ©gale, insuffisance de l’assistance juridique, absence d’accompagnement psychologique adaptĂ© Ă  un parcours parfois traumatisant, inadĂ©quation des dispositifs Ă©ducatifs, manque de formation spĂ©cifique des travailleurs sociaux...

La rĂ©tention des mineurs non accompagnĂ©s en zone d’attente (3), la dĂ©signation tardive et les moyens insuffisants des administrateurs ad hoc, l’incertitude sur leur Ăąge et leur Ă©tat de minoritĂ© par manque de fiabilitĂ© des mĂ©thodes actuelles de dĂ©termination de l’ñge, l’incohĂ©rence des procĂ©dures dans l’étude des demandes d’asile et le caractĂšre approximatif de leur prise en charge imposent une rĂ©flexion globale et un changement radical d’attitude.

De plus, ces jeunes sont mobiles et interpellent ainsi l’ensemble des pays de l’Union. Pourtant, hormis celles, notables, du Conseil de l’Europe, aucune initiative europĂ©enne concrĂšte n’a Ă©tĂ© prise pour apporter une rĂ©ponse Ă  la hauteur des parcours complexes, voire des drames vĂ©cus par ces mineurs. La directive, dite « directive retour », votĂ©e au Parlement europĂ©en le 18 juin dernier, loin d’apporter une quelconque garantie de protection, vise Ă  intensifier leur expulsion et autorise leur dĂ©tention en zone d’attente pendant la mĂȘme durĂ©e que les adultes.

Face à cette situation indigne de notre pays, et contraire au devoir de protection qui lui incombe, nous appelons instamment les autorités françaises :

- Ă  promouvoir un principe de non refoulement aux frontiĂšres de l’Europe et Ă  cesser de recourir Ă  l’enfermement des mineurs isolĂ©s Ă©trangers en zone d’attente (en instaurant par exemple des lieux d’accueil et d’orientation qui proposeront un accompagnement adaptĂ© par des professionnels
spĂ©cialisĂ©s de l’enfance) ;

- Ă  faire la promotion, Ă  l’échelle europĂ©enne, d’une vĂ©ritable politique de protection ainsi que d’un statut juridique spĂ©cifique pour ces mineurs qui encadrerait leur accueil et leur suivi pour une protection maximale et une Ă©quitĂ© de traitement sur l’ensemble du territoire europĂ©en, prenant appui sur la Convention internationale des droits de l’enfant et sur les positions du Conseil de l’Europe.

La France dispose, aujourd’hui, d’une occasion unique de faire bouger les lignes sur cette question. De notre point de vue d’experts et de praticiens, ces deux dispositions sont envisageables si elles bĂ©nĂ©ficient d’un fort soutien. Il serait tout Ă  l’honneur de la France d’en ĂȘtre le promoteur.

A l’inverse, nous estimerions profondĂ©ment condamnable que ces mineurs soient les victimes des crispations politiques autour de la question de l’immigration.

(1) La France a ratifié la CIDE en 1990
(2) 192 pays sont signataires de la CIDE
(3) Cela a valu Ă  la France de trĂšs nombreuses critiques, dont celles du ComitĂ© des droits de l’enfant des Nations unies.

Pour signer la pétition: http://unicef.cabestan.com/unicef/soutien.cfm

Voir tous les signataires: http://www.unicef.fr/accueil/s-informer/l-enfance-en-france/signataires/var/lang/FR/rub/1248.html

 

pdf: http://www.unicef.fr/mediastore/FCKeditor/appel.pdf?kmt=ed28c8f76d0bb7df...

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